𝐷𝑒 𝑙'𝑨𝑖𝑔𝑢𝑖𝑙𝑙𝑒 𝑎̀ 𝑙'𝑬𝑡𝑜𝑖𝑙𝑒 | ᵗᵏ

Number 3

   Le lundi suivant, après un week-end déprimant à manger de la glace devant Le Diable s'habille en Prada, je me dirige vers les bureaux avec une démarche de zombie, et sans doute la même tête aussi. J'ai le réflexe de porter la main à mon ordinateur mais... Il n'est plus là. A cause de ce... Cet... Cette espèce de petit... Jeon Jungkook ! C'est bon, un masque de pure fureur a remplacé celui de zombie. Certaines personnes s'éloignent même craintivement de moi quand ils me croisent sur le trottoir. Et les regards curieux ne font qu'accroître ma mauvaise humeur. Ce satané stagiaire n'a pas intérêt à croiser mon chemin. Oh que non...

   Comme à mon habitude, je vais prendre l'ascenseur pour accéder à mon bureau. Une chance, les portes ne se referment pas à mon arrivée et je parviens à grimper dedans. Il n'y a qu'une seule autre personne avec moi. Mon regard l'analyse rapidement. Il transporte plusieurs cafés dans un étui en carton. Il doit être stagiaire, je me dis en détournant le regard. Stagiaire... Stagiaire ! Instantanément je le dévisage, toute ma rancœur à nouveau à son paroxysme. Il semble le sentir puisqu'il lève ses yeux sur moi. C'est lui... Jungkook... Toute la chaleur de la cabine semble s'être fait la malle tandis que je bous intérieurement. Il a l'air surpris et autre chose, que je n'arrive pas à définir...

   Nous nous fixons dans le blanc des yeux jusqu'à ce qu'un petit ting ne nous interrompe. L'ascenseur ouvre ses portes et s'engouffrent alors deux jeunes femmes, qui coupent notre échange visuel. Je détourne les yeux mais pas longtemps. Les deux demoiselles gloussent, légèrement dos à moi, en glissant quelques regards appuyés à l'objet de ma colère sourde, qui semble, si cela est possible, se décupler encore. Je fixe à nouveau le stagiaire de mes pupilles meurtrières tandis qu'il semble hésiter entre la gêne de se faire ouvertement mater par les deux femmes et la tristesse -et quoi d'autre, quelle est cette autre lueur dans ses prunelles ?- de me voir aussi froid à son égard. Qu'importe, les portes s'ouvrent sur l'étage que j'attendais. Je me hâte en dehors de la cabine pour ne plus avoir affaire aux gloussements féminins et à la présence de l'être le plus indésirable à mes yeux en ce moment.

   Evidemment, Jungkook me suis puisque nous travaillons au même niveau. Je l'ignore et me dirige sans plus tarder vers mon espace. Je salue Jin, mon supérieur direct, en arrivant et m'apprête à repartir quand il m'interrompt :

-Eh, Taehyung ! Ne sois pas à la bourre vendredi, me dit-il avec un clin d'œil.

   Encore énervé de ma "confrontation" avec la cible de ma haine, je me dépêche de revêtir mon masque pro, celui qui ne se soucie pas des problèmes persos et se focus sur une seule et même chose : le travail. Mais, bien que je sois en "mode boulot", j'ai du mal à comprendre Jin :

-Vendredi ? Pourquoi vendredi ? Qu'est-ce qu'il se passe vendredi ? Nouvel arrivage, collection à boucler, ajustements à finir sur les mannequins, finitions à peaufiner, visite du Boss, des collègues qui ont besoin d'aid...?

-Non non, rien de tout ça ! Respire, Taehyung, m'interrompt-il en riant et en posant ses deux grandes mains sur mes épaules.

   J'inspire donc un grand coup, me rendant compte que Jin sourit de toutes ses dents.

-Vendredi, tu commences les photos pour ton nouveau tissu. Emmène aux couturiers quelques patrons simples d'ici mercredi pour que les échantillons soient près à temps. On a pris un couple pour les modèles. Fais attention de fournir des patrons pour des vêtements féminins et masculins, les mesures habituelles. Oh, mais le temps file en ta compagnie, mon p'tit Tae. Il faut que j'y aille, bonne journée !

   Et il s'éloigne rapidement. Me laissant là, debout, figé comme un abruti. Si on me demande des patrons pour mon nouveau tissu, ça signifie que...

-Jin ! Kim Seokjin !!! Reviens ici tout de suite !

   Mais il a déjà disparu au détour d'un couloir.

   Mer... credi... Mon projet a été retenu ! Mais je déchante vite : presque la totalité de mes patrons, déjà près au cas où, se trouvaient dans mon ordinateur. Détruit, je le rappelle. Fais chier ! Mon humeur de chien revient au galop alors que je rentre en trombe dans mon bureau en claquant la porte, faisant sursauter les quelques personnes dans le couloir. Maudit stagiaire de mes... ! 

***

Bonne nouvelle pour notre Tae ! Moins bonne pour Jungkook...

Le confinement continue, bon courage... T^T

A dimanche !