Chapitre II

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Plusieurs jours après mon arrivée, je reçois un appel d'un numéro masqué. Je ne décroche pas mais il rappelle. Je ne réponds toujours pas mais au bout du sixième appel, je décroche, agacée par cette personne très insistante.
  Il m'explique qu'il fait partie d'un soi-disant groupe d'agents secrets et qu'ils veulent recruter des jeunes pour moderniser leur personnel. Je lui demande pourquoi ils m'ont choisie moi en particulier, ce à quoi il répond qu'étant inscrite à Oxford et ayant d'excellents résultats, je suis la candidate idéale patati, patata... Il me demande de venir les voir et de leur donner ma réponse au sujet de mon engagement dans leur société secrète au plus vite. Je lui dis que je veux encore réfléchir un peu et je raccroche. Un sentiment d'excitation mêlé d'une touche d'anxiété se dégage en moi après cet échange. Immédiatement, je téléphone à Emma pour lui dire ce qui vient de m'arriver.
  – Allô ? C'est Emma Lord à l'appareil.
  – Salut Emma, c'est Alice.
  – Salut Alice, c'est pour quoi ?
  – Un truc très important, tais-toi et écoute-moi. Tunevajamaismecroiremaisilyaquelq'unquivientdem'appelerapparemmentiltravailledansunesociétésecrèteetilvientdemedemandersijevoulaisentrerdansleurgroupe !!!
  Je suis à bout de souffle mais je pourrai continuer comme ça jusqu'au lendemain matin tellement je suis excitée.
  – Ok, ok... me dit Emma. J'ai rien compris.
  – Ok, je répète, ilyaquelqu'unquivientdem'appelerapparemmentiltrav...
  – On va y aller plus lentement, ok ? me coupe Emma
  – Euh...oui...
  – Alors que s'est-il passé de si important ? DOU-CE-MENT ok ?
  – Fouuuu... Bon alors c'est quelqu'un qui vient de m'appeler, apparemment il travaille dans une société secr...
  DRING DRING !!!!!!!!!!
  – C'est qui ? me demande Emma visiblement troublée par la sonnerie.
  – Le téléphone. Attends, raccroche pas. Allô, c'est qui ?
  – Tu Sais Qui. Alors pour la réponse ?
  Je cache le micro pour que la personne ne m'entende pas.
  – Alors tu vois de quoi je parle ?
  – Euh... oui, je pense. Mais c'est super flippant !
  – Carrément d'accord. Bon du coup, je fais quoi ?
  – Tu acceptes.
  – Mais t'es folle ?!
  – Pas du tout.
  – Bon, alors j'accepte.
  Je pèse le pour et le contre et me dis qu'un peu d'aventure serait la bienvenue dans ma vie, bien que tout cela puisse être une énorme plaisanterie. Je découvre le micro et parle à l'inconnu.
  – J'accepte, lui dis-je.
  – Très bien. Rendez-vous dans deux jours dans la rue à côté de la Grand-Place à minuit tapante.
  Il raccroche.
  – Bon alors tu as rendez-vous dans deux jours dans la rue à côté de la Grand-Place à minuit tapante, répète Emma.
  – Merci pour les conseils. Salut.
  – Salut.
  C'est ainsi que se termine notre conversation.
Je m'ennuie tellement ! Le temps me paraît long, mais au moins, il passe.
  On arrive bientôt au jour du rendez-vous et je me rends au lieu de rencontre. Je suis assez stressée, et j'ai laissé mon téléphone sur haut-parleur pour qu'Emma puisse écouter ce qui se passe. Je n'ai croisé personne, pas même un chat. Au bout de la rue, un homme en noir m'attend les mains dans les poches.
  Un chapeau cache ses yeux et une lumière blafarde éclaire faiblement la ruelle. Elle est bordée de vieilles maisons un peu penchées et les pavés au sol sont irréguliers. De petites flaques, vestiges de l'averse de d'aujourd'hui, reflètent les points lumineux des lampadaires délabrés. Ça a tout d'un film d'horreur au moment où le héros va se faire attaquer par une bande de monstres. Pas très rassurant...
  Lorsque l'homme qui se tient en face de moi prend la parole :
  – Alors te voilà Alice...
  – Euh... oui, c'est moi, je réponds timidement.
  – Tu sais pourquoi tu es là ?
  – Pour entrer dans votre société secrète ?
  – En partie, oui. As-tu remarqué des choses bizarres chez tes parents depuis quelque temps ?
  – Peut-être bien que oui...
  – Ah, je vois. Comme tu fais désormais partie de notre agence, je vais te dire la vérité sur tes parents. Ils font en réalité partie d...
  Mes parents apparaissent et l'homme part en courant.
  – Alice !!! crie ma mère.
  – Que fais-tu ici et à cette heure ? Nous avons cru que tu avais été enlevée ! m'incendia mon père.
  – Je...euh... J'ai entendu un bruit alors je suis descendue pour regarder ce qui se passait.
  – Et à qui parlais-tu, il y a deux minutes ? me demande ma mère sceptique.
  – À moi-même, pour me rassurer qu'il n'y avait personne, dis-je gagnant de l'assurance.
  – Très bien. Rentrons à la maison, tu veux. Ce n'est pas une heure pour rester dehors. Il ne faudrait pas que tu tombes malade.
  Sur ses lèvres se peint un sourire qu'elle veut sûrement protecteur mais qui fait plus peur qu'autre chose. 
  Je garde mon téléphone en lien avec celui d'Emma pour lui répondre une fois que je serai seule dans ma chambre.
  En rentrant à la maison, je repense aux paroles de l'homme en noir. Et plus j'y pense, plus je frissonne à l'idée que les inventions d'Emma peuvent se révéler exactes, avec quelques détails modifiés, comme par exemple  l'identité de  leur employeur. Elle me pose un tas de questions, sans que pourtant, je ne puisse lui répondre. Mais ça ne la dérange apparemment pas.
  Après avoir raccroché, je m'allonge dans mon lit, et ferme les yeux pour laisser place aux nombreux cauchemars qui vont envahir ma nuit.

***
Mes parents sont tout en noir et cambriolent une banque puis, ils repartent avec le butin dans leurs bras. Le sourire aux lèvres, fiers de leur larcin.
***

  Je me réveille en sueur dans mon lit, après m'être rendue compte que ce n'était qu'un cauchemar. Les premiers mots qui me viennent à l'esprit sont : voleurs, nuit, sombre, secret, rendez-vous, mensonges et peur. Très rassurantes comme pensées... Heureusement les vacances touchent à leur fin. Je vais enfin retrouver Emma et on pourra discuter de tout ça tranquillement dans nos lits.
  Chaque jour depuis plusieurs années, je questionne mes parents sur ce qu'ils font la journée et j'obtiens toujours la même réponse insatisfaisante : « Nous travaillons dans des bureaux pour le gouvernement, nous te l'avons déjà dit cent fois ! » Alors, à chaque fois je me résigne à attendre le lendemain pour leur poser une autre question, à laquelle ils me répondront tout aussi vaguement.

  Dernière journée avant la fin des vacances ! Je commence à faire mes valises pour le lendemain, quand mon téléphone sonne... J'hésite avant de décrocher, puis, après une rude bataille avec moi-même, je finis par le faire.
  – Allô ? C'est Alice Helens à l'appareil.
  – Tu te souviens sûrement de moi. Je n'avais pas pu terminer ma phrase l'autre jour, alors je te propose de me voir dans la neuvième cabine, demain dans le train.
  – Je... euh... oui, d'accord.
  Mais l'homme avait déjà raccroché. Comment sait-il que je vais dans un pensionnat d'Oxford et que j'habite près de la grand- place à Canterbury ? Je ne me souviens pas de lui avoir dit tout ça... Bonnes questions que je garde pour la rencontre du lendemain.
  Je m'empresse de téléphoner à Emma pour lui raconter les derniers jours que j'ai vécus.
  – Tu as de la chance toi, au moins il se passe quelque chose chez toi ! Chez moi c'est le calme absolu, à part bien sûr Zachary et Nick qui hurlent à longueur de journée... se plaint Emma
  – Tu crois que c'est mieux de se faire pister par quelqu'un que tu ne connais pas ?
  – Non... enfin, je ne crois pas...
  – Bon, à demain.
  – À demain.
  La journée passe plus vite que je ne l'aurais cru. Mon départ approche. Je charge mes affaires dans le coffre et me tasse à l'arrière de la voiture avec mon voisin, que mes parents ont décidé de conduire avec  nous, car oui, mes parents sont amis avec les voisins, contre toute attente.

  Quand nous arrivons enfin à la gare, je sors fissa de la voiture et pars en direction du train, quand je sens quelque chose m'effleurer l'épaule, je me retourne et faillis tomber dans les pommes.
  – Pourquoi tu t'en vas Alice, mes parents m'ont inscrit à Oxford. C'est cool, non ? Comme ça on pourra rester ensemble à la récrée, tu ne seras plus seule !
SOS !!! Aidez-moi mon voisin est inscrit dans le même pensionnat que moi !!!!
   – Parce que tu crois que je suis seule à la récrée ??? Moi ???!!! Déjà, si on est condamnés à faire le reste de nos études dans le même pensionnat, règle n°1 : tu ne m'approches pas à moins de deux mètres, règle n°2 : tu ne m'adresses pas la parole et règle n°3 : disparais !

  Je pars en colère contre lui, ses parents, mes parents et le pensionnat qui l'a accepté. Mes jours paisibles avec Emma où nous étions seulement toutes les deux et où il n'y avait personne pour nous embêter sont finis.
  – Mais Alice, attends-moi !!! crie-t-il, mais je suis déjà loin.

Les Enquêtes d'Alice | Tome 1 Débuts à Londres Où les histoires vivent. Découvrez maintenant