Transformation

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Après avoir donné les premières directives pour la reconstruction du royaume, et la punition des traîtres, je me trouvais dans l'immense salon du Palais à soigner mes alliés, en l'occurrence Matt qui hurlais à chaque fois que j'effleurais une plume de ses ailes. Dylan était étendu sur un des nombreux canapés de la pièce et Hadès avait fait revenir Jay qui était toujours dans une sorte d'état comateux.

- Maintenant que tu es redevenue la maîtresse des lieux, qui conquiert le monde des humains ? réfléchit Dylan.

- Raphaël je suppose. Il avait réussi à manipuler deux de mes plus fidèles bras-droits, il n'a donc aucun mal à persuader une armée entière, répondis-je.

- Les Démons avaient déjà envahis Paris et l'Angleterre quand nous y étions.

Ils m'expliquèrent alors ce qu'ils avaient endurés à Paris et aux mains de leurs geôliers.

- Il faut à tout prix arrêter Raphaël, conclus-je, la situation se dégrade.

- Mais il faut d'abord que l'on puisse tenir debout, gémit Matt.

Je me focalisai sur ses ailes et quelques chose m'inquiéta très rapidement en les examinant. Elles se craquelaient comme de la terre séchée. J'effleurai une plume craquelée et Matt émit un gémissement. Un morceau était resté dans ma main.

- Tes ailes se craquellent Matt, j'ai bien peur que tu ne deviennes un Déchu, dis-je.

Je le vis écarquiller les yeux mais il ne fit rien d'autre que regarder son camarade. Dylan s'était relevé après ma déclaration et se dirigea vers moi comme pour vérifier mes dires.

- Je ne mens jamais, crachais-je agacée qu'il ne me fasse pas confiance.

- Je le sais, mais je veux constater les dégâts.

Je le laissai effleurer aussi les ailes de Matt qui encore une fois gémit de douleur. Son visage pâle était fatigué et des cernes entouraient ses yeux bleus sombre. Attendez...Sombres ?

- C'est pas bon signe ça, fis-je en prenant brusquement le visage de l'Angelot entre mes mains.

- Quoi ? Qu'est-ce...

- Tais-toi et arrête de bouger, (je me penchai plus proche de son regard) Ouvre grand les yeux.

Matt s'exécuta sans discuter et j'analysai chaque parcelle de ses iris. La moitié devenait noire, on aurait pu avoir l'impression que ses pupilles s'agrandissaient. Mais ce n'était pas le cas.

- Il a absorbé beaucoup trop d'énergie démoniaque, ses iris s'assombrissent rapidement, constatais-je en lâchant le visage de Matt.

- Ce qui veut dire ? Demandèrent les deux Angelots en haussant un sourcil.

- Ce qui veut dire, répondis-je en roulant les yeux au ciel, qu'il ne va pas tarder à se « changer » pour devenir un Déchu.

- Quoi ?! s'exclamèrent-ils en coeur.

- Dans combien de temps ? Demanda timidement Matt.

- Je dirais une dizaine de minutes tout au plus, ses iris ne sont pas loin d'être complètement obscurs.

- Et c'est quoi, la transformation ?

- Je ne veux pas te faire peur mais ça va être très douloureux, a ce qu'on m'en dit, répondis-je franchement (Dylan me regarda avec des yeux ronds comme des soucoupes) Ben quoi ? Je ne mens jamais.

Un toussotement dans notre dos nous stoppa dans notre discussion. Je me tournai pour faire face à Hadès qui m'intima de le suivre dans les couloirs du palais.

- C'est important ? Parce qu'on va devoir gérer une transformation assez précoce d'un futur Déchu.

- L'humain s'est réveillé.

Abasourdie, je m'arrêtai de marcher. Hadès soupira et se tourna vers moi en passant sa main sur son visage, l'air fatigué.

- Il va bien, m'informa-t-il sans que je ne le demande.

J'étais inquiète quant à son état, mais je ne voulais pas le témoigner. Je ne voulais même pas me l'avouer, pourtant j'en étais bien consciente. Je me mordis la lèvre en réfléchissant quand un hurlement résonna dans tout le palais.

- La transformation a commencé on dirait, lançais-je ravie que ça me change les idées.

Hadès et moi coururent pour faire demi-tour vers le salon, et directement, la pièce était remplie d'ondes démoniaques. Dylan était accroupi à même le sol en gémissant de douleur. J'ordonnai à Hadès de le faire évacuer au plus vite avant que ce ne soit à son tour d'être un Déchu. Lorsque mon regard croisa celui de Matt, il n'y avait plus aucune once de bleu et ses yeux étaient entièrement noirs. Je l'observai se lever sans gémir une seule fois, une première depuis qu'il était entré dans cette pièce, puis j'aperçus que son aile droite, la plus endommagée, ne craquelait plus mais se pliait et se tordait dans tous les sens. Soudain, elle se détacha et s'écrasa au sol comme de la porcelaine en s'éparpillant en petits morceaux qui disparurent en fumée. Je le vis grimacer en coin avant de faire apparaître dans sa main une lance obscure, similaire à son arme céleste je suppose, mais qui a l'air bien plus dangereuse. Sans surprise, il m'attaqua, mais j'esquivai sans soucis, attrapai rapidement le manche de l'arme d'une main en emprisonnant son cou dans l'autre. Je fixai son regard submergé de pouvoir démoniaque en chuchotant des paroles qui pourraient le calmer.

- Matt, ne te laisse pas submerger (il grogna mais je resserrai mon emprise) Je sais que c'est difficile mais contiens-toi. Allez, refais surface, Matt, je sais que tu m'entends.

Mais pour seule réponse, je le sentis m'attraper la taille de sa main gauche et me propulser contre le mur. Mon dos cogna violemment contre le béton et le fissura quelque peu. Avec un grognement, je me relevai en m'époussetant les habits, puis focalisai mon attention sur un Déchu incontrôlable. Par moi-même, heureusement que j'étais redevenue immortelle ! Je le regardai tenir un peu plus fermement sa lance, pointée vers moi.

- Matt, écoute-moi, je n'ai pas envie de te blesser ou de te tuer.

Oui je venais vraiment de dire ça, et le pire, c'était que je le pensais. Et pourtant ma déclaration si sincère, qu'il n'avait d'ailleurs pas l'air d'avoir entendu, il me fonça dessus tel un taureau énervé. Je soupirai. Mais comme dit le proverbe, il faut le prendre par les cornes.

J'esquivai son coup avec aisance, me retrouvant dans son dos puis lui attrapai les cheveux afin de le cambrer en arrière. D'un coup sec, je lui frappai les genoux, il perdit son équilibre et son dos heurta le sol. Rapidement, je lui bloquai les bras à l'aide de mes genoux en me mettant à califourchon sur lui, lui arracha son arme avant de l'envoyer valdinguer à l'autre bout de la pièce et lui enserrai le cou de mes deux mains. Il se retrouva bloqué et je le maintenais assez calme en exerçant une pression sur son cou. Les Anges Déchus étaient très faibles dans cette zone-là et étant très friande des prises d'étranglement, j'avais un avantage non négligeable ce qui me permettait d'asseoir mon autorité très facilement. Mais le problème était qu'il n'arrivait toujours pas à se canaliser malgré la pression que j'exerçais sur sa trachée. 


La Mort   --tome 2--Où les histoires vivent. Découvrez maintenant