L'averse s'était un peu calmée, mais une pluie fine m'a quand même accompagné jusqu'à chez moi. Il y avait des ailes à mes chaussures, crées par les paroles d'Ariane. J'avais juste cinq heures à tuer avant d'aller la voir. Cependant, quand je suis rentré, j'ai serré les poings.
Mes parents avaient acheté une nouvelle télé.
Ca faisait même pas vingt-quatre heure qu'elle avait disparue. Et elle était déjà revenue. Ma mère était déjà scotchée devant, mon père devait surement travailler encore. J'ai pris sur moi, et je suis allé dire bonjour à ma mère.
-Maman, ça va?
-Pas trop, a t-elle répondu en tournant la tête vers moi en forçant un sourire.
J'ai vu qu'elle n'avait pas dormi de la nuit. Je me suis assis dans le fauteuil à coté d'elle. On avait deux fauteuils et un canapé, que je trouvais extrêmement inconfortable, mais c'était un cadeau des mes grands-parents, alors on ne pouvait pas s'en séparer selon ma mère. Elle m'a retourné la question.
-Et toi? Comment tu te sens?
-Hmm... Chamboulé. Et un peu paniqué, parce qu'ils m'ont pris mon portfolio. Ce qui fait que je n'ai rien à présenter pour mon oral de lundi.
-Oh! Mais... est ce qu'on ne peut pas appeler l'école pour leur expliquer, et obtenir un délai supplémentaire? Combien de temps est ce qu'il te faudrait pour en refaire un?
-En refaire un? Aucune idée... C'est juste que je me sens complètement découragé. Tout s'est un peu écroulé, là.
-Tu peux toujours essayer, quand même! En faire un ou deux, discuter avec le jury, montrer ta motivation... Dis nous de quoi tu as besoin!
J'ai réfléchi, voulant aller dans son sens. Je me suis dis, peut être qu'elle avait raison. Qu'il falalit que j'arrete de me morfondre. J'ai discuté encore un peu avec elle, et je suis remonté dans ma chambre. J'ai rassemblé tout ce que j'avais encore, et j'ai réussi à trouver une feuille et un crayon. Et j'ai commencé à esquisser.
J'ai du y rester longtemps, car je n'ai pas entendu mon père rentrer et j'ai rejoint mes parents à table. Mon père semblait épuisé lui aussi, et il était ernervé.
-Tu as vu, ce qu'il s'est passé aujourd'hui? Il y a eu un attentat, je crois...
J'ai regardé la télé, et en effet, un fou furieux avait poignardé plusieurs personnes à Paris. Cela faisait plusieurs fois en quelques mois. C'était... dramatique. Et pesant. Surtout quand ils ont se sont mis à diffuser des images, sans aucune pudeur ni honte. Mais j'ai mangé mon repas en silence puis j'ai quitté la pièce quand ils ont commencé à interviewer en direct un homme à coté du cadavre de sa femme. J'aurais voulu appeler les cambrioleurs pour qu'ils nous la reprennent encore.Je suis monté dans ma chambre, en pensant à ce soir. J'irais au restaurant vers vingt-deux heures, après manger. Je me demandais ce qu'elle avait à me dire. Avait-elle vraiment des infos à propos du cambriolage? Pourquoi avait-elle fait l'effort de rechercher ça?
Je me suis assis dans ma chambre, qui en fait... ne ressemblait plus à trop à ma chambre. Enfin, elle ne me procurait plus ce sentiment de sécurité et de confort. N'importe qui pouvait rentrer à l'improviste, maintenant. Je comprenais pourquoi certaines personnes décidaient de déménager après s'être fait cambrioler. Ma mère avait pris le temps de tout ranger, y compris ma chambre, et ça m'a touché. Je me suis rendu compte qu'elle devait surement beaucoup stresser et j'ai décidé de remettre les considérations personnelles pour plus tard, pour aller lui apporter du soutien. Je suis redescendu, pour rester avec elle jusqu'à vingt et une heure trente.Quand je suis sorti pour rejoindre Ariane, il faisait déjà nuit. J'ai mis un bon quart d'heure à rejoindre le resto, où quelques personnes dînaient encore en silence. J'ai souri en repassant devant le club d'aviron et à la petite folie dans laquelle elle m'avait entraîné l'autre soir. Je me suis assis à une table, et je l'ai regardé servir un couple dans la quarantaine, trois tables plus loin. Elle avait coiffé ses cheveux en un chignon, mais après ces trois heures de travail, ça s'était un peu défait, et une mèche rebelle lui pendait devant le visage. C'était un endroit un peu chic, et elle portait une chemisier blanc avec un pantalon noir. Elle a tourné la tête, et m'a apercu, ce qui lui a redonné un peu de joie. Elle s'est approchée l'air de rien.
-Que puis-je vous servir, monsieur?
-Mhh, je ne sais pas madame, est ce que vous servez des milkshakes à la banane dans votre prestigieux établissement?
-Et bien, ce n'est normalement plus l'heure, mais face à votre demande si particulière, je vais vous accorder cette faveur, a t'elle dit en prenant un air faussement contrarié, avec les sourcils froncés et un sourire caché.
Et elle est partie. J'ai regardé les quelques personnes autour qui finissaient de manger, et le fleuve sombre éclairé par quelques lampadaires. Il faisait doux. Le vent portait un léger parfum sucré.Ariane est revenue cinq minutes plus tard, avec deux grands verres à la main. Elles les a posés sur la table en disant :
-Le chef a dit que je pouvais partir plus tôt ce soir, je vais me changer et je reviens!
J'ai pas osé entamer mon milkshake, et je l'ai regardé récolter l'addition des derniers clients, disparaître dans la salle, et revenir dix minutes plus tard en débardeur-veste marine. Elle s'est assise à coté de moi, et a défait ses cheveux en secouant la tête.
-Pfiou, j'en peux plus. Ca devient fatiguant, à la longue.
-Tu travailles tous les soirs?
-Cinq jours par semaine, oui. Ca prend beaucoup de temps mais je gagne pas mal d'argent. J'ai pu mettre un petit pactole de coté depuis plus d'un an maintenant. Ca sera déjà une preuve de bonne fois si je veux faire un emprunt...
J'ai commencé à siroter mon milkshake.
-Du coup, tu voulais me voir pour des infos?
-Oui! Alors, hmm, et bien, je sais où est ta pochette!
J'ai soufflé très fort dans ma paille et je me suis éclaboussé. Je l'ai regardé avec de grands yeux ébahis.
-Pardon?
-Alors, laisse moi t'expliquer. En gros, ce matin, j'ai parlé rapidement à un pote à moi, qui travaille chez le garagiste du coin. Et il m'a dit que la police leur avait effectivement transmis un signalement, que des voisins avaient aperçu une camionnette devant chez toi au moment du cambriolage. Une camionnette rouge, avec un dessin chelou dessus. Enfin, c'est plutôt on patron qui lui a demandé, parce que c'est une information classifiée, mais j'ai vite fait le rapprochement. Et là, vers midi, il me dit, viens voir, j'ai un truc à te montrer! Et du coup, je l'ai rejoint, et là, il m'a donné un papier qu'il avait imprimé d'un mail de son patron. Il avait pas le droit de me le montrer normalement, c'est pour ça. Et regarde!
Elle a sorti deux feuilles de son sac, et me les as tendues. C'était une capture d'écran, d'un mail, avec deux photos, d'une camionnette rouge sous deux angles. On y voyait effectivement un horrible dessin d'un espèce de tank sur le flanc, et on devinait que la camionnette était dans un garage. On pouvait lire : Hey salut Frank, j'ai repensé à notre conversation de ce matin, et ca m'a fait tilter parce que ce matin, une camionette comme tu disais est arrivée, ils m'ont demandé de refaire la peinture en blanc! Je te mets les photos en pièce jointe
Mais mon coeur s'est arrêté quand sur la deuxième photo, on voyait l'intérieur du coffre qui était ouvert derrière, et, contre le métal, ma pochette de dessin qui gisait.
-C'est...
-Oui! jubilait Ariane. J'en étais pas sûre, mais c'est ta pochette!
-Ou est ce garage?
-C'est un problème. A la Rochelle, à cinq cent kilomètres d'ici. Mais t'en fais pas, on va aller la chercher demain.
![](https://img.wattpad.com/cover/216561178-288-k794656.jpg)
VOUS LISEZ
Le monde peut bien brûler
Teen FictionEn une soirée, la vie de Paul s'écroule. Il perd son avenir, la fille qu'il aime, et tout son argent. Alors qu'il est au plus bas, il rencontre Ariane, avec qui il part à la recherche dangereuse de ceux qui lui ont tout volé. Quitte à tout risquer...