Le fiancé arrive

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Après le départ de Matthieu, je n'avais plus qu'une envie : me coucher en chien de fusil et ne plus jamais sortir de mon lit. Malheureusement, ce n'était pas possible. 

Je passai une nuit blanche à pleurer toutes les larmes de mon corps, comme une petite chose misérable. Cependant, au réveil je décidai de recouvrir mon coeur de plusieurs carapaces impénétrables. 

J'allais me blinder, ne laisser plus rien m'atteindre, surtout en présence d'un public. Je ne pouvais rien laisser paraître, c'était une question de survie. Même si j'avais l'impression que l'on m'avait arraché le coeur, qu'il avait été pulvérisé puis replacé à l'intérieur de moi, je devais rester impassible.

Quand je me sentis enfin prête à affronter le monde, je sortis de ma chambre. Ethan et Ilian se trouvaient devant. Quand je passai devant lui, le premier posa discrètement la main sur mon bras et me murmura :

– C'est un abruti.

J'eus un petit sourire triste pour lui faire plaisir, car il était vraiment adorable, mais ce sourire n'atteignit jamais mes yeux. Le reste de la journée passa ensuite dans une sorte de brume, j'avais l'impression de ne rien ressentir, d'être complètement déconnectée.

Amélia essaya bien sûr de me tirer les vers du nez, mais je n'étais pas prête à en parler. 

C'était trop tôt.

La semaine s'enchaîna ainsi : les ternes journées où je devais donner le change, préparer le retour de mes parents avec « enthousiasme », et les nuits déchirantes que je passais à pleurer ainsi qu'à ressasser.

Finalement arriva le retour du roi Maximilien François Stillwell et de la reine Kenna Stillwell, accompagnés de mon soi-disant fiancé. 

Hourra.

Je me préparai malgré tout avec soin, car nos chères retrouvailles allaient se réaliser en direct sur de nombreuses chaînes de télévision, nationales et européennes.

Lucky me.

Le tapis rouge avait été installé sur le tarmac de l'aéroport. Une espèce de petite estrade avait été montée, et les journalistes se tenaient de l'autre côté.

Je m'y rendis accompagnée de Lorenzo et Julian. Ce dernier me lança un long regard pénétrant. Il devait me détester d'avoir fait fuir son meilleur ami.

Désolée coco, mais c'est lui qui me fuit, en fait...

J'arrivai juste à temps pour voir le petit avion atterrir, provocant des murmures surexcités de la part des journalistes.

Pourquoi je me sentais aussi nerveuse ? Jusqu'à ce matin j'étais pourtant extrêmement remontée contre mes parents. Malgré cela, je me tenais maintenant, les jambes tremblantes et les mains moites, le cœur battant à toute vitesse.

Impatience, inquiétude, colère et excitation dansaient ensemble un ballet fougueux dans mon estomac, ce qui ne m'aidait pas du tout à me calmer.

La porte de l'avion s'ouvrit, et l'on avança les marches. Un homme, inconnu au bataillon, en sortit. Il devait être un de leurs gardes personnels, supposai-je.

Aïe. Pourquoi mon coeur traître se serrait toujours à ce mot ? Garde.

Ensuite en sortit une grande blonde longiligne, habillée avec soin, la Reine Kenna - ma mère.

La suivant de près, un homme brun de haute taille, qui devait avoir, même si je ne pouvais le voir d'ici, derrière ses lunettes de vue argentées, les mêmes yeux gris que moi. 

Myssandra : le retour d'une future reineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant