Chapitre 5 - Raz-de-marée

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Hélas, lorsque Jesse se réveilla le lendemain matin, il comprit que la journée serait différente des précédentes, et pas en bien. Le grondement du vent s'était amplifié, tout comme celui de l'océan et il ne fut pas surpris de découvrir en ouvrant ses volets que la tempête qui couvait depuis plusieurs jours avait éclaté. Avec une grimace, il se détourna du mauvais temps qui courbait les palmiers du jardin et s'habilla rapidement avant de descendre rejoindre ses parents dans la cuisine.

Il fut surpris de les découvrir déjà prêts à partir, plantés dans l'entrée devant le téléphone de sa mère qu'elle tenait de manière à ce qu'ils puissent regarder l'écran ensemble. En l'entendant descendre, ils se tournèrent vers lui et sourirent.

- Sale temps, hein ? releva son père. Encore pire que la semaine dernière.

- Vous partez déjà ?

- La météo annonce que la tempête va s'aggraver dans la matinée, expliqua sa mère en rangeant son téléphone. On préfère partir plus tôt pour éviter les vents violents. Je vais passer par les terres plutôt que me risquer sur la Great Ocean Road pour aller travailler.

Un peu hébété, Jesse hocha la tête et les regarda achever de se préparer. Sans trop savoir quoi faire, il les suivit dans la cuisine et les salua alors qu'ils ouvraient la porte qui donnait sur l'escalier descendant au garage.

- Tu vas devoir rester à la maison pour la journée, j'en ai peur, grimaça son père. Profites en pour appeler Lewis ou tes cousins... Si tu pouvais vérifier que toutes les fenêtres sont bien fermées, ce serait super.

- Je suis désolée que tu ne puisses pas aller sur la plage, mais avec ces vagues c'est bien trop dangereux. Avec un peu de chance, ça se calmera d'ici la fin de la journée.

Sans trop savoir quoi répondre, il se contenta de les regarder descendre l'escalier de béton puis il se détourna pour préparer son petit déjeuner tout en écoutant distraitement le moteur de leurs voitures qui s'éloignaient. Il était déçu de ne pas pouvoir rejoindre Eliakim mais étant donné de ce qu'il voyait par la fenêtre, les palmiers qui se tordaient sous le vent et la pluie qui menaçait, c'était sans doute mieux comme ça. Son petit déjeuner à la main, il s'installa dans le canapé et alluma la télé pour le bruit de fond. Il tomba sur les prédictions météo et les écouta d'une oreille tout en grignotant sans véritable appétit.

- ...des courants très forts, provoqués par les vents... nage fortement déconseillée...

Brusquement, il releva la tête en se rappelant ce qu'Eliakim lui avait dit au sujet de sa caudale blessée. Il ne pouvait pas nager contre les courants et il était piégé près de la plage, incapable de franchir la barre des vagues. Abandonnant son petit déjeuner à moitié mangé, Jesse se précipita devant la baie vitrée pour regarder l'océan. Il faisait sombre et gris dehors, les arbres étaient violemment secoués en tous sens par le vent et, en contrebas, des vagues grises se précipitaient sur la plage et les rochers dans de grandes gerbes d'écumes. Le grondement de l'océan en colère était tonitruant et Jesse pâlit en se souvenant que sa mère avait dit que cela empirerait dans la matinée.

L'angoisse le prit au ventre lorsqu'il songea à Eliakim, épuisé et blessé, prisonnier d'une nouvelle tempête dont il n'avait aucun moyen de s'échapper. Une nouvelle tempête qui, selon son père, était pire encore que la précédente qui l'avait si grièvement blessé.

- Par tous les dieux ! jura-t-il en donnant un coup de poing sur la vitre. Courage Eliakim, j'arrive !

Poussé par l'urgence, il se précipita dans l'escalier du garage et sortit par la petite porte, droit dans l'enfer qui se déchaînait à l'extérieur. Le vent le fit trébucher en avant et il claqua la porte derrière lui en se mettant à courir sur le sol rendu glissant par la pluie et les embruns qui s'y mêlaient. Il ne savait pas ce qu'il pourrait faire, mais il était hors de question qu'il laisse Eliakim affronter seul la furie des éléments. L'eau infiltrait ses chaussures, rendant sa course encore plus hasardeuse mais il ne ralentit pas et traversa la route en trois enjambées pour dévaler ensuite le petit escalier en béton qui menait à la plage.

Une Romance de VacancesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant