8. Appel

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        Rita se laissa mollement tomber sur son lit. La douche chaude qu'elle venait de prendre n'avait pas suffit à la détendre. Elle enfila une autre chemise qu'elle avait emprunté au capitaine et partit se lover dans ses draps, cherchant du réconfort. Elle n'arrivait pas à apaiser l'angoisse qui étreignait son coeur. Et si tout ce qu'elle faisait n'était qu'une erreur ? Des images de ses étreintes avec l'épéiste lui revinrent en mémoire, sa chaleur, son regard, son départ... Ses yeux lui piquèrent et elle ferma fort ses paupières. La rousse se cramponna un peu plus aux draps et enfouit son visage dans le coussin. L'alcool lui faisait tourner la tête. Pendant plusieurs minutes elle se concentra sur sa respiration, inspirant profondément pour se calmer.

        Elle ne voyait rien. L'obscurité omniprésente de la pièce était étouffante, Rita sentait une peur inexplicable lui broyer les entrailles. Elle se releva brusquement cherchant à s'échapper des draps mais ils se collèrent un peu plus à sa peau. Plus elle tirait sur le tissu et plus ce dernier semblait s'emmêler autour de son corps. Elle se sentait prise au piège. Sa respiration s'accéléra. Soudain, une main lui saisit la jambe ! Par réflexe elle donna un coup de pied mais elle heurta le vide. Une autre poigne l'attrapa et elle se débattu encore plus violemment. Elle sentait des mains parcourir son corps. Des mains rugueuses, sales, des mains qui lui voulaient de mal...

         Rita se réveilla en sursaut, étouffant un cri d'effroi. Elle était en nage, le coeur battant, nauséeuse. Elle jeta un regard vers le hublot, il faisait encore nuit. Elle passa ses mains sur son visage pour essuyer la sueur de son front. Elle avait chaud et froid en même temps, elle avait l'impression d'étouffer entre ces quatre murs. Elle s'extirpa des draps humides et, dans l'obscurité, elle se rendit sur le pont. Ses mains tremblaient. Ses pas la menèrent sur la dunette arrière, elle marcha entre les palmiers avant de s'accouder au bastingage. La pluie avait cessé de tomber, le vent lui fouettait le visage et ses cheveux semblaient encore plus fou que d'habitude. Elle inspira une grande bouffée d'air en observant les vagues se fracasser contre la coque du navire.

         Ce n'était qu'un cauchemars, rien de plus. Elle se répétait cette phrase en boucle, espérant oublier l'horrible sensation qui avait secoué son corps. Elle passa nerveusement ses doigts dans sa chevelure. Elle avait encore l'impression de sentir les mains grimper le long de ses jambes, elle les remua comme pour se convaincre que ce n'était que le fruit de son imagination. Elle soupira et laissa tomber sa tête en arrière, levant les yeux vers le ciel. Mihawk lui manquait terriblement. A l'instant même où cette pensée traversa son esprit elle sentit son coeur se serrer. Les doutes qu'elle avait eu tant de mal à chasser avant de s'endormir revinrent au triple galop. Les paroles de Rockstar résonnèrent : "une femme dans chaque port"... Et si c'était vrai ? Le corsaire était particulièrement séduisant, il était évidement que de nombreuses femmes avaient du tenter de le mettre dans leur lit. Et peut-être qu'il avait succombé... "Quand tu passes plusieurs mois sur un bateau, je peux te dire qu'après t'as qu'une envie : retrouver la chaleur d'une femme." Peut-être n'avait-elle été qu'une passade pour lui, un moyen de combler le vide... Après tout, qu'est ce qui lui disait que le corsaire voudrait encore d'elle ? Il lui avait promis de revenir mais jamais il n'avait parlé du fait que Rita le rejoingne, dans de tels circonstances qui plus est ! La jeune femme se mordit la lèvre inférieur pour s'empêcher de pleurer. Elle se sentait perdue.

***

         Shanks tangua dangereusement quand il sortit de la cuisine et se rattrapa in-extremis à la chambranle de la porte. Après un hoquet d'ivresse, il se redressa et fit quelques pas chaloupant sur le pont. Il était tard et tout le monde était parti se coucher. Il n'avait pas mis longtemps à convaincre Ben de le laisser monter la garde ce soir là, le pauvre navigateur était exténué et tous les cafés du monde n'auraient pas été assez fort pour le faire tenir une nuit de plus. Arrivé au pied du grand mat le roux souffla d'agacement, regrettant presque d'avoir autant bu quand il vit les filets d'escalade se dédoubler devant ses yeux. Après quelques secondes de flottement, il grimpa jusqu'au nid-de-pie. Avec un bras en moins ce n'était pas une mince affaire, même s'il y était habitué depuis le temps. Les cordes étaient humides et il manqua de glisser une paire de fois. Quand il arriva au bout de sa peine, il se laissa lourdement tomber sur le planché de la vigie. La pluie s'était calmée mais une bruine légère persistait et, perché si haut, le vent se faisait d'autant plus ressentir. Il attrapa une vieille couverture qui trainait là et s'y enroula dedans. Il porta son regard vers l'horizon, la nuit allait être longue.

Une femme - TOME 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant