Chapitre 1

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Guylt se sentait troublé, assis près de sa bien-aimée, dont le visage était posé sur son épaule et dont les doigts fins et chauds s'étaient entrelacés aux siens.

Était-ce un rêve ? Était-il vraiment aux côtés de Vira, dans cette ruelle, les pieds dans le vide, non loin de cet énorme pilier du monde, dans ce monde si singulier ? Parfois, il se demandait si tout cela n'était pas issu de l'imagination de quelqu'un. Une chose était sûre au sein de ce songe : l'ange à ses côtés était la femme de sa vie.

— Guylt ? À quoi tu penses ?

— À toi, mon amour.

Il sentit Vira rougir de plaisir. Si Guylt avait retenu quelque chose de tout ce temps à l'admirer en secret, c'est qu'elle appréciait être flattée et qu'on lui témoigne de l'affection, alors il lui susurrait toujours des mots doux à l'oreille depuis qu'elle s'était découverte des sentiments pour lui. Ce jour-ci, l'amoureux ne l'oublierait jamais.

Quelques mois auparavant, Guylt s'évertuait de poursuivre ses efforts en tant qu'élève à l'école Arquebuse. Une chose le motivait : voir le doux visage de Vira tous les matins, resplendissante, joyeuse, pleine de jeunesse et d'entrain. Il la voyait assise au bureau des élèves à rire avec ses amies, étudier sérieusement à la bibliothèque puis partir danser au milieu de la mélodie des accordéons qui résonnaient dans Plijeune ; il se voyait secrètement prendre sa main, danser avec elle, l'emporter au rythme de la mélodie et dans l'effervescence du quartier festif.

Mais la belle Vira profitait de sa jeunesse et de sa vie étudiante, et côtoyait d'autres étudiants. Chaque nouveau prétendant faisait plus mal au cœur de l'amoureux : néanmoins il continuait d'espérer lorsqu'ils se saluaient à la fontaine, qu'elle lui souriait, et qu'ils rentraient ensemble vers Vendecentre, racontant leurs journées. Elle aimait lui adresser la parole, rire avec lui lorsque son temps lui permettait. Peut-être un jour accepterait-elle de lui partager tout son temps ?

Un soir, il l'avait surpris seule au bureau des élèves, recroquevillée et adossée à un mur, ses cheveux en pagaille, elle qui était si lumineuse et bien apprêtée. Posté à l'encadrement de la porte, il avait écouté la jeune fille, qui se lamentait après une nouvelle rupture. Quand est-ce que quelqu'un l'aimerait, et-ce pour de vrai ?

En entendant ses mots Guylt s'était figé, les yeux rivés sur elle. Pouvait-il être celui que Vira attendait tant ?

Celle-ci avait relevé la tête subitement et l'avait surpris à la contempler ; ainsi, pris au dépourvu, il s'était dirigé vers elle. Il lui avait proposé de se confier, et elle lui avait parlé de celui qui venait de la quitter. Puis le jeune homme l'avait rassuré doucement : il y avait des personnes qui l'aimaient, prêtes à lui donner ce qu'elle attendait. En détournant les yeux, il lui avait confié qu'il était de ces personnes-là. Enfin, en osant jeter un regard vers la jeune fille, il lui avait semblé voir un regard qu'elle ne lui avait alors jamais adressé. Et le temps que Guylt y réfléchissait, Vira avait déjà pris son visage entre ses mains et déposé ses lèvres sur les siennes, dans un baiser fougueux et presque désespéré.
Ils étaient restés dans les bras de l'autre un moment jusqu'à rentrer ensemble, main dans la main.

Et Guylt tenait sa main encore aujourd'hui.

— Encore dans tes pensées ?

La douce voix de sa bien-aimée le tira de ses réflexions.

— Encore et toujours.

— Est-ce que j'y étais ?

— Tu sais bien que tu les occupes.

Vira rit doucement, rouge de plaisir, et leurs doigts se resserrèrent entre eux.

— Et si on allait marcher à Auldnoir ? Lui proposa l'amoureux.

Lettre perdue, promesse non tenue ~ Gravity RushOù les histoires vivent. Découvrez maintenant