Chapitre 2

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Written in these walls are the stories that I can't explain


Harry

La dernière fois que j'ai mis les pieds à Leicester Square, je devais avoir onze ans. A l'approche de l'ancien cinéma, la voiture contourne la bâtisse pour se garer dans la rue donnant sur l'arrière-cour et une porte de secours. Alors qu'on m'escorte le long d'un labyrinthe de couloirs, je peine à croire qu'ils aient niqué un ciné entier pour nos tronches. Quand ils m'ont agité le contrat sous le nez, la question ne s'est pas posée. La proposition était solide. Le cadeau, précieux. L'engouement, imminent. Nous accorder cette parenthèse m'est apparu comme le meilleur moyen d'honorer cette époque de nos vies. Je lui porte tellement de tendresse.

Je suis léger. Je vole vers l'inévitable, prêt à encaisser l'onde de choc qui nous secouera lorsque l'on se retrouvera ensemble dans la même pièce, livrés à nos différences. Chacun de nos côtés, nous avons assez vécu et mûri pour se donner une chance de se redécouvrir, armés de l'amour fraternel que nous nous portons. Le passé ne m'effraie plus depuis longtemps. Il est caché derrière le rideau, inchangé. Clap de fin. Nouvelle scène. Nouvelle histoire.

Après de nombreux détours, nous arrivons dans le hall du musée. Les murs en velours rouge, intacts, m'enrobe immédiatement dans un cocon rassurant et familier. La hauteur du plafond me coupe le souffle. Le nez levé au ciel, mon cœur cogne dans ma poitrine lorsque je remarque finalement qu'une silhouette me fonce dessus en tornade. 

— Harold !

Niall sautille vers moi, les bras agités en l'air. Il s'effondre contre mon torse en lançant ses jambes et un sanglot se coince en travers de ma gorge.

— Ton genou Niall, attention, je souffle dans son cou.

— J'ai pas vu ta face de l'année en dehors de Youtube, et toi tu penses à mon genou ?

— Ouais à ton genou ouais.

On s'écarte pour se dévisager, les mains scotchées sur nos épaules respectives. Son regard pétille de malice. Bon sang, mon sourire béat me tiraille déjà les joues.

— Qu'est-ce que c'est bon de te voir putain.

Engourdis par l'excitation, on se tire l'un vers l'autre pour s'offrir une énième accolade. Cameron ouvre la porte de secours à la volée et nous prend sur le fait.

— Ah les retrouvailles ! Vous me réchauffez le cœur les garçons.

Je tique à ce surnom collectif que plus personne ne nous donne. Au fond de moi, j'espère qu'il est conscient que cette relation sera la moins problématique de toutes. Je lui serre la main, il complimente mon pantalon côtelé, puis tournoie les bras écartés pour nous inciter à admirer les lieux.

— Alors ? Ça vous convient ?

— C'est une dinguerie ! s'excite Niall, la voix tremblante.

Une dinguerie, très juste. Une mosaïque de disques d'or, de vinyles et de récompenses en pagaille décore les murs. L'atmosphère calfeutrée du cinéma, minutieusement conservée, invite à la nostalgie. Une balade rue des souvenirs socialement acceptable. Je cherche les trois derniers des yeux, en vain. Niall interrompt mon fil de pensées et m'entraîne dans une visite improvisée du hall, un bras autour de mon épaule.

— Ton deuxième album, mec... Il est terrible. Il tourne en boucle à la maison.

— En boucle ? je m'étonne en mimant d'attraper les fleurs qu'il me lance.

When the Curtain Calls (LS) ✓Où les histoires vivent. Découvrez maintenant