Chapitre 24 - Evidence

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On s'installe sur la terrasse du glacier et je commande une coupe avec des morceaux de cookies et de la vanille. J'en salive d'avance ! Le rasé me demande :

"Alors, on est comment sur l'échelle de la complication avec une journée comme ça ?"
"J'avoue, on est au top. C'est une vraie pause pour mon cerveau, merci d'avoir compris ça."
"Tant mieux. Tu veux en parler de ce qui te fait bouillonner ?"
"Oh non, je préfère continuer sur la légèreté du moment si ça te va ?"
"Bien sûr. Et si on se faisait un tour de petit train ? On verrait l'autre côté du Parc sans que tu doives marcher jusque là bas, ça pourrait être pas mal ?"
"On va partager la ballade avec tous les retraités du coin mais bon, c'est une bonne idée quand même !"

Et nous voilà une glace dans le ventre et les fesses sur un des bancs du wagon, côte à côte. La ballade commence et les commentaires au micro également. C'est vraiment ambiance papi mamie mais c'est marrant. J'ai une boule dans la gorge... La vie est tellement plus simple avec lui... Je tourne la tête dans sa direction et le regarde comme si c'était la première fois que je le voyais. Il est beau, bien foutu, bien habillé avec un t-shirt blanc assez près de corps et un casquette noire qui lui donne un petit air de bad boy. Il tourne son visage vers moi et me regarde avec ses grands yeux marrons et ses longs cils et il me prend la main. Je ne l'enlève pas, je me dis un instant que ça pourrait être ma vie. Je pourrais faire le choix d'être avec lui ou un garçon comme lui et de vivre simplement une histoire d'amour. C'est finalement ce que j'ai toujours voulu alors pourquoi ne pas me laisser aller ? Nous ne parlons plus et l'atmosphère devient chargée. J'ai soudain honte... Malgré ses paroles rassurantes pour que l'on se voit, il était évident qu'il s'attendait à quelque chose avec moi. Je le savais très bien au fond et j'ai quand même accepté car j'en avais besoin. Et en laissant ma main dans la sienne, je le conforte dans cette idée. Mais qu'est ce que je cherche à la fin ! Je retire ma main, il me dit de suite :

"Trop compliqué ?"
"Trop compliqué."

Mais pas si compliqué que ça en fait. C'était vraiment une chouette journée, et pourtant, ce n'est pas suffisant pour ne pas penser au cagoulé en permanence. Je voudrais être avec lui. Je ne demande pas de ballade, pas de glace, pas de cafés en terrasse, juste être avec lui. Pour tout ce que ça veut dire. Ce n'est pas compliqué, je le veux lui et pas le rasé, aussi adorable qu'il soit.

Après quelques minutes supplémentaires de silence gênant, un type déguisé en hot dog géant passa à côté de nous. D'accord... On se met instantanément à rire et à retrouver notre complicité du début de journée. Ouf.

Sur le chemin du retour, je repense à toutes les émotions qui ont rempli ma journée. J'ai l'esprit plus clair mais je porte encore un poids sur ma conscience. Il faut que je parle au rasé, que je lui dise clairement qu'il ne se passera rien car il mérite mon honnêteté plus que personne. Je sais qu'il doit monter chez moi récupérer le pull qu'il avait laissé l'autre jour et je voudrais profiter de ce moment au calme.

"Je voudrais te parler, tu as cinq minutes encore ?"
"Oui, oui, je t'écoute."
"J'ai été égoïste aujourd'hui, ça me fait du bien d'être avec toi alors jai accepté qu'on passe la journée ensemble mais en fait, je me suis voilée la face sur ce que ça pouvait te laisser penser. C'est pas juste compliqué en ce moment pour moi, j'ai vraiment le coeur prit ailleurs et il ne pourra rien se passer entre nous même si t'es juste au top du top. Je suis désolée, j'ai eu besoin de la journée pour comprendre tout ça, j'espère que tu m'en voudras pas."

Il me sourit faiblement.

"Je te mentirais si je te disais que je n'espérais pas que cette journée te fasse changer d'avis mais y a pas de soucis. Merci pour ta franchise. Y a un truc en particulier qui t'a..."

Nous sommes coupés par la sonnette de l'appartement. Je m'excuse et prends l'interphone :

"Oui ?"

Une voix énervée me répond :

"Tu peux descendre stp ?"

Et cette voix, je la reconnaîtrais entre mille.
Je me retourne vers le rasé :

"Je suis désolée, faut que je descende."
"Non mais j'y vais de toute façon. On se refait un apéro avec les copains un de ces jours, ok ? Et si besoin, tu m'appelles et on se refait une virée en tout bien tout honneur, ok ?"
"T'es vraiment au top."

Nous descendons et arrivons à la porte d'entrée de l'immeuble. Les battements de mon coeur explosent hors de ma poitrine et je commence à avoir du mal à respirer. Le rasé sort de l'immeuble et regarde l'homme qui se trouve à l'entrée, l'homme habillé tout en noir avec un casque de moto sur la tête et une posture de mec énervé. Le rasé s'arrête et me regarde avec un air inquiet, je lui fait signe que tout va bien mais je le vois avancer tout doucement pour évaluer la situation. J'arrive à la hauteur de mon visiteur du jour :

"Entre."
"Non."

Charme et Fêlures (terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant