Shot me

Chapitre 14

Quelqu'un dont je suis amoureuse. Voilà ce qu'elle m'a dit en sortant de la pièce et depuis, cette phrase tourne en boucle dans ma tête.

Après ça, j'ai vraiment eu beaucoup de mal à me concentrer à nouveau sur le boulot. Comment est-ce que j'aurais pu après qu'elle m'ait lâché cette bombe et en la sachant à seulement un mètre de moi ? Mais j'avais besoin de faire le point d'abord. D'être sûr de moi. De savoir ce que j'allais faire. Toute la nuit, je me suis retenu d'aller vers elle, de la prendre dans mes bras et de lui demander qu'on s'en aille. Je voulais l'avoir rien que pour moi et surtout ne plus voir Matt lui parler. C'est un client que j'appréciais mais le voir tourner autour de Marie, ça m'est insupportable. Je sais que ce qu'il se passe entre elle et moi, c'est réel. Bancal, mais bel et bien réel. Et elle me l'a confirmé tout à l'heure. Mais chaque fois que je la vois lui sourire, chaque rire qu'il déclenche, chaque main qu'il pose sur son bras, tout ça me rappelle le temps que nous avons perdu tous les deux.

La première fois que j'ai vu Marie, elle était accoudée au bar avec une amie. Elle riait avec elle tout en sirotant un cocktail aux couleurs bleutées. Son rire a attiré mon regard et l'instant d'après, je savais que je ne pourrais jamais oublier son visage. Il s'était illuminé en entendant son amie parler et je n'avais jamais vu une femme aussi belle. Sincèrement, je n'ai jamais cru au coup de foudre. Jusqu'à ce que je la rencontre.

Si ça n'avait pas été mon premier soir au Shot Me, je serais allé vers elle pour me présenter et essayer de faire sa connaissance. Mais je devais suivre ce que m'expliquait Jérôme, mon nouveau patron, tout en montrant ce que je savais faire. J'avais besoin de ce travail et je ne pouvais pas tout envoyer balader, même si ce n'était pas l'envie qui manquait. Finalement, ma position de barman m'a permis d'apprendre à la connaître au fil du temps et plus elle se révélait à moi, plus ce que j'en voyais me plaisait.

Le problème était que je n'étais pas le seul à qui Marie avait tapé dans l'oeil. Loin de là. Et elle n'avait pas l'air de s'en rendre compte. Chaque fois qu'elle venait, je la voyais discuter avec d'autres hommes, chaque fois différents et c'était une véritable torture. Elle rentrait toujours seule mais je savais que même si ça n'avait pas été le cas, je n'aurais rien eu à dire et ça me tuait à petit feu. Alors j'ai décidé de prendre les devants. Nous discutions déjà quelques fois et le courant passait bien, mais je devais savoir si nous avions une réelle chance ensemble. J'ai commencé simplement, en la saluant et lui faisant la bise par-dessus le bar, en lui souriant quand elle passait, en lui demandant comment s'était passée sa journée... Des choses anodines en apparence, mais c'était ma manière de lui montrer de l'attention, chose que je ne faisais qu'avec elle. Et je crois qu'elle s'en est rendue compte au bout d'un moment car elle a commencé à venir d'elle-même de mon côté du bar. Au fil du temps, j'étais le seul à la servir et nous parlions de tout et de rien. De son travail, de sa famille, de son appartement, de ses envies, de ses loisirs. Et je faisais pareil, répondant avec entrain à ses questions. Je voulais la connaître et il était clair qu'il en était de même pour elle.

Nous avons eu notre premier moment de vraie complicité grâce à un simple shot d'alcool. La soirée était déjà bien avancée et nous fêtions l'anniversaire de Quentin, l'ambiance était folle. Il m'a alors demandé de lui préparer un mélange que je lui avais fait découvrir : tequila et tabasco. J'en ai fait un mètre et ai distribué chaque shot aux membres du staff tout en en réservant un à Marie.

- Qu'est ce que c'est ?, me demande-t-elle en regardant d'un air dubitatif le mélange que je viens de poser devant elle.

- Une rasade de téquila sur son lit de tabasco.

- Sérieux ?!

Elle me regarde avec des yeux ronds, surprise par les ingrédients.