Chapitre 9 - Rencontre (Partie 1/2)

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Dimanche, à quelques minutes du rendez-vous fatidique avec le mystérieux Leandro. Je suis beaucoup moins angoissée que je le pensais. Et ce en grande partie grâce à Alison qui a longuement veillé sur moi, hier soir.

Alors qu'en temps normal elle serait partie s'amuser et charmer des hommes en boîte de nuit, elle est restée avec moi. Nous avions décidé d'aller au cinéma, toutes les deux, puis se goinfrer dans un fast-food avant d'aller dans son appartement, qui est bien plus grand que le mien. Nous avons passé le reste de la soirée à regarder des films de fantasy et à avaler nos glaces. Oui, nous avons beaucoup mangé, et j'ai par ailleurs un peu mal au ventre. Mais ça en valait le coup !

Ce matin, ou plutôt ce midi, lorsque nous nous sommes toutes les deux levées, après un bon petit-déjeuner, Alison m'a aidé à me vêtir de sorte à plaire à Leandro. Même si je ne souhaite pas attirer ce jeune homme, selon elle c'est important si je souhaite soutirer quelques informations de ce mystère qui rôde autour de lui et Kerry.


Après avoir essayé plusieurs de ses robes aguicheuses, nous avons fini par trouver celle qui convenait à ma taille et à ma morphologie, car Alison a la poitrine et les hanches bien plus généreuses que les miennes ; cette tâche n'était donc pas aisée.

Je me retrouve alors vêtue d'une robe noire sertie de perles dorées au niveau de la bordure du décolleté, marquée au niveau de la taille par une ceinture en soie, la jupe évasée et courte qui pourrait dévoiler ma culotte en un coup de vent. Fort heureusement, elle avait des collants opaques noires en réserve, ainsi que des chaussures avec de petits talons pour souligner le déhanché de ma silhouette.

Bien que cette tenue soit assez suggestive quant aux courbes de mon corps, je l'apprécie plutôt bien, même si je ne la porterais pas tous les jours. Alison vient d'une famille aisée qui lui verse beaucoup d'argents, elle se permet donc de s'offrir des vêtements et du maquillage à foison, et m'en prête de temps à autre car cela lui fait plaisir. Quand bien même je me sens souvent gênée de lui prendre temporairement quelques-unes de ses affaires.


Après nous être étreintes une dernière fois, je suis partie de chez elle pour me mettre en route vers le quai de Blackpool. Ma démarche est peu assurée et ma gorge est serrée, comme si l'inquiétude me rongeait. Pourtant, je me sens étrangement bien et j'ignore pourquoi cette tension m'envahit. Qu'importe : je dois rester concentrée sur le rencard et ne pas divaguer.

J'ai longtemps pu observer Alison draguer des mecs en boîte de nuit, je sais donc charmer les hommes et leur plaire. Même si ce jeu me répugne plus qu'autre chose, je préfère écouter les conseils de mon amie plutôt que de suivre les miens qui n'est que de se cloîtrer dans sa solitude et sa tristesse.

Je prends une grande inspiration et expire un bon coup, et ce à plusieurs reprises, et contemple l'horizon couvert par d'épais nuages gris menaçant de faire tomber de la pluie. Je n'ai pas de parapluie avec moi, seulement mon manteau et mon sac à main pour me couvrir d'une éventuelle averse. Tant pis. J'imagine que je vais devoir faire avec.


J'observe de temps à autre les cafés et restaurants, les personnes qui les habitent, qui mangent, qui rient en chœur, qui débattent sur des sujets sérieux. La tranquillité ainsi que la convivialité de l'atmosphère me rendent davantage sereine.

J'étire un petit sourire puis prends mon téléphone dans mon sac à main et observe l'heure : treize heures cinquante-sept. Je ne suis plus très loin du bord de mer ; je ne serai pas en retard, cette fois-ci.

Cependant soucieuse, je déverrouille mon portable et sélectionne la conversation avec Kerry pour vérifier s'il ne m'a pas envoyé de nouveau message. Mais à mon plus grand regret, il n'y a toujours rien. Je soupire, désespérée, puis range mon téléphone dans mon sac à main. Je ne dois pas me laisser abattre : peut-être que c'est justement à cause de ce cher Leandro qu'il ne me contacte plus du tout.


Après quelques mètres parcourus, j'arrive enfin à destination. Les cris enjoués des enfants dans le Coral Island détonnent du calme ambiant de la mer, des promeneur solitaires, en famille ou en couple vagabondent le long des quais propres et bien entretenus de Blackpool, et quelques personnes marchent sur le sable humide pour effleurer l'écume de la place du bout de leurs pieds.

Je m'accroche à la barrière qui sépare les quais de la plage et contemple l'horizon grisâtre. Malgré le mauvais temps, cela ne coupe pas le charme de la mer britannique ; elle est toujours aussi sublime.


Je ferme un instant les yeux et prends une grande inspiration pour humer l'air salé et marin des lieux puis expire un bon coup. J'ouvre ensuite les paupières et aperçois un petit garçon, main dans la main avec sa mère, s'enthousiasmer à l'idée de pouvoir toucher l'eau de la mer. Je pousse un petit rire mielleux, attendrie par cette scène.

Malgré mon aspect très solitaire, j'adore les enfants. Et plus tard, j'aimerais en avoir au moins deux. Je suis presque certaine que je serai une mère poule qui traiterait ses bébés comme de petits rois ou petites reines. Ce n'est pas forcément la meilleure éducation à leur faire, mais à vrai dire je m'en fiche un peu, tant qu'ils sont heureux et en bonne santé, je suppose que c'est bien mieux que de les maltraiter et leur faire vivre un enfer.

Mais pour l'heure, pas d'enfants, car je n'ai pas de mari et je dois encore terminer mes études. Cela viendra quand ce sera possible, quand je serai posée dans une maison avec un homme que j'aime autant qu'il m'aime.


Un petit sourire mièvre s'ancre sur mes lèvres. Je me mets à rêvasser, à m'imaginer heureuse dans les bras d'un homme qui me comprendrait, qui m'aimerait et qui me protégerait, et notre enfant qui nous étreint avec beaucoup d'amour. L'image d'une petite famille parfaite et heureuse. Une image bien naïve, je sais bien. Mais nous avons bien le droit de rêver.

Alison ne manque pas de me taquiner parfois sur ces rêves que je me fais. Mais en même temps, dans ses ricanements moqueurs se trahissent une envie, l'envie de vivre la même chose, un jour.


Je détends mes épaules et souffle un air paisible. Je n'ai drôlement aucune envie de rencontrer Leandro : je suis bien, seule sur ces quais calmes, à contempler le paysage apaisant. Je viens parfois en bord de mer le weekend, lorsque j'ai eu une semaine difficile, pour me détendre un peu et faire le vide dans ma tête. Et ça marche à tous les coups.

Mais alors que je commençais à divaguer dans mes pensées, j'entends des pas s'approcher de moi. Je dresse l'oreille, en alerte, puis tourne la tête. Mon cœur s'arrête une brève seconde. Mon souffle s'accélère.

Un sourire charmant étirant ses lèvres, il m'observe avec beaucoup de joie et continue à venir vers moi. Je lui souris maladroitement, un peu ébranlée par sa présence. J'avais déjà oublié à quel point il est beau. Et à quel point sa prestance est impressionnante, voire intimidante. Je continue à m'accrocher à la barrière, comme si j'avais peur de tomber dans mon vertige. Je dois être forte, ne pas me laisser impressionner, ni ne laisser me faire séduire par ce beau ténébreux. 

Esclave de la ChapelleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant