Lune des Herbes 4 / 4

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NOLA



Biarritz, Maison des Oneida, Samedi 21 août, 12 h 40

Tandis que je finis de mettre la table avec Nick, mon père entre dans la cuisine. Il me regarde en soupirant et s'assoit sur une des six chaises transparentes assez modernes qu'on a achetées pour la maison. La table laquée noire donne un ensemble très joli. De toutes façons, maman a toujours eu beaucoup de goût pour la déco. Papa me regarde déposer les assiettes, les verres puis les couverts sans mot dire. Enfin, quand je prends place en face de lui, avec Nick, il lâche :


— Tu es sûre de toi ?


— Euh... de quoi me parles-tu, papa ?


— Eh bien... de ton tatouage ! me répond-il avec une grimace effrayée. Ce n'est pas cette après-midi que tu dois voir le tatoueur ?


Maman, arrivant pile au bon moment, lui sert du risotto aux champignons et répond à ma place :


— Chéri, on en a déjà parlé. Enola sera majeure dans moins d'un an, et cette cicatrice lui empoisonne la vie. Tu étais d'accord hier soir, je te rappelle.


— Oui, je sais, grommelle-t-il. Mais je te rappelle que c'est ma fille et qu'un biker va lui dessiner un truc sur le bras qui ne s'effacera jamais !


— Avec un marqueur indélébile ?


— Non Nick, avec un stylo de tatoueur, lui dis-je pour ne pas l'inquiéter.


— Et puis, ajoute maman, aujourd'hui, on va voir si on a un bon contact, montrer le dessin, voir si c'est possible et peut-être prendre rendez-vous si toutes les conditions sont réunies.


Maman sert ensuite le poulet à la provençale aux garçons et à elle-même. Le fumet embaume la cuisine mais je ne salive pas pour autant.


— Je t'ai fait un filet de tofu à l'ail des ours, ça te va ?


— C'est parfait, maman ! Merci !


Pourquoi est-ce que je ne mange pas la même chose que tout le monde ? Eh bien, je suis végétarienne. Cela fait maintenant deux ans. C'est un choix sans en être un. Quand mes absences se sont faites plus intenses, et qu'elles me laissaient exténuée, un médecin m'a déclarée anémiée et m'a ordonné de manger beaucoup de protéines animales.


Échec total. La vue d'un steak me donnait la nausée et lorsque je me forçais à l'avaler, mon corps le rejetait aussitôt. Je ne gardais plus aucun aliment carné. Pareil pour le poisson. Mon corps tolère les œufs et le fromage, mais j'essaye de ne pas en abuser. C'est comme cela que je suis devenue végétarienne. Papa et maman se sont rapidement adaptés, moi aussi, et ça a été un vrai soulagement pour tout le monde. J'aide maman à préparer à manger et la famille fait de nombreux repas végétariens. Les divers reportages sur les bienfaits de ce régime et les produits spécifiques de plus en plus disponibles ont facilement convaincu les parents. De toutes façons, je n'ai pas le choix.

Lakota, 1. OriginesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant