TRISTAN
Assoupi sur le canapé, je quitte mes mauvais rêves au son d'un grattement dans l'entrée. Une petite pile de feuilles se faufilent sous la porte. Sérieusement, notre porte est donc si peu isolée ? Le pas mal assuré, je m'approche et récupère les papiers. Chapitre bonus. L'en-tête ne fait aucun doute sur l'identité du messager. Je m'empresse d'ouvrir le battant, mais le couloir m'apparaît désespérément vide. En jetant un œil par la fenêtre de la cage d'escalier, je vois le cabriolet de Lou qui s'éloigne déjà au loin. Merde. Si je ne m'étais pas endormi, j'aurais certainement été plus réactif.
Il n'y a que cinq pages. La police froide du texte ne laisse rien paraître de ce qui m'attend. Dans ce chapitre bonus, Lou retrace notre relation, jour par jour, rencontre par rencontre, mot par mot. J'ignore si elle l'a écrit au fil du temps, mais les détails me semblent trop précis pour que ce texte soit récent. Je découvre l'histoire de son point de vue. Si les débuts restent détachés et plats, plus les phrases s'enchaînent, plus elle laisse transparaître ses véritables sentiments, sans jamais les citer.
Tourmenté par mes émotions contradictoires, j'essaie de savoir si je dois prendre ce geste comme une déclaration ou comme le point final de quelque chose qui n'a peut-être même pas réellement existé. Jusqu'à ces quelques mots, rajoutés à la va-vite d'une écriture manuscrite en bas de la dernière page.
« Il n'y aurait pas plus belle famille que la tienne, mais ma place se trouve ailleurs. Merci pour tout. Je t'ai aimé, vraiment, et je t'aimerais encore. »
Il n'y a rien de plus, même pas une signature. Et pire que tout, je comprends maintenant le sens de ses mots. Elle m'a déclaré son amour de la pire des façons qu'il soit. Punaise, ma Lou...
— Professeur Lupus !
Sa secrétaire m'a pourtant prévenu qu'il était en rendez-vous. Elle a tenté de me retenir, mais mes bonnes manières n'ont pas tenu longtemps face à mon angoisse. Avant de me rendre sur le campus, je suis à nouveau passé chez Lou. J'ai même essayé de briser sa serrure. Rien à faire, les portes blindées portent bien leurs noms.
Je frappe de toutes mes forces sur le battant. Les étudiants qui traversent le couloir me jettent des œillades interloquées. Tant pis si je passe pour un fou, la fin justifie les moyens.
Lupus finit par ouvrir. Il me lance un regard noir en s'excusant auprès des deux hommes qui sortent de son bureau. Je trépigne, incapable de rester statique.
— Tristan ? Je peux savoir ce qu'il te prend ? me demande-t-il ensuite.
— Lou ! Elle... Vous avez vu les informations ? J'ai été chez elle et... Son chapitre... Elle...
— O.K., O.K., calme-toi et viens dans mon bureau.
Il doit vivre dans une grotte. S'il a eu vent qu'une de ses élèves a publié un roman, il ignorait son identité et surtout ce qu'il contenait. Je dois tout lui raconter en détail. Mes tripes guident mon récit autant qu'elle me torture le bide.
— Vous êtes son tuteur. Vous devez faire quelque chose. Vous devez bien avoir le numéro de ses parents, ils auront sûrement la clé de chez elle.
— Mais pourquoi tu veux absolument rentrer chez elle ? Je comprends bien qu'elle doit vivre une période compliquée, mais si elle ne veut pas te voir...
— Vous n'avez rien compris ! Je m'en fiche de la voir, il faut la protéger ! Son chapitre... Elle est en danger. Elle va se mettre en danger, faire une connerie...
— Qu'est-ce qui te fait penser à ça ?
— Mais la question n'est pas pourquoi elle va passer à l'acte, mais plutôt quand ! Elle va le faire, j'en suis sûre ! Vous devez agir !
— Très bien, très bien. Je vais voir ce que je peux faire. Attends-moi dans le couloir.
— Mais...
— Tristan ! Je te crois, et si tu as raison on doit agir vite. Alors, écoute-moi et attends-moi dans le couloir !
Je n'obéis qu'à moitié. Certes, je le laisse seul dans son bureau, mais mon oreille reste collée à sa porte. Il tient parole. Il contacte les forces de l'ordre. D'après ce que j'entends, il s'entretient avec quelqu'un qu'il connaît bien dans le service. Pitié, qu'ils fassent vite.
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Drop the end | Terminé ✔
RomanceLou a essayé. Du mieux qu'elle a pu. Depuis sa naissance, on lui a appris à faire face, à bien agir. Manier les apparences pour masquer la réalité, elle connaît. Mais là, c'est trop. Alors qu'elle relit une nouvelle fois la lettre que sa grand-mère...