Amnésia : l'Enfant de la Lune (Sous contrat d'édition)

Prologue

Paris, année 2039

Par le Soleil ! Que cette fille est rapide, pensa Félix. La créature qu'il pourchassait le distançait sans mal et pourtant, il pouvait se vanter d'être l'un des meilleurs coureurs de son clan. L'Alva, être petit et rapide, renvoyait l'apparence d'un humain ordinaire. En revanche, elle était beaucoup plus belle et infiniment plus gracieuse, presque féline. Félix avait appris à voir au-delà de cette beauté dangereuse. En réalité, ceux de son peuple se révélaient fourbes et machiavéliquement intelligents.

Ce n'était pas la toute première Alva de sexe féminin qu'il croisait, mais la deuxième ou troisième, tout au plus. Ces créatures restaient très secrètes et en apercevoir une relevait du miracle. Celle qu'il était en train de traquer lui avait dérobé quelque chose de précieux, il devait le récupérer à tout prix, c'était une question de vie ou de mort.

La fille stoppa brusquement sa course effrénée. Un mur immense se tenait juste devant son petit corps tout en muscles. Un cul de sac, génial, se réjouit Félix, la voilà prise au piège ! le garçon, agile et entrainé, ne doutait pas de ses capacités à la vaincre au corps à corps.

La jeune fille fit volte-face. Elle planta ses iris d'un bleu-mauve dans ceux de Félix, une lueur de défi dans le regard. Ses cheveux blonds couleur des blés, légèrement ondulés, reflétaient la lueur pâle et brillante de la lune. Rien dans son attitude ne trahissait la mauvaise posture dans laquelle elle se trouvait. La jeune Alva semblait décontractée, presque enjouée.

Ses traits fins et proportionnels à tout point de vue s'harmonisaient à la perfection avec son être dans son intégralité. Un charisme incroyable et un charme dévastateur se mêlaient aux effluves hypnotiques que son parfum dégageait. La vie l'avait-elle pourvue de tous ces atouts dans l'unique but de plaire ou y avait-il là quelque chose de plus profond, de plus dangereux ?

Félix connaissait déjà la réponse au fond de lui, il savait pertinemment qu'elle n'était qu'un piège, une toile d'araignée dans laquelle il était si facile de se retrouver emprisonné. Elle était comme l'une de ces plantes, magnifiques et carnivores, qui finit par vous anéantir.

Comme pour lui donner raison, ses cheveux ondulaient délicatement et paraissaient souples et soyeux. Il eut très envie de passer ses mains parmi cet épais rideau brillant pour vérifier à quel point sa supposition était juste.

L'être lunaire lui sembla jeune. Félix ne s'en étonna pas. Lui-même n'avait que dix-huit ans. Il n'y a pas d'âge quand il s'agit de ceux d'entre nous, pensa-t-il. Defensors et Alvas n'ayant pas la même notion de temps que les humains.

Doucement, les lèvres gourmandes et parfaitement dessinées de la jeune fille s'élargirent en un sourire espiègle et mutin. Elle s'élança vers lui et Félix crut un instant qu'elle allait le percuter. Pourtant, au dernier moment, d'un mouvement agile et fluide, elle courut le long du mur qui se trouvait à la gauche du garçon, défiant toute gravité. Félix ne put s'empêcher d'être admiratif. Jamais encore il n'avait rencontré un si captivant personnage.

– Qu'attends-tu pour m'attraper Defensor ? le nargua-t-elle d'une voix suave qui ne collait pas du tout avec l'impression de jeunesse qu'elle dégageait.

L'Alva s'était exprimée en français, langue qui ne se parlait plus depuis que l'anglais était devenu la langue unique, vingt ans plus tôt.

La décision d'un langage commun avait été prise peu après la troisième guerre mondiale, rebaptisée par la presse ; l'Hécatombe. Celle-ci était partie d'un conflit entre l'Orient et l'Occident, puis cela avait pris de l'ampleur sans pouvoir être contrôlé. Les conséquences avaient été sans appel : 2,5 milliards de morts. Jamais une guerre n'avait autant décimé.