Chapitre 4

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Cela fait bien longtemps que je n'ai pas dormi comme ça. Il est tard dans la matinée et je me lève en pleine forme. En descendant dans ma cuisine, je le revois et décide d'aller dans la bibliothèque pour savoir si je n'ai pas rêvé ce moment avec lui.

Les deux verres sont encore disposés sur la table à côté du plateau de jeu et je ne peux m'empêcher de renifler les effluves de l'alcool qui était dans le sien. Les yeux fermés, je me remémore chaque instant, à l'évidence, il est resté pour moi, car il voyait nettement ma détresse. La partie de la nuit que j'ai passée avec lui prouve qu'il ne faut pas se fier aux apparences, il est peut-être un tueur, mais il a agi avec moi comme aucun autre homme ne l'a fait auparavant... Un paradoxe presque cynique quand on sait qu'inviter un inconnu chez soi n'a rien d'anodin, surtout après ce qui m'est arrivé. Mais il n'a rien tenté, rien fait contre ma volonté et je n'en reviens toujours pas d'avoir accepté une chose pareille. Se pourrait-il que cet homme me réconcilie avec le sexe opposé ?

Après la visite de l'électricien, j'entreprends de faire le tour du jardin pour voir s'il n'y a pas de dégâts supplémentaires. J'aime faire cette promenade même si j'évite autant que possible la forêt derrière le château. Je la connais par cœur, et malgré cela, depuis mon agression, j'ai peur d'y faire de mauvaises rencontres, c'est idiot sans doute, mais je n'y peux rien. Là-bas la végétation y est dense et de nombreuses personnes viennent s'y détendre en saison pour y chercher des champignons. Par chance, l'orage n'a pas fait plus de dommage et c'est tant mieux.

La journée est si douce que je la finis en jardinant. Il y a quand même cette vieille souche que je dois déraciner depuis des mois, et aujourd'hui j'en ai le courage, va savoir pourquoi, l'effet Jaden peut-être. Je saisis ma lourde barre à mine dans la remise attenante au château et me dirige vers elle, bien décidé à la faire céder.

Malheureusement, me voici en train de faire levier depuis quelques minutes, mais elle ne bouge pas.

- C'est pas possible ! Allez saleté.

Je bêche de chaque côté pour la libérer, et recommence. Je ne suis plus en sueur, je suis complètement en nage. Je m'appuie maintenant si fort sur la barre, que je suis en lévitation sur elle. Soudain, elle est délogée et je m'étale dans le sable.

Tout en toussant, je fulmine.

- Merde !

J'ai manqué de me tordre un poignet et quand je me relève, toute la terre est collée à mon visage et à mes vêtements, j'en ai même dans la bouche ! Si je rentre comme ça chez moi, je vais subir les foudres de Suzanne, aussi je n'ai plus qu'une chose à faire, c'est d'aller me rincer dans la rivière juste à côté, en plus cela me fera baisser ma température corporelle, ce n'est pas plus mal.

- Mais, quelle idée ma pauvre Danaé ! Tu en as même dans les cheveux, dans les yeux ! Tu es un vrai boulet !

Quand je passe à travers les buissons avec difficulté, je me dis qu'il faudra sortir la taille haie la prochaine fois. Le chemin est presque impraticable, la végétation est épaisse ! Je m'imagine déjà face à cette eau claire et bien fraiche et c'est bien dommage que je n'ose plus du tout me baigner dedans, encore une fois par crainte d'une mauvaise rencontre. J'en aurais bien envie en cet instant. Cela dit, je peux tout à fait le faire tout habillé, au point où j'en suis. Je m'avance vers le trou d'eau que je connais bien, une véritable piscine naturelle et baisse les yeux pour éviter ces foutus branchages. Mais lorsque j'arrive enfin à cette clairière, complètement couverte de terre je ne suis pas seule.

Je pousse un cri de surprise et il se retourne. Ho mon Dieu ! Il est nu comme un ver... Il dévoile des charmes absolument délirants et je m'en veux presque aussitôt de le fixer ainsi, alors je me tourne en disant :

- Pardon !

Je l'entends rire dans mon dos.

- C'est moi qui suis désolé. Attendez, je vous laisse la place...

- Non !

- Comment ça, non ?

- Enfin si...

- Ce n'est pas très clair.

Il enchaine :

- Vous pouvez m'envoyer mes vêtements, ils sont en face de vous...

Non, mais quelle quiche ! J'ouvre les yeux et bien malheureusement ils sont effectivement en face de moi. Oh putain ! J'avance mon bras, et je tremble presque quand je saisis son t-shirt. Je l'amène doucement vers moi et... Au secours ! Cette odeur... Je le tends vers l'arrière d'un coup et essaye de m'éloigner le plus possible de ses effluves terriblement virils. Je sens qu'il arrive dans mon dos aussi je place ma main sur mes yeux. Il ne manquerait plus que je le dévisage encore une fois. Ses pas sont lents, et lorsque je l'entends respirer tout proche de moi, je vacille au rythme de mon cœur qui s'affole.

Il prend doucement son t-shirt, puis je mets mes deux paumes sur mes paupières. En faisant, cela, son odeur me chatouille encore plus les narines, un mélange de musc, de force et d'autres choses qui me rendraient presque vulnérable.

- Merci. Il me manque néanmoins un petit détail : mon pantalon...

Pourquoi n'ai-je pas pris en premier celui-ci ? Mais quelle conne !

- Ne vous inquiétez pas, j'y vais.

Sentant qu'il ne rapproche de moi, et que je vais y laisser ma santé mentale, je respire un bon coup et saisis à l'aveugle le jean pour lui balancer littéralement dessus.

Il éclate de rire, quand je perçois qu'il s'habille derrière moi.

- C'est bon, vous pouvez ouvrir les yeux.

Ce que je fais lentement toujours dos à lui, mais je ne bouge pas d'un pouce, je suis raide comme la justice. Alors il passe à côté de moi et retourne manifestement chez lui sans un mot de plus.

MB MORGANE - Mémoire T.1 [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant