Chapitre 2

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Dao.

Les lectures s'enchaînent rapidement et la professeure nous invite même à sortir un peu en avance car nous avons terminé le chapitre plus vite que prévu, elle nous distribue les fiches de la prochaine séance alors que nous passons devant elle et m'arrête lorsque je m'apprête à sortir.

« Dao, restez ici s'il-vous-plaît. Oh, Meng aussi.

J'obéis et m'appuie sur la table la plus proche pour patienter, je devine déjà qu'elle va m'encourager à me confier à elle sur ma solitude ou quelque chose du genre, elle a déjà essayé quelques fois. C'est vraiment une personne adorable, à l'écoute et soucieuse de tous ses élèves. Elle se vante souvent d'être professeure d'une option car si elles avaient plus d'élèves, elle ne pourrait pas prendre autant soin de chacun.

- Désolée de vous retenir les garçons, vous n'avez rien d'urgent ?

- Non, ne vous inquiétez pas, je la rassure.

- Moi non plus, renchérit Meng.

- Tant mieux ! Dao, tu sais de quoi je veux te parler, n'est-ce pas ? Si ce genre de comportement te dérange, tu as le droit de le dire, tu peux même le signaler à la direction, ce n'est pas la première fois et il s'agit de ton droit à l'image.

- Parler de droit à l'image à un acteur est plutôt contradictoire, madame.

Je lui souris, amusé. En me lançant dans cette carrière, j'ai oublié l'idée du droit à l'image.

- Tout de même, j'ai bien vu que tu étais mal à l'aise.

- Je vous assure qu'il n'en est rien, je suis habitué, j'ai juste trouvé son geste un peu déplacé et je vous remercie d'être intervenue.

- Aucun souci, tu sais que tu peux compter sur moi. Plus important, est-ce que tu t'es fait des amis depuis la dernière fois que nous en avons discuté ?

Argh, autant je l'adore, autant en parler devant le nouveau n'est pas très délicat. Je suis sûre qu'elle peaufine déjà le plan de nous faire devenir amis mais pas la peine d'être aussi directe. Je tente de cacher ma gêne devant Meng qui a haussé les sourcils à sa question.

- Madame... Ne vous inquiétez pas pour moi, je me porte très bien.

- Donc, toujours pas ?

- Les autres étudiants semblent un peu effrayés par moi, ce n'est pas grave du tout, je les comprends. Vraiment, je n'ai aucune raison de me plaindre de quoi que ce soit en ce moment.

- En es-tu sûr ?

- Je le suis.

- Bon, j'arrête d'insister alors, soupire-t-elle, un peu déçue que je me braque encore.

Je sais que ses intentions sont bonnes bien qu'un peu maladroites mais je me vois mal débiter tout mon mal-être devant elle et pire, devant l'inconnu qui suit la conversation. Il semble lui-même s'interroger sur sa présence ici mais n'ose rien dire devant l'adulte.

- Ensuite Meng, je vais te donner les fiches de la précédente séquence, nous n'avons pas encore fait le contrôle dessus. Tu le passeras comme les autres mais tu seras noté moins sévèrement, cela te va ?

- Oui, bien sûr, merci.

Elle attrape une pile de feuilles sur son bureau, qu'elle a préparé pendant nos lectures plus tôt.

- Tu as les feuilles de cours ici, les exercices au dos, certains sont compliqués à comprendre sans les annotations que nous avons rajoutées. Dao, peux-tu lui prêter tes cours ? Je sais que tu notes tout.

J'opine et rouvre mon sac à dos pour en sortir le classeur dédié à cette matière, que je tends à Meng, il l'attrape et me remercie.

- Le contrôle est dans deux semaines alors assure-toi de rendre le cours de Dao au plus tôt afin qu'il puisse lui aussi réviser, ok ?

- Pas de problème, j'aurai aussi pu l'emprunter à Issam, je ne veux pas déranger Dao.

Je lâche un petit rire et la professeure fait de même. Tout le monde sait que les cours d'Issam sont les moins organisés, les moins clairs et les plus incomplets de tous, il arrive toujours en retard, s'endort ou s'éparpille bien trop souvent.

- Je crains que le classeur d'Issam ne te permette pas de travailler convenablement.

- Je vois, je vais utiliser celui-ci, décide-t-il, se rappelant sans doute le non-sérieux de Issam.

- Sur ce, je vous libère. N'oubliez pas d'échanger vos contacts pour vous rendre vos affaires si vous n'avez pas de cours en commun et à la semaine prochaine.

- Au revoir madame.

Nous sortons enfin de la salle et je sors ma gourde pour boire une grande gorgée d'eau fraîche, la chaleur est écrasante, je n'en peux déjà plus.

- Du coup, je peux avoir ton contact pour te prévenir quand j'aurai fini de récupérer les cours ? demande Meng.

- Oui, tu veux quoi, numéro de téléphone, Instagram ?

- Numéro, ça sera plus pratique.

Il me tend son portable et j'entre mon numéro en vérifiant que personne autour ne nous regarde. Mon numéro de téléphone semble être plutôt recherché et je n'ai pas envie d'être inondé de messages, aussi gentils et adorables soient-ils.

- Je peux te demander de ne le donner à personne, s'il-te-plaît ?

Il relève la tête, d'abord étonné, puis semble se rappeler de tous les petits détails un peu étranges qu'il a pu remarquer.

- Promis, si tu me dis pourquoi tout le monde à l'air de te traiter différemment, t'es un acteur connu, je ne crois pas t'avoir déjà vu ?

- Je suis acteur, oui, dans pas mal de petites séries d'un genre particulier. Depuis que l'information a tourné dans l'université, les gens s'imaginent que je suis différent d'eux.

- Oh, mais c'est génial ! Je m'en doutais mais quand la professeure a dit que tu n'avais pas de potes, je me suis dit que ça devait être autre chose.

Je grimace, point sensible touché. Il se rend compte de sa bêtise, paniqué.

- Désolé, ce n'était pas dans le but d'être méchant, je n'ai pas réfléchi.

- Je m'en doute, ce n'est pas grave. C'est lié dans le sens que personne n'ose m'approcher si ce n'est pour une photo, un autographe ou une question sur une série...

- C'est bête ! Enfin, tu as tant de fans que ça ?

- Hm, les séries dans lesquelles je joue plaisent beaucoup aux filles de notre âge en particulier alors ça tombe mal.

- Je comprends, je comprends. En tout cas, c'est dommage, t'as l'air d'être un mec cool.

- Merci, je te renvoie le compliment. »

Il sort son téléphone sur lequel j'aperçois le nom de « Issam », il décroche, s'excuse auprès de moi et part à la recherche de son ami dans les couloirs. C'est la première fois depuis mon arrivée que je discute aussi longtemps avec quelqu'un, cela me rassure un peu, c'est donc bien à cause de mon métier et non pas parce-que j'ai l'air arrogant ou effrayant que les gens ont peur de moi.

Un amour entre deux mondesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant