Chapitre 1 : Départ

80 6 25
                                    

Le vent hurle dans la nuit, la pluie bat les pavés. Les yeux grands ouverts, je me tourne dans mon lit pour lire l'heure affichée sur mon réveil : 3H50. Mon réveil sonne dans 10 minutes. J'ai dormi 4 heures cette nuit. Enfin... si on peut appeler ça dormir. Je me tourne une nouvelle fois sur le matelas confortable et me met sur le dos, une main sur le ventre, fixant le plafond. Évidemment je ne vois rien, il fait nuit noire dans ma chambre, aucune lumière ne filtre de dehors, pas un bruit ne se fait entendre dans la maison, même le tic-tac de mon réveil est effacé par l'averse qui frappe mon velux. Je frisonne. Je pense à cette longue journée qui m'attend et je sens une boule se former dans mon ventre. Cela fait maintenant un an que je me prépare pour vivre ce moment et maintenant que je dois l'affronter, je ne suis plus aussi certaine que ce soit ce que je veux vraiment. Le fil de mes pensées est interrompu par ma mère montant l'escalier pour venir me réveiller en douceur. Je me tourne encore une fois juste au moment où elle rentre dans ma chambre.

«Leo ?» Chuchote-t-elle tendrement en s'approchant de mon lit à pas de loup pour ne pas réveiller mon frère qui dort dans la chambre d'à côté.

«Éléonore il est l'heure de se lever, de t'habiller et de venir avaler ton petit déjeuner sinon on va rater l'avion.» Continue ma mère en chuchotant, assise désormais sur le bord de mon lit, me secouant doucement par l'épaule. Je ronchonne pour lui faire comprendre que je suis réveillée et elle se lève pour me laisser quelques minutes pour émerger à mon rythme.

«Je t'attend en bas, ne traîne pas trop ma chérie.»

Elle sort de ma chambre et je soupire avant de repousser du pied ma couverture chaude et rassurante puis je me lève. J'attrape les affaires que je me suis préparé hier soir puis je me dirige vers la salle de bain ma boule au ventre toujours aussi présente. J'ai pris ma doucher hier soir afin de ne pas réveiller mon petit frère si tôt ce matin. Je me contente donc de me nettoyer le visage, de coiffer ma crinière brune avec une simple queue de cheval et d'enfiler mes vêtements propres pour mon long voyage. Mon jean lilas et un haut à manches courtes blanc accompagnent une veste en jean couleur pastel. Je me sens bien dedans et je sais qu'il va faire chaud aujourd'hui alors mieux vaut que je sois à l'aise pour prendre l'avion.

«Leo !» S'enquière ma mère du bas de l'escalier

«Je suis dans la salle de bain maman!» Je chuchote plus ou moins en retour, nerveuse à l'idée de réveiller mon frère mais un faible ronflement provenant de sa chambre me rassure sur son activité nocturne.

Je me regarde une dernière fois dans la glace et soupire, j'ai des petits yeux remplis de fatigue et ma journée promet d'être longue. Merlin, si seulement je pouvais regagner mon lit et oublier tout ça...

Je retourne dans ma chambre, regarde une dernière fois que je n'ai rien oublié de mettre dans mon sac à dos en vérifiant mentalement ma liste, bien que je l'aie vérifié au moins 50 fois hier soir avant de me coucher.

«Papiers, check, téléphone, check, documents administratif, check, billets, check.» Je pense que j'ai tout. Je parcours ma chambre du regard une dernière fois du regard puisque je ne risque pas de la revoir avant au moins six mois. Mes yeux marquent un stop en voyant mon lit. Je laisse mon sac à dos à l'entrée et avance pour faire mon lit au carré. Ayant grandi avec un père militaire, je fais mon lit au carré tous les matins et cette routine est rassurante. En secouant mes couvertures avant de les glisser sous le matelas, je sens quelque chose me tomber sur les pieds. Je baisse les yeux et remarque mon doudou, mon petit loup gris, mon plus vieux compagnon tombé sur le sol. J'esquisse un sourire nostalgique et me baisse pour le récupérer. Je caresse son petit museau abîmé de mon pouce avant de souffler.

«C'est un signe ça ? Je ne peux pas partir sans toi...» J'ai beau avoir 19 ans, j'ai toujours dormi avec lui. Je m'étais refusé à le prendre de peur que ce voyage soit son dernier, il a dix-neuf ans après tout lui aussi, mais savoir qu'il serait avec moi, que j'aurais un peu de chez moi là-bas était quelque chose de réconfortant et j'avais besoin de ça.

Je me redresse ma peluche en main, ajuste une dernière fois mes oreillers, regarde mon lit bien fait puis retourne près de mon sac à dos, appuyé contre le chambranle de la porte. J'y glisse mon loup, parcours une dernière fois ma chambre du regard avant d'éteindre ma lumière et de fermer la porte en chuchotant

«A dans six mois.»

Je descends les escaliers en silence pour ne pas réveiller ma petite tête blonde préférée puis j'arrive dans la cuisine où ma mère et mon père sont en train de discuter.

«Bonjour pa', bonjour m'man» Je dis-en m'approchant d'eux pour les embrasser rapidement.

«Bien dormi Leo?» Me demande mon père en reposant son café.

Je secoue la tête pour lui signifier que ce n'est pas le cas puis je me dirige vers le frigo pour prendre la bouteille de lait et m'en servir une tasse. D'une nature pas très bavarde, ce matin je voudrais juste disparaître. Éviter de répondre aux questions pour garder la face était mon objectif premier. Je ne pouvais, je ne devais pas leur montrer à quel point j'étais anxieuse.

«Leo on part dans 10 minutes ma chérie» M'annonce ma mère et je soupire.

«Très bien», je lui réponds la gorge serrée. Elle a insisté hier pour que je ne parte pas le ventre vide, et elle a raison, mais le nœud de mon estomac est si serré que j'ai l'impression que je vais vomir si je mange la moindre chose. Je me contente donc de prendre mon chocolat chaud en silence.

Mes parents me laissent le temps d'aller mettre mes sacs dans la voiture et lorsqu'ils reviennent, c'est le départ. J'attrape mon sac à dos et le lance sur mon épaule, donne une énième caresse à mon chien, il n'est pas fou le bougre, il a très bien compris ce qu'il se passe. Il sait que les valises signifient un départ et il doit sentir mon stress puisqu'il me colle depuis que je suis debout.

«Je reviens vite d'accord. Tu n'as pas intérêt à m'oublier!» Je lui murmure à l'oreille, accroupie près de lui en le gratifiant d'une dernière grattouille sur la tête avant de me lever.

Je regarde ma maison le cœur serré en fermant à double tour la porte d'entrée puis je monte vite dans la voiture de mon père pour ne pas finir trempée.

« Tu n'as rien oublié?» M'interroge mon père en se tournant vers moi tandis que je mets ma ceinture.

«Non, on peut y aller.» Je réponds et lui offre un petit sourire pour le rassurer mais je me doute que mon sourire ressemble plus à une grimace.

«4h20, nous sommes dans les temps.» Dis ma mère en enclenchant le GPS.

Mon père démarre la voiture et j'appuie ma tête contre la vitre en fermant les yeux, espérant que tout ça n'est que l'esprit de mon imagination.

Le Lac GeléOù les histoires vivent. Découvrez maintenant