Dans le moule

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L'agitation est reine au château de Lorette aujourd'hui. Le réveillon de Noël arrive à grands pas et les invités les plus attendus sont les Manneles, petites créatures mi-homme mi-biscuit.

Le pâtissier est très fier de sa fournée. Tous ses gâteaux sont très beaux et appétissants. Seul, un, le déçoit. Il n'était pas bien placé dans le moule et il lui manque une jambe. L'homme est prêt à le jeter mais une voix fluette se fait entendre.

— S'il vous plaît Monsieur, ne me jetez pas! Laissez-moi aller à la fête !

— Personne ne va vouloir de toi, tu es trop bizarre.

— Laissez-moi une chance s'il vous plaît, imaginez si une personne a faim car il lui manque un Mannele !

Cet argument semble toucher le pâtissier. Il s'en voudrait si quelqu'un ne mangeait pas suffisamment. Il change donc d'avis et met le biscuit dans une belle boîte avec ses frères.

— Il n'aurait jamais dû te mettre avec nous.

Un Mannele magnifique regarde notre ami unijambiste avec dédain.

— Pourquoi me dis-tu ça ?

— Car tu n'as aucune chance de réussir à être mangé. Nous sommes très beaux car nous sommes parfaits. Nous n'avons aucun défaut ce qui nous rend appétissants. Les Manneles sont fait pour être savouré, mais toi tu ne réussiras jamais car personne ne te regardera.

— Je n'ai pas besoin d'être entier pour être attirant. Je réussirais à régaler les habitants du château même si je ne suis pas parfaitement rentré dans le moule !

De méchants rires se font entendre ce qui attriste notre petit biscuit. Son frère a raison d'être sûr de lui, il est très beau. Sa peau à lui est magnifiquement dorée, sa tête parfaitement ronde et il ne lui manque rien. Pas comme notre petit ami. Mal positionné dans son moule, en plus de sa jambe manquante il a mal cuit. Sa peau est donc plus foncée que celle des autres. Mais il ne se décourage pas. Les autres sont cruels mais ça ne veut pas dire qu'ils ont raison. Il est possible que la sur-cuisson lui donne un meilleur goût. Personne n'a jamais essayé, donc peut-être que grâce à lui on va le découvrir.

La lumière vient l'éblouir. Il est enfin arrivé dans la salle de réception. Le pâtissier le prend et le dépose délicatement sur un beau plat.

— Pour t'aider à être mangé je vais cacher ta différence. Comme ça tu auras toutes tes chances.

Il le place alors sous un autre pour faire en sorte que l'on ne voit pas son infirmité. Notre biscuit ne sait pas s'il est content de cette décision. Même si c'était pour l'aider, en voulant cacher sa jambe manquante et sa peau foncée il l'a caché entièrement. Il va donc devoir attendre que le gâteau qui est sur lui soit mangé pour enfin être visible.

— Oh mais que vous êtes beaux messieurs ! Je vais te dévorer toi, allez hop !

Le mannele dédaigneux est choisi et avant de partir il décide d'adresser un dernier message à son frère.

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