Parle sans mots

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- Je pense à arrêter mes études actuellement, annonça-t-elle.

Ce n'était pas ça qu'elle voulait dire au départ, et puis elle n'avait jamais pensé à une telle chose. Mais, c'était comme si, inconsciemment, c'était la bonne phrase à dire.

Il la regarda, la toisa, pour savoir si elle se jouait de lui. Elle eut peur de se prendre un tas de reproches. Puis, il sourit.

- J'ai toujours eu le sentiment que tu t'embarquais dans la mauvaise branche.

La réponse inattendue que livra son frère la fit reculer et elle le fixa avec une méfiance mais aussi un certain soulagement.

- Quoi ? » rétorqua-t-elle, « tu penses que c'est une bonne idée ?

- A toi de voir ! » lança-t-il avant de disparaitre dans la salle à manger et apporter le deuxième dessert.

Ollie resta bloquée devant le placard, entendant les cris de joie de sa famille à la vue de la nourriture.

Ce n'était pas une décision qu'elle avait évoquée, elle n'y pensait même pas sérieusement. Qu'allait-elle faire d'autre ? Elle était dans une voie sécuritaire, qui pouvait l'emmener... Tout s'arrêta. Depuis longtemps, elle se surprit à vraiment se questionner sur son métier futur. Ces études l'emmènerait-elle vers sa destinée ? Vers ce qu'elle aimait ?

La jeune femme n'eut pas le temps de se questionner plus, car Ales était de retour.

- J'ai trouvé quelqu'un, elle s'appelle Tabata.

Il parla d'une voix enjouée, semblant heureux d'annoncer cette nouvelle à sa sœur. Son interlocutrice fut surprise mais sauta de joie. Elle encercla rapidement Ales et commença à lui poser tout un tas de questions.

- Wow Wow, je vais te répondre mais plus tard, il y a une bûche aux chocolats qui nous attend »

L'ouverture des cadeaux se fit pendant le dessert, la tradition qu'ils avaient gardée depuis que les enfants étaient petits pour ne pas qu'ils se couchent trop tard. Au pied du sapin allumé, des paquets multicolores attendaient d'être ouverts. Ollie fut très contente de son gros cadeau, le petit appareil photo qu'elle voulait, transportable et pratique.

Elle prit pour sa première photo la famille au complet et en fut très satisfaite.

- Alors, Tabata ? » relança Ollie à son frère, une fois que toute la génération d'au-dessus se soit installée dans le salon pour discuter.

Ils se retrouvaient seuls dans la salle à manger, la table non débarrassée. Les assiettes sales s'empilaient et les bougies, maintenant éteintes, avaient fondues. Les décorations, telles que les petits confettis dorés en forme de sapin de Noël, étaient éparpillés partout, et ils se dirent que même en nettoyant de fond en comble, ils en retrouveraient dans quatre mois.

- Je l'ai rencontrée il y a un an maintenant. On sort ensemble depuis bientôt six mois et on réfléchit même à emménager ensemble.

- Elle fait médecine elle aussi ?

- Non, elle est dans le social.

- Pourquoi tu disais que t'as beaucoup changé ? T'as eu d'autres copines avant elle et je ne me rappelle pas qu'elles t'aient changé. »

Ce dernier eut un sourire en coin, s'occupant de rassembler ces confettis en un même coin de table.

- Peut-être parce que c'est la bonne » dit-il dans un clin d'œil.

Ollie rigola.

- Elle est spéciale cette fille, elle me fait me rendre compte de la vie.

Sa sœur fronça les sourcils à cette parole.

- Tu serais devenu philosophe ?

- Ah non, me parle pas de cette matière s'il te plait, reviens dans quatre-cinq ans peut-être que j'aurais digéré.

Le ton faussement blessé qu'il avait pris les fit éclater de rire. En cette année de terminale, Ales avait eu une mauvaise relation avec le prof de philosophie, qui avait décidé de s'acharner contre lui. D'ailleurs, un moment en particulier était resté gravé dans sa mémoire.

- Qu'est-ce qu'elle a de si spéciale, cette Tabata ?

- Elle m'apprend à parler sans les mots.

A cette phrase, Ollie se recula, surprise que tant de poésie sorte de sa bouche.

- Ça c'est très romantique.

- Ah mais au sens figuré comme au sens littéral du terme » poursuivit-il, fier qu'elle soit tombée dans le panneau, « Tabata est sourde ».

Ollie enchainait les surprises avec son frère ce soir et elle en fut de plus en plus contente.

- T'apprend la langue des signes alors ?

Il hocha la tête. Puis lui signa une phrase en lui faisant la traduction orale. Il se débrouillait bien et ses gestes étaient très fluides.

- Alors, si vous restez ensemble, va falloir que je m'y mette aussi, s'enthousiasma-t-elle quand il eut fini.

La poursuite d'une vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant