Chapitre 15 : All Eyes On Me

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« Partez devant, nous vous rejoindrons. Au fait, on se rend chez Ahmed à pied. Le soleil brille enfin depuis une semaine et je suis bien motivée pour en profiter. Nous manquons cruellement de vitamine D. », informa Tonia à Rayan, Paul, Sayyid, Aboubakr, Laïs et Sabri en enfilant ses baskets.

Ils étaient réunis comme à leur habitude à la colocation mais se préparaient à fêter la pendaison de crémaillère chez Ahmed et son épouse. Tous avaient passé la majeure partie de la matinée à préparer les boissons souhaitées par les jeunes mariés. Ils s'étaient ainsi relayés dans la confection de jus frais pressés, cocktails sans et avec alcool et toutes sortes de thés aromatisés et sucrés. Puis, Tonia et Sabri les avaient délicatement calés dans plusieurs sacs et ne manquèrent pas de frôler leurs doigts à plusieurs reprises avec des regards complices et intimes.

Sabri repensa soudainement à la réflexion de Tonia. Il était vrai qu'un temps orageux et donc empli de chaleur étouffait les Français mais respiraient de nouveau grâce au ciel bleu laissant passer un vent agréable qui soulageait les corps. Celui de Tonia était prêt à exploser d'une énergie impatiente puisqu'elle avait repensé délicieusement à la déclaration de Sabri. Il réalisait des effort et elle devait bien lui prouver son amour, affection et attachement en retour. Elle se sentait prête.

« J'en suis sûr que la femme d'Ahmed va nous révéler qu'elle attend son enfant avec cette phrase d'introduction : Tous les yeux sur moi un instant s'il-vous-plaît. ». Sayyid imita si fidèlement l'accent et les mimiques de la jeune mariée que Tonia, Rayan, Paul, Aboubakr, Laïs et Sabri rirent. Sayyid était un excellent acteur et ne se moquait pas de ses personnages. Aboubakr l'aida d'ailleurs en portant l'autre hanse, Rayan et Paul les suivirent tout autant chargés et Laïs tendait son cou à cause du service fragile qu'il tenait d'une concentration remarquable. Le club des cinq descendirent les escaliers avec une discrétion qui ne vaudrait jamais celle de Tonia.

Elle fouillait les poches à la recherche de ses clés qu'elle trouva sans surprise une seconde plus tard. Sabri la frôla intentionnellement et appuya son épaule droite contre l'encadrement extérieur de la porte et la regarda d'une attention toute particulière... Puis, il afficha une mine boudeuse qui quémandait surtout une intention personnelle mais Tonia resta impassible, quoiqu'elle lui sourit avec malice. Ses yeux traduisaient « Si tu croyais que je ne remarquerai rien Sabri, tu te trompais. ». Sabri était l'homme le plus heureux du monde parce qu'il aimait et notamment se savait chéri. Il se retenait alors à sauter sur chaque marche et courir afin de se défouler. Il ressemblait à ces hommes amoureux dans les romans que Tonia lisait. Elle et lui pensaient beaucoup et marchèrent dans un silence apaisé. L'envie de lui serrer la main était puissante chez Sabri. Or, il reconnaissait aussi que Tonia devait encore accomplir une dernière action avant que leur relation ne soit officielle.

« Tu ne ressembles en rien au garçon d'il y a des mois et n'étant accablé de mauvaises rumeurs. Je les ai tout de suite détestées car elles ne reflétaient pas l'image du jeune homme que j'ai commencé à connaître pour la première fois dans mon salon. Tu m'as regardé d'une telle profondeur Sabri... Ma peau en est parcourue de frissons à te l'avouer. Je n'ai pas depuis retrouvé chez quiconque d'autre l'expression inimitable et extraordinaire de tes yeux. Tu as immédiatement aimé Tonia et non la jeune femme française de vingt-trois ans aux origines corses et algériennes, diplômée de Saint-Cyr et officier chez les Pompiers de Paris. Tu m'as prouvé en une seconde que les histoires qui se déroulent dans la rue ne sont pas les plus véridiques. J'ai su que tu ne pouvais être qu'un homme totalement différent de celui décrit dans les conflits que tes ennemis t'apprêtent. L'amour, le respect et l'admiration que tu diffusais me prouvaient que je devais toujours suivre mon instinct et pour la première fois mes sentiments. Tu sais que je les cache non par un orgueil que certains m'octroient mais pour me protéger. Sauf que je n'ai plus rien à craindre aujourd'hui avec toi Sabri. Je t'aime. ». Les larmes restaient miraculeusement aux bords des paupières de Tonia. Elle avait débité cet aveu sans suffoquer, en ne réfléchissant pas une seule fois au choix de ses mots.

Sabri la dévisagea avec une telle passion que le rythme de son cœur s'accéléra dans son torse. Tonia brisa le dernier pas qui les séparait. Elle entoura lentement de ses mains le visage de Sabri et ils se penchèrent en même temps.

L'explosion d'émotions, de sensations et saveurs se dispersèrent à une telle vitesse dans les corps de Tonia et Sabri qu'ils durent s'étreindre fortement à la fin de ce baiser si attendu et donc savoureux. Ils se fixèrent comme si ces amoureux étaient les seuls ou peut-être les derniers à exister sur Terre. Les inséparables collèrent rapidement leur front et rigolèrent d'une seule voix.

« On remonte ? », demanda Tonia à Sabri pendant que leurs doigts s'entrecroisaient d'un délice unique. Il lui répondit sans plus attendre par un baiser qu'il savoura plus que le précédent mais pas moins que le prochain. « Au fait Sabri ! », l'interpella-t-elle alors que lui était déjà parti en direction de leur bâtiment. Il se replaça devant elle et attendit la fin de son monologue. « Les T'as vu et Tu vois ce que je veux dire ? sont les seuls détails que je te conseille de travailler avant que nous officialisons tout cela. », conclu-t-elle avec une taquinerie que jamais personne ne lui égalerait.

Tonia et Sabri utilisèrent l'ascenseur. Ils s'embrassèrent d'une fougue et frénésie éclatant enfin. Ils ne laissèrent néanmoins rien paraître dans les couloirs même si ces derniers étaient vides de toute occupation. Elle ne put s'empêcher de retenir un fou-rire tandis qu'elle essayait avec difficulté d'ouvrir la porte. Ils s'engouffrèrent enfin dans l'appartement et... La suite n'appartenait qu'à eux.

Le monde te mérite - PNL (Bené)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant