Parle moi des fleurs - Tome 1

4 - Narcisse

Je m'effondre sur mon canapé et lâche un lourd soupire. Une douce boule de poile vient se frotter gentiment contre ma main et je me redresse. Entremêlant doucement mes doigts au  pelage de Garfield, celui-ci se met à ronronner. Il est vrai que j'aurai pu trouver plus original pour un chat, roux et plutôt gros que Garfield mais ce prénom m'avait semblé une évidence. Mon félin préféré vient se poser sur mon ventre, roulé en boule, son visage disparaissant presque, camoufler par toute sa fourrure. Je soupire une nouvelle fois et dépose ma tête sur le dossier de mon sofa. Je ferme les yeux, exténuée. La journée n'a pourtant pas été des plus pénible mais les récents évènements limitent considérablement mes heures de sommeil et je me fatigue donc rapidement. Sans contrôler le fil de mes pensées, le visage du dénommé Marcus me revient en mémoire. Cette rencontre était vraiment des plus étranges. Je secoue ma tête, m'interdisant d'être ce genre de fille : fantasmant sur un bel étranger et ayant pour espoir de le recroiser. Si Joyce était au courant elle n'aurait pas encore finit de m'en parler...

Garfield miaule de mécontentement quand je le décale pour pouvoir me lever. Je m'approche des fleurs qui habillent subtilement mon appartement. J'en arrose certaine et en contemple d'autres. Les deux étagères garnies de livres sur la gauche de mon canapé abritent un aeschynanthus, un tradescantia  et un ceropegia woodii, trois magnifiques plantes qui dégringoles littéralement de mes étagères. Sur ma table de salle à manger, qui me sert également de table basse, est joliment disposé une vase d'où déborde des cyclamens tandis que dans le coin opposé, sur une petite table à trois pieds design, est placé un pot d'azalées.

Ma mère adorait l'ambiance dans mon appartement, qu'elle trouvait très " cocooning ". Je me souviens que s'était d'ailleurs elle qui m'avait aidé à choisir mes premières plantes et fleurs pour décorer mon appart. Bien que celui-ci ne soit pas très grand, je m'y sens parfaitement à l'aise. Je me dirige vers ma cuisine et me prépare rapidement un sandwich, n'ayant pas la moindre envie de cuisiner. Je sers également son repas à Garfield qui s'empresse de délaisser le canapé pour rejoindre sa gamelle, ce qui me fais sourire. Finalement, je reprends place sur mon bien aimé sofa et allume la télé. Je cherche pendant un temps un film léger sur Netflix puis débute mon repas.

C'est la sonnerie de me téléphone qui me réveille en sursaut. Je mets quelques secondes à comprendre que je me suis endormie devant la télévision. Je m'empresse de saisir mon téléphone et me redresse.

- Allo ? dis-je la voix un peu éraillée.

- Bonsoir, ma puce. Tu dormais ? s'étonne mon père à l'autre bout du fil.

- Ouais. Je me suis endormie devant les aventures de Marty McFly. rigolé-je en jetant un oeil à mon téléviseur.

J'entends le rire grave de mon père et celui-ci à le pouvoir de me réconforter. Après les évènements de ces derniers jours, ce coup de téléphone me fait le plus grand bien.

- Ce n'est pas étonnent, après avoir vu dix fois le film tu commences à le connaitre.

Je souris à sa réplique. C'est mon père qui m'a initiée aux classiques du cinéma. Il me serait d'ailleurs impossible de compter le nombre de samedi soir passé sur notre grand canapé d'angle devant tous les chef-oeuvres cinématographiques tandis que ma mère rouspétait en nous ordonnant d'arrêter de nous gaver de pop-corn.

Ce beau souvenir me fait légèrement monter les larmes aux yeux.

- Comment vas-tu, papa ? Et comment va Mélina ?

Mélina étant la femme qui partage sa vie depuis pratiquement dix ans.

- Bien, bien, Mélina va bien. Et moi aussi.

Un petit silence se fait durant lequel mes yeux fixent le Dr. Emmett Brown suspendu à l'hôtel de ville de Hill Valley.

- Et toi, ma puce, comment tu vas ? reprends mon père d'un ton monotone.

Je songe un instant à lui mentir en prétendant que tout va bien. Mais une petite voix intérieur m'en empêche, me murmurant que d'en parler me soulagera.

- Maman me manque. murmuré-je doucement en m'intéressant soudainement à mon tapis.

- Je sais, ma puce, je sais. Elle me manque aussi, terriblement.

Une larme solitaire glisse sur ma joue. Mon index se met à gratter le tissu de mon canapé, histoire d'occuper mes mains.

- Est-ce que... est-ce que tu as des nouvelles de ta soeur. me demande mon père d'un ton penné.

- Non, aucune. mentis-je.

Je me refuse à lui dire qu'elle n'est pas venue à l'enterrement de maman seulement parce qu'elle n'en avait pas envie. Cela lui ferait sans aucun doute plus mal que de n'avoir aucune de ses nouvelles.

- Bien. Je suppose, qu'elle préfère surmonter cette épreuve toute seule. essaye de se rassurer mon père d'une petite voix.

Tu parles, elle ne surmonte aucune épreuve. La mort de maman ne l'a nullement impacté. Son coeur de glace n'a aucun remord à n'être pas venu la voir avant de mourir. Violette n'en a décidément plus rien à faire de nous. Pourtant c'est le ton triste de mon père qui me blesse le plus dans cette histoire.