Parle moi des fleurs - Tome 1

13 - Fleur de Châtaignier

Mes cheveux trempés se lissent et viennent se coller contre mon crâne. La fraîcheur de l'eau qui me tombe dessus me fait le plus grand bien et aide mon corps à faire redescendre la chaleur accumulée due à ma course. Je me suis vraiment trop défoulée, j'ai même crue que je n'atteindrais pas mon appartement. Cela faisait bien longtemps que je n'avais pas couru ainsi.

Je coupe le jet d'eau et mes pieds rencontrent le carrelage froid. Je m'entoure le buste d'une serviette avant de m'éponger le visage avec. Ma main se plaque contre la glace accrochée au dessus de mon lavabo pour en enlever la fine pellicule de poussière. J'observe mon reflet, concentrée, comme si je découvrais mon visage pour la première fois. Quelques mèches trempées me glissent sur les côtés du visage avant que je ne les cale derrière mon oreille. Au rythme de Come Undone de Robbie Williams, je me dirige vers ma chambre, délaisse ma serviette sur mon lit et enfile un short de pyjama ainsi qu'un débardeur léger.

Mes cheveux humides coincés dans la serviette de bain, j'agite le linge pour les sécher le plus possible avant d'être interrompu par la sonnette. Je passe ma main dans ma chevelure encore mouillée pour lui donner un minimum forme avant de m'emparer de mon téléphone. Je n'ai aucun message non-lu m'indiquant la soudaine venu de qui que ce soit.

Je traverse mon petit appart' et me penche vers l'oeil de Judas une fois devant ma porte. Je distingue la carrure familière d'un homme, bien que celui-ci soit de dos. Mes doigts s'activent sur la chaine qui verrouille ma porte avant d'abaisser la poignet.

- Marcus ? le hélé-je, surprise.

A peine ais-je fini de prononcer son prénom que le jeune homme se jette sur mes lèvres. J'ouvre de grands yeux, abasourdie. Derrière moi, le refrain de Come Undone démarre et j'ai l'impression d'être dans un film, quand la musique s'actionne au parfait moment pour la scène romantique. 

Marcus referme la porte de mon appartement avec son pied. Ses mains qui jusque là encadraient ma mâchoire se posent sur mes hanches pour me rapprocher de son corps. Son baiser et fougueux et passionné mais il y a autre chose, je le sens.

Il est là pour me dire au revoir.

Cette réalité m'attriste plus que je ne l'aurai pensé. Pourtant je ne décide en aucun cas de l'interrompre et prolonge notre baiser. Nos lèvres se mouvent avec ardeur et détermination  : nous savons tous les deux ce que représente ce baiser. Mes mains agrippent sa chemise à hauteur de ses abdos et je la tire vers moi. Au même moment, mes dents se plantent doucement dans la peau de sa lèvre inférieur avant de la mordiller légèrement. Je veux qu'il reste près de moi.

Nous nous écartons pour reprendre notre respiration et le regard embrumé à la fois de désir et de tristesse de Marcus me sonde.

- Je suis le pire des égoïstes. murmure-t-il en cachant sa tête dans mon cou, comme honteux.

Son souffle chaud qui serpente dans ma nuque fait courir un frisson le long de mon corps. Je sens ses mains s'accrocher durement à mes reins.

- Je n'aurai pas du venir mais... je... je ne pouvais pas me résoudre à partir sans te revoir une  dernière fois.  sa voix se fait plus grave et je devine alors que Marcus modifie son timbre pour ne pas que qu'elle se brise de trop.

Sa confession me serre le coeur. Comment en est-on arrivé là ? Après tout on ne se connait que depuis peu. Alors pourquoi savoir qu'il part me fait si mal ? Il est peut-être vrai que j'ai projeté sur Marcus l'image de la bouée de sauvetage que j'attendais après la mort de ma mère, sauf que désormais cette bouée m'entraine encore plus vers le fond.

- Dis quelque chose, Rose. m'intime-t-il doucement.

Je lève ma main et entremêle mes doigts dans ses boucles brunes. A ce contacte, j'entends Marcus lâcher un soupir.