10 - Cyclamen

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Le plus surprenant est sûrement l'attention que porte Marcus à mes paroles. Je dois avouer que lorsqu'il m'a demandé de lui parler de fleurs pour lui changer les idées, je pensais qu'il aimerait simplement entendre un bruit de fond et ne pas être tout seul mais non, le jeune homme semble réellement intéressé. Il n'arrête d'ailleurs pas de me poser des questions, ce que je ne peux m'empêcher de trouver adorable.

- Je trouve qu'il n'y a rien de plus beau que d'écouter quelqu'un te parler de sa passion. me sourit le brun.

Je lui rends son sourire avant d'enfoncer mes mains dans mes poches. Je vais finir par culpabiliser de laisser autant Claire tenir la boutique, je fais décidément une bien piètre patronne. Tout ça pour me retrouver à batifoler avec un beau gosse sur un parking.

- D'où te vient cette passion pour les fleurs ?

Une vague d'émotions me saisit les tripes mais je refoule toute trace de tristesse et affiche un petit sourire.

- C'est ma mère. Elle en était elle-même une fan incontestée.

- Ca avait l'air d'être une femme géniale, ta mère.

Mon regard se pose sur Marcus. Je le remercie silencieusement pour la tendresse dont il fait preuve à mon égard.

- En effet, affirmé-je, elle l'était.

Le jeune homme sort une sucette de sa poche, se débarrasse de l'emballage fushia avant de la coincer entre ses lèvres. Comme toujours il m'en propose une, que je refuse poliment. Je le sens désormais beaucoup plus calme qu'il y a quelques minutes. D'une certaine façon, penser que c'est ma présence qu'il l'a apaisée me réjouie. Non, mais depuis quand je résonne comme ça ?!

- A quoi tu penses ? me demande Marcus en me voyant froncer les sourcils.

- A rien ! assuré-je beaucoup trop rapidement pour ne pas paraitre suspecte.

Le jeune homme éclate de rire avant de poser sur moi un regard soupçonneux.

- Tu es sûr de ne pas vouloir me parler de ce qu'il s'est passé ce matin ? Je ne te force pas, mais ça te ferait sans doute du bien.

Marcus me jette un coup d'oeil interrogateur et je me demande alors si j'ai bien fait de lui dire ça. Il s'humecte les lèvres avant de passer son index sur ses paupières tout en soupirant, d'un air las.

- Mon père veut que je reprenne les rênes de son entreprise.

Je penche ma tête sur le côté, ne voyant pas vraiment où est le mal dans cette histoire.

- Sauf que je n'en ai pas la moindre envie. C'est son boulot qui a foutu notre de vie de famille en l'air. Il n'était jamais présent à la maison, ni pour moi, ni pour ma mère qui s'est mise à boire pour combler le manque affectif de mon paternel. Et maintenant, cet enflure se pavane comme si il n'avait rien gâcher et que toute cette situation, qui dure depuis des années, était normale. Sans parler, qu'il me demande de lui succéder.

Sa mâchoire et ses poings se sont crispés. J'imagine parfaitement à quel point son enfance a due être compliquée, à quel point il a du se sentir seul et impuissant en voyant son père les abandonner et sa mère sombrer dans l'alcool sans qu'il ne puisse rien faire.

- Pourquoi reste-tu aux côtés de ton père ? osé-je demander d'une petite voix.

Marcus inspire un grand coup pour se donner le courage de me répondre.

- Mon grand-père a été la seul personne réellement présente pour moi quand j'étais gosse, je l'adorais plus que tout mais il est décédé il y a trois ans. Il m'a fait promettre d'aider ma mère, de la protéger. Alors ça fait deux ans, que je subie la présence de mon connard de père, que j'encaisse ses remarques dures et ses réflexions glaciales. Il m'apprend les ficelles du boulot de cadres en entreprise. Je comptais terminer cette formation et postuler par la suite dans une boîte, pour pouvoir aider ma mère financièrement afin qu'elle ne soit plus obliger de vivre aux crochés de mon père. Jamais de n'aurai imaginer qu'il me propose de prendre les rênes de l'entreprise.

Je laisse passer quelques secondes avant de lui demander :

- Tu comptes accepter ?

Il hausse les épaules. Je sens qu'il est perdu. Ca a l'air tellement dur pour lui, d'encaisser tout ça sans broncher. Je n'imagine même pas une seconde être à sa place. Il faut un mental d'acier pour supporter ce quotidien avec l'espoir que, dans seulement quelques années, tout s'arrange.

- Je ne sais pas. Si j'accepte, je sais que j'aurai mon père sur le dos encore un bon bout de temps mais en revanche je n'aurai pas à attendre des années pour obtenir un poste qui me rapporte assez pour protéger ma mère niveau argent.

Je n'en reviens pas. Marcus est prêt à faire tant d'effort pour sa mère quitte à mettre en péril des années et des années de sa vie de jeune adulte. Je trouve cela incroyablement triste mais également extrêmement généreux. Il devait être fou de son grand-père maternel pour être prêt a tenir cette promesse coûte que coûte.

- Tu es un fils incroyable. dis-je en posant mon regard sur son imposante carrure.

Il retire la sucette de sa bouche et s'esclaffe avant de se tourner vers moi.

- Je crois que si tu disais ça à mon père il te répondrait que tu as tout faux et que je ne suis rien d'autre qu'un incapable.

Je m'avance de quelques pas avant de lui répondre d'une voix douce et sincère :

- Eh bien moi je te dis que tu es l'une des personnes les plus courageuses et bienveillantes que j'ai pu rencontrer.

Sur ce, je me donne un peu de hauteur en me glissant sur la pointe des pieds et pose mes lèvres sur les siennes. La différence de température entre nos bouches est la première chose que je remarque, la mienne est froide tandis que celle de Marcus dégage une chaleur des plus agréables. Je me recule légèrement, me demandant si il était réellement approprié de me jeter sur lui comme ça.

Son regard me sonde intensément puis il attrape ma taille pour me rapprocher de son corps, nos regards s'accrochent. Il pose sa main droite sur ma mâchoire et vient à son tour faire rencontrer nos lèvres. Mes bras s'enroulent autour de sa nuque et je me laisse aller à cette étreinte chaude et apaisante. Je crois que tout à disparu autour de nous. Il ne reste plus que lui et moi, sa main sur ma taille et l'autre sur le contour de mon visage, les miennes jouant dans ses cheveux et nos bouches partageant une danse passionnée. Nos langues se rencontre timidement avant de s'apprivoiser l'une l'autre. Ce baiser à le parfum des fleurs et le goût de sucette à la fraise.

Parle moi des fleurs - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant