13. Évasion

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Jim m'a donné dix minutes : dix minutes pour me casser de cet endroit, pas une de plus... mouais. Ça, c'est lui qui le dit : 1ère règle, ne pas faire confiance. Jamais, à personne. Devinez qui m'a appris ça ?! On va plutôt dire que j'ai cinq minutes. Vaudrait mieux éviter qu'il débarque en plein milieu de mon évasion, hein ?!

Je me débarrasse assez rapidement de mon T-shirt et de mon jean recouvert de peinture séchée, j'ouvre mon armoire et j'en tire une combinaison : LA combinaison, devrais-je dire. C'est la tenue la plus classique, les parisiens en changent tous les trois mois en suivant les tendances... avec ça, je devrai passer inaperçue. Ce n'est pas le dernier modèle, bien sûr mais ça fera l'affaire.

Selon mes plans, il ne me reste plus que trois minutes : je suis dans les temps. J'utilise une minute entière pour retirer quelques vêtements de mon sac et j'en rajoute d'autres histoire de changer un peu.

Mes éternels sweat-shirts troqués contre une combinaison du printemps dernier, mon sac sur une épaule... je ne me ressemble presque plus, c'est cool. J'enfile quand même un sweat-shirt parce que je me sens vulnérable quand je n'ai pas de capuche pour cacher mon visage et je retire une latte du plancher.

Vous vous souvenez quand j'ai dis à Jim qu'il n'y a qu'une seule sortie dans cet appartement ? J'ai menti : il y a une seule porte qui mène au palier, c'est vrai... mais il se trouve que j'ai les meilleurs voisins de l'univers : un mur adjacent à ma chambre, ils ne sont JAMAIS là et me permettent de filer en douce depuis que j'ai percé une ouverture me permetant de me faufiler chez eux sans laisser la moindre trace, je cache dans mon plancher un levier et le tournevis taillé sur-mesure pour passer de l'autre côté.

... ok, je l'admet : avoir été élevée par Walter Atkins n'a pas QUE des mauvais côtés. Si j'avais grandi dans un foyer normal, j'aurai sans doute jamais défoncé un mur de ma chambre pour accéder à l'appart des voisins en soulevant mon tableau noir. Vous pouvez réfléchir à la moralité de mes actions si ça vous fait plaisir, ça ne m'a jamais posé le moindre soucis et je ne vais pas commencer à ruminer ce soir.

Je décale mon tableau, j'insère mon tournevis comme une clef dans le système que j'ai bricolé moi-même et un soubresaut dévoile l'ouverture : je n'ai plus qu'à me glisser de l'autre côté et l'élastique va remettre le tableau en place.

"Ça caille..." je grogne.

Ici, y'a jamais de chauffage parce qu'ils ont arrêté de payer l'électricité d'aussi loin que je me souvienne. Alors ouais, va falloir plisser un peu les yeux pour ne pas heurter les murs mais je connais cet endroit par cœur : cet appartement est construit sur le même modèle que le nôtre, ma chambre en moins.

Il n'y a pas le moindre effet personnel : les placards sont vides, aucun tableau aux murs, c'est comme si personne n'avait jamais fichu les pieds ici. À part... ce pousse-bébé, dans un coin, une pile de couches fraîchement lavée depuis des années, cherchez l'ironie et un biberon encore plein posé à même le sol. Je n'ai jamais osé y toucher, c'est pas à moi.

J'sais pas trop quoi en penser : on dirait que les propriétaires ont fuit, à peine arrivés ici et ça ne m'étonnerait pas qu'ils aient une altération. Ça expliquerait tout : la loi anti-alter est votée, ils emménagent ici pour échapper à leur passé mais pas de bol, Walter et Jessica Atkins achètent l'appartement d'à côté. Ils fuient... et continuent de payer le loyer pour une raison qui m'échappe et qui me permet de m'échapper donc on s'en fiche, hein ?!

J'ouvre leur porte d'entrée, le système de sécurité permet de sortir de n'importe quel appartement fermé à clef... ça m'arrange bien, je n'ai jamais eu besoin de trafiquer la porte ici. Trop facile.

Yellow FoxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant