Last Piece ✽ seungjinbin

✿ seventh piece

Cela faisait un peu plus de trois semaines que la vérité avait éclaté au grand jour et pourtant, ni Changbin, ni Hyunjin n’avaient réussi à digérer les faits. Passer outre cet incident n’était pas une tâche facile, ils ne pouvaient pas oublier tout ça en un claquement de doigts et continuer comme si de rien n’était. C’était difficile d’accepter qu’ils avaient chacun fauté à leur manière en ayant été distrait par un autre garçon. C’était même plutôt douloureux, et ils ne pouvaient pas s’empêcher d’éprouver des émotions désagréables qui n’étaient pourtant pas justifiées. Ils n’avaient pas le droit d’être rancuniers, au fond ils ne pouvaient même pas se reprocher l’un à l’autre ce qu’ils avaient fait puisqu’il s’agissait sensiblement de la même chose.

Alors ils auraient dû contenir leur colère, se calmer chacun de leur côté et amorcer la conversation, comme des adultes matures et responsables. Oui, ils auraient dû. Mais avec leur caractère respectif, ce n’était pas une mince affaire… La communication était rompue, la situation s’avérait donc plus que compliquée.

Changbin qui était plutôt du genre à éclater s'était étrangement replié sur lui-même. Il passait la plupart de ses soirées enfermé dans son salon de tatouage afin de rester le moins possible dans leur appartement et il gardait la bouche obstinément fermée en présence de son petit ami, se contentant de bruits de gorge et de signes de tête pour se faire comprendre. Cette prise de parti ne plaisait absolument pas à Hyunjin qui avait horreur qu’il lui réponde de cette manière. De son côté, ça avait été les montagnes russes, il avait passé les premiers jours à se morfondre sur leur sort, abattu de ne plus avoir l’exclusivité dans le cœur de son aîné. Ce n’était pas quelque chose qu’il arrivait à cautionner, de ne plus être le seul, de ne plus l’avoir pour lui tout entier. Alors au fil des jours, c’était la colère qui avait pris l’ascendant. Être en colère était beaucoup moins épuisant que d’être triste. Et se venger sur Changbin, ça soulageait bien plus que de pleurer.

Les muscles tout engourdis, Hyunjin se leva de son lit et la fraîcheur de l’air le fit frissonner. Il ne portait qu’un boxer et un long t-shirt blanc qui cachait à peine le haut de ses cuisses. Il avait encore une fois dormi seul dans leur chambre. Changbin avait fini par élire domicile dans le petit bureau qui abritait un clic-clac, absolument pas confortable, mais moins étroit que le canapé du salon. De toute façon, il passait la moitié de sa nuit dans son studio donc ce n'était pas dérangeant. Enfin, c'était ce que se disait Hyunjin, si Changbin voulait avoir le dos cassé, c'était son problème. Ce n'était pas lui qui l'avait chassé de leurs draps.

Un bâillement déforma sa bouche et il se décida à sortir de la chambre pour rejoindre le couloir. Il ne lui fallut pas longtemps pour apercevoir la lumière qui provenait des toilettes ; la porte n'était pas tout à fait fermée. Sans y prêter plus attention, il passa devant et ouvrit la cloison coulissante qui séparait le corridor du salon. Kkami lui sauta aussitôt dessus, la queue battante, alors qu'il poussait des petits geignements surexcités comme s'il n'avait plus vu son maître depuis des mois.

Hyunjin ne put s'empêcher de sourire en lui grattant le museau. Il s'apprêtait à refermer derrière lui comme il en avait l'habitude, mais une idée lui traversa l'esprit. Il se figea. Son regard jongla entre son chien surexcité et sa main toujours posée sur la poignée. Il se mordit la lèvre. Vu comment son petit ami l'ignorait, lui rappeler qu'il n'était pas seul dans leur logement ne lui ferait sans doute pas de mal...

– Tu veux aller voir Binnie ? s'adressa-t-il à Kkami en prenant une voix plus aiguë. Hein ? Tu veux le voir ?

La boule de poil s'agita davantage, couinant de plus en plus face au ton que son maître employait.

– Allez vas-y !

Hyunjin tira sur la porte coulissante et il n'en fallut pas plus à Kkami qui se jeta à corps perdu dans le couloir pour se diriger vers la seule pièce qui n'était pas plongée dans l'obscurité. Et les premières exclamations ne tardèrent pas à se faire entendre :