Chapitre 7

1 0 0
                                    


A ma sortie d’hôpital, mon état mental demeurait au plus bas. Ma mère était venue me rendre visite et décida de passer un séjour auprès de moi. J'effectuais mon activité d’avocate à distance. Mr Delalande avait jugé préférable que je reste productive dans un lieu de travail serein et calme. Ainsi mes journées s’étaient peu à peu transformer en une nouvelle routine, moins attrayante. Je déprimais, perdue dans cette vaste vague d’incompréhension, qui me tiraillait chaque matin lorsque je me levais. Mes cauchemars avaient cessé. La présence de ma mère me rassurait, mais cela ne m’empêchait pas de rester éveillée de longues heures durant la nuit.
Un beau matin ensoleillé alors que je somnolais devant mon écran d’ordinateur, ma mère vint frapper à ma porte de chambre. Je me redressai, encore étendue dans mes draps.
« -Oui entre. »
Elle s’exécuta et tira d’un geste sec les rideaux entourant ma fenêtre du premier étage, laissant apparaitre le faisceau lumineux du jour.
« -Que dirais-tu, d’aller faire un petit tour ? »
Décelant mon hésitation, elle ajouta.
« Ça fait des semaines que tu n’es pas sortie, ça te ferait du bien de voir du monde. Et de te ressourcer en vitamine D.
« -Mmmh...grommelai-je. Je vais me préparer, dis-je à contrecœur. »
Pour un dimanche matin comme celui-ci, les enfants étaient de sortie. Jouant dans leur jardin, à confectionner des bonhommes de neiges, igloos ou d’autres jeux hivernaux, je les observais tout en me promenant aux bras de ma mère.
Notre petit village regorgeait d’artifices historiques et de parcs naturels et protégés. Il était le symbole incarné de cette culture régionale. Ma mère nous emmena dans un endroit sacré qu’il lui était cher. La petite Chapelle St Clair paradait le Rhône. Sur sa colline enchantée, bordant une falaise vertigineuse, entourée d’étendue foret, elle émanait une chaleureuse et conviviale ambiance. De plus, ses variétés florales arborant cet unique jardin botanique ne nous laissaient jamais indifférent. Ecureuil et grive musicienne aimaient se balader et être objet de tant d’attention pour les visiteurs. Les mésanges construisaient leur nid au gré des saisons dans ces forets immenses. Les lapins s’élançaient dans l’herbe fraiche, recouvrée par la neige pure et brillante. Même pour les accoutumés, cet endroit demeurait magique et sensationnel.
Je compris vite que ma mère souhaitait assister à la messe du dimanche. Sans me demander mon accord, elle m’entraina à la fontaine d’eau bénite. D’un signe de croix, elle me sacra en prononçant une prière inaudible. Ma mère m’avait toujours accordée une éducation religieuse. Sans le coté strict des couvents, nous nous rendions régulièrement à la messe et bénissions chacun de nos repas. Dieu demeurait pour nous une conviction plutôt qu’une croyance. Mais depuis que je me trouvais dans l’activité de la vie, j’avais délaissé toutes ces habitudes. Nous étions quelques habitants, debout, accueillants les paroles du prêtre. Les yeux clos, nous récitions de cœur un notre père. Ainsi qu’une prière adressée à notre sainte Marie. J'éprouvais alors une sensation curieuse de consolation. Avec les semaines passées, je ressentais enfin cette paix intérieure qui s’était échappée de mon cœur. Pour la première fois depuis longtemps, je pénétrais dans la sécurité absolue. Je penchais la tête vers ma mère, lui adressant un sourire plein de reconnaissance. Elle me caressa les cheveux, sans qu’un quelconque mot vienne s’immiscer dans cet apaisant moment, coupé du temps.
Sur le chemin du retour, nous nous étions attardées à contempler la nature. Plus enclin à la discussion, nous parlions de tout et de rien. C’est à partir de cet instant, que je me résolus à porter ma croix. Un cadeau de ma communion. J’avais cessé de la mettre durant mes longues années d’étude. Dorénavant, je la porterais et ne me laisserais plus entrainer dans des choses futiles et stupides.
_____________ 
Je n’eus aucunes nouvelles de Mr Anderson durant des semaines. Je me réfrénais à penser que cela m’était égale. Cependant à chaque image de lui qui se dessinait dans mon esprit, mon cœur rebondissait d’inquiétude et d’interrogation. Je n’ai jamais pu élucider le mystère qui se cachait derrière son âge inhumain. D’autant plus qu’il s’apparentait à un jeune adulte de vingt ans, loin de là à un retraité. Suite à sa dernière visite à l’hôpital, il m’avait laissé un message. C’était un document sur les pouvoirs psychiques de l’esprit. Je ne l’avais pas lu. Ces histoires me terrifiaient plus que tout alors je préférais ne pas les laisser s’adhérer dans ma vie. Cela dit, je ne pus m’empêcher de penser que l’inspecteur avait une telle ouverture d’esprit qui demeurait peu commune chez les personnalités de ce genre. Les policiers sont rarement branchés surnaturels. Tout comme moi par ailleurs. Ma vie put reprendre à nouveau un cours normal.
Mais un soir, alors que je m’apprêtais à éteindre les lumières, je vis une ombre par la fenêtre. Cet instant fut très bref mais me laissa de marbre. Une ombre noire, semblable à celle d’un homme, avait traversé le chemin de terre qui menait à l’entrée de mon immeuble. Elle avait subitement disparue, aussi vite qu’elle était apparue. Suite à cela, l’inspecteur m’avait laissé un dernier message avant qu’il s’éclipse à jamais. « Si un phénomène mystérieux se reproduit, peu importe de quoi il s’agit, n’hésitez pas. Je vous promets d’être l’épaule à confession. » Je suis restée silencieuse. Je songeai étrange et drôlement hasardeux qu’il m’envoie un tel message à l’instant même où je croyais percevoir un intrus dans mon quartier. C’est pour cela que j’avais coupé tout liens se nouant à lui. Je savais qu’au travers de tous ses non-dits, il en connaissait beaucoup plus qu’il ne voulut le faire paraitre. Tant de hasard peu espacé. Je n’étais pas si dupe. « Cet homme pensai-je, n’est pas un homme. »







LucideOù les histoires vivent. Découvrez maintenant