Jeudi 10 Décembre 1998

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Point De Vue de Christal 

Ce matin, je me suis rasée les cheveux. Moi qui ai toujours eu de très longs cheveux, je ne me reconnais plus. Mais au moins il ne pourra plus me les attraper. En plus de mes doigts qui me font encore un mal de chien, ma main gauche brûlée commence à peine à se remettre de la brulure. Ce matin, j'ai un bleu au visage, et même si je le cache comme je peux, j'ai
mal. Aujourd'hui j'enfile un simple jean et un pull, je n'ai plus la force de tenir la face. Je pars habiller mon Lucas, mon petit ange si innocent. Il a le regard de Marc, le regard qu'il a lorsque tout va bien. Il est blond, comme ma mère, et a les yeux marrons comme Marc et moi. Il est magnifique, un vrai ange. Et malgré le fait que je ne l'ai jamais voulu, il est -avec sa sœur- les deux personnes qui me permettent encore d'être en vie.
Lorsque je rentre dans la chambre d'Anaïs, elle est déjà toute prête, un nœud rouge dans les cheveux qui est assorti à sa robe.

-C'est ma photo de classe aujourd'hui maman, papa a acheté des croissants. -Mais ma princesse, tu vas avoir froid en robe !
-Non ! regarde j'ai mis des collant.

Comment lui résister ? Ma fille est ma bouée de sauvetage, elle est l'oxygène qui permet à mes poumons de respirer.
En rentrant dans le salon je vois cinq croissants bien dorés, elle avait en effet raison. En croisant le regard de Marc mes doigts se mettent à trembler, il arrive vers moi. En voyant ses épaules abattues et ses yeux remplis d'émotion, je comprends qu'il n'a pas bu.

-Excuse-moi, je ne sais pas ce qui m'a pris. Je ne recommencerais plus je te le promets, reste je t'en supplie j'ai besoin de toi.
-Comment je peux te faire confiance ? C'est tous les soirs Marc ! Tous les soirs ! Je ne peux plus supporter. Je suis fatiguée.

-Pense à nos enfants, à notre vie je t'en supplie.

Il a raison.

Et en me prenant dans ses bras, il me convainc qu'il changera qu'il continuera à m'aimer, qu'il arrêtera de boire. Et moi ? Je le crois. Enfin je pense. En partant ce matin au boulot je suis blessé mais sereine. Il ne recommencera pas m'a-t-il dit. Arrivée au bureau, je vois Romain déjà en plein travail.

-Salut ma jolie, bah t'as fait un tour chez le coiffeur ??
-Oui ! Tu aimes ?
-C'est différent mais tu restes très jolie. Tu restes toujours jolie.

Romain est attentif, il est doux et observateur. Et ce sont ses plus belles qualités. Bien sûr, il est très beau mais à côté du reste, ça beauté est complétement optionnelle.
Lorsque j'arrive devant mon ordinateur je vois une bonne cinquantaine de mail, deux retiennent mon attention. Un de Marc et l'autre d'Alejandro.

MARC : Bonjour mon amour, j'ai réservé une table au Palace pour ce soir, je laisse les enfants à ma mère. J'ai aussi pris rdv chez le médecin pour qu'il voit ton bleu au visage, il persiste je trouve. Je t'aime tant, M

ALEJANDRO FERNANDÉZ : Bonjour Christal, quelque chose ne va pas dans vos chiffres, pourrions-nous nous voir à 16heure ?

La gentillesse et l'amour de Marc me déstabilise mais me rend heureuse. Il a peut-être changé finalement. Quant à Alejandro, j'espère que ce n'est rien de grave. Le midi je pars manger avec mon assistant, on discute de beaucoup de chose, comme d'habitude. J'ai rarement autant échangé avec quelqu'un. J'apprends que, comme moi, il adore la montagne, le patin à glace et le ski. Ce qui me change beaucoup de Marc qui lui déteste ça. Il m'explique aussi qu'il aurait adoré avoir des enfants mais qu'il n'a malheureusement pas trouvé la femme qu'il fallait. Je trouve ça tellement triste que quelqu'un comme lui, d'aussi charmant autant physiquement que mentalement, soit seul. Lors de nos nombreux repas, je parle rarement de ma vie à moi, et il n'insiste jamais.

En rentrant à la maison, Marc nous a prévu une super soirée. Nous sommes allés au restaurant, ensuite nous nous sommes promenés avant de rentrer pour se coucher et regarder un film « il était une fois ».

Moi qui avais pensé petite que je serais soit une princesse soit dans un dessin animé, je déchante bien.

Point de Vue de Marc 

En me réveillant ce matin, je pleure. Comment ai-je pu devenir ce monstre-là ? Comment ai- je pu devenir cet homme violent ? Pourquoi la violence est la seule chose qui me permet de me sentir fort face à ma femme ?
Je suis parti chercher des croissants car je sais qu'elle adore ça et vu que la photo de classe de Naï est aujourd'hui, ce sera une belle journée. Depuis l'année dernière, nous avons vite compris à quel point cette journée est importante pour elle. Peut-être qu'elle fera mannequin, qui sait ? Quoi que non... Je suis sûr qu'elle fera des grandes études, elle a l'air d'adorer l'école. Je la vois, dans une petite robe bleue type marinière avec son nœud dans les cheveux assorti. Elle hurle de joie et me saute dans les bras. Je l'embrasse tendrement et lui dis de se dépêcher. Christal arrive à son tour, chauve. Les larmes me montent aux yeux et je me précipite près d'elle sauf qu'elle recule.

-Excuse-moi, je ne sais pas ce qui m'a pris je ne recommencerais plus je te le promets, reste je t'en supplie j'ai besoin de toi.
-Comment je peux te faire confiance ? C'est tous les soirs Marc ! Tous les soirs ! Je ne peux plus supporter. Je suis fatiguée.

Elle a raison, elle n'a absolument aucune raison d'avoir confiance en moi, mais je l'aime. Elle ne peut pas m'abandonner. Elle ne peut pas briser notre famille, elle ne peut pas faire ça.

-Pense à nos enfants, à notre vie je t'en supplie.

Je vois son regard changer et elle se rapproche légèrement de moi, elle me connaît, elle sait que je l'aime. Que je l'aime plus que n'importe qui sur cette terre. Je la prends dans mes bras et essaie de lui faire passer tout mon amour. Je sens ses bras autour de moi et je me replonge des années en arrière, quand tout allait pour le mieux.

Elle part travailler et je pars à mon boulot. Avant, je prends le temps de réserver une table au Palace, un super restaurant. Ma mère gardera les petits et ça sera génial.
À la gendarmerie, Christian, mon collègue, me parle de son couple allant mal et me dit qu'il nous trouve, Cristal et moi, vraiment super. Oui ma famille est géniale, nous sommes de super parents, un super couple et nous avons une super maison.

Après le taff, je passe chercher Naï à l'école et Lucas à la nourrisse. Ma fille est très capricieuse en ce moment, et je suis obligé de l'engueuler presque tous les jours, mais aujourd'hui elle est super calme. Je passe m'acheter une jolie chemise pour ce soir et pars me faire tout beau. Une fois que je suis assez élégant, j'attends ma femme. Elle se change en vitesse et nous partons manger. Le repas se passe à merveille, ses yeux restent illuminés tout le reste du repas et nous parlons beaucoup. Ce qui n'était pas arrivé depuis des mois. Elle me parle de Romain et je sers les poings mais essaie tout de même de me détendre. Me fait comprendre que c'est un ami, un très bon ami. Le problème est qu'elle parle de Romain avec plus d'enthousiasme que quand nous faisons l'amour.

En rentrant nous nous mettons devant « Il était une fois » et je l'entends me dire dans un soupire « J'aurais tant voulu être une princesse. ». Encore une fois, mon cœur se brise et je suis abattu de n'être que moi et ne pouvoir rien lui offrir de plus.


Dernière foisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant