Vendredi 8 Janvier 1999

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Point de Vue de Christal

Aujourd'hui c'est l'anniversaire de mon Anaïs, jour d'anniversaire signifie, dans ma famille, jour de course. Aujourd'hui je dois aller acheter son cadeau, son gâteau et aller la chercher à l'école. Je me réveille et me prépare en vitesse, Marc dort encore -il ressemble, dans ces moment-là, à un bébé-. J'envoie un message à Romain en lui expliquant que c'est l'anniversaire de ma fille donc que l'on finira plus tôt que prévu.

En allant devant le miroir je vois une femme épuisée, une femme moche. Mes cernes, mes bleues, mon absence de cheveux, mes épaules abaissées. Je ne suis plus moi-même, je ne suis plus la femme que j'ai été pendant tant d'année. Je m'habille, prépare le petit déjeuner et pars au boulot. En arrivant Romain est déjà arrivé, lumineux comme toujours.

-Bonjour Christal, je suis parti acheter des croissants à la boulangerie et j'ai trouvé un gâteau en forme de princesse, je me suis dit que ça serait parfait pour ta fille et comme ça tu n'auras pas besoin de courir. J'ai aussi ouvert les derniers dossiers sur lesquels on bossait hier.

Cet homme est vraiment la bouée qui me permet de tenir hors de l'eau chaque jour. En mettant ma main sur sa joue, je lui dis :

-Mais qu'est-ce que je ferais sans toi ? Tu es adorable, merci. Tu sais c'est mon anniversaire dans deux mois donc si tu veux vraiment être adorable... lui dis-je en rigolant.

Parler avec Romain c'est léger, c'est facile.

J'adore travailler avec lui, il est d'une richesse incroyable mais surtout prévenant et gentil. Durant le temps du midi nous commençons à parler plus en profondeur de nos vies -il était temps-. Il m'apprend que dû au décès de son père, il est devenu très proche de sa maman. Il a un chien aussi, Mika, un beau labrador blanc. Au fur et à mesure que l'on parle, notre belle amitié grandit de plus en plus. Ayant complétement oublié mon rendez-vous chez le médecin -pour une visite de routine- et n'étant pas au bureau, je lui demande de m'y emmener. Insistant pour rester au rendez-vous, je n'arrive pas pu lui refuser. Le médecin me demande donc dans une salle à part de me déshabiller, je suis nu face à ce médecin lorsque je vois son regard changer, quant au lieu d'un regard neutre et professionnel, c'est un regard inquiet et interrogateur.

-Christal que se passe-t-il ? D'où vienne tous ces bleus, toutes ces marques ?

Par peur, par défense je réponds soit des meubles, soit mes enfants lorsque l'on joue. Il insiste, il sait, il comprend. Mais je ne peux parler, je ne peux le dire, je ne peux l'expliquer. Mon corps tremble, mon corps a peur. En partant de chez ce médecin la peur d'être découverte à me remplir petit à petit. Que diront les gens s'ils l'apprennent ? Je ne peux pas partir, mes enfants ont besoin de leurs deux parents.

Romain, me voyant muette, se tait aussi, il comprend qu'une chose le dépasse et ne veut pas m'envahir. Cadeau d'Anaïs acheté, je rentre à la maison en esquissant mon plus beau sourire.

Je reçois un message de Marc me disant qu'il ne peut pas se libérer et même si ce n'est pas une grande découverte, je suis déçue. Nous passons une super soirée, ma fille est ravie et c'est le principal. Ce diner était le meilleur depuis des mois.

Avant de me coucher j'entends mon portable vibrer.

ROMAIN : La Barbie a plu à ta jolie poupée ?


CHRISTAL : « Oui merci monsieur Romain, elle vraiment trop belle » Voilà sa réponse. Merci pour tout.

En fermant les yeux, une question me traverse l'esprit et me ronge. Serais-je là pour sa prochaine bougie ?

Point De Vue de Marc

Aujourd'hui c'est l'anniversaire de ma princesse. Je me suis réveillé trop tard pour pouvoir lui souhaiter et je ne pourrais pas être là ce soir, je suis en déplacement à trois heures de la maison. J'arrive au boulot et retrouve Christian et Assia. Dans la voiture nous parlons de tout et de rien mais mon esprit reste concentré sur une seule chose : Anaïs. Lorsqu'elle est née, j'étais en train de faire des travaux dans la maison.

-T'es sûr que je mets ce cadre ici ?
-Mais oui Marc ! Je t'assure que c'est par-

Je me retourne vers ma femme ne comprenant pas son silence soudain et je la retrouve les yeux gros comme une soucoupe.

-Que se passe-t-il Cris ?
-Je -je perds les eaux ! Il faut aller à l'hôpital.

Soudain la panique commence, j'attrape la valise qu'on avait préparé et installe la future maman près de moi. Je conduis le plus prudemment possible, le plus vite aussi. Et bordel de merde, qu'est-ce que j'ai peur. On arrive à l'hôpital trois heures plus tard, me voilà papa d'une petite fille qui se trouve dans mes bras. Elle est tellement belle. Une brune aux yeux marrons. Cris est près de moi, épuisée. Mais je n'arrive pas à me concentrer sur elle, je n'arrive à regarder que ma fille. Ma fille. Mais serais-je un bon père ? Vais-je être meilleur que mon père ?

Nous sommes à mi-chemin quand je vois un magasin de jouets. On s'y arrête et je lui achète la plus belle Barbie que je trouve. La journée continue et je me demande ce qu'a prévu Cristal. C'est la reine des anniversaires, elle se plie toujours en quatre pour que l'on est le meilleur possible. Et tous les ans, il surpasse le précédent. Ma femme est tellement forte pour faire ça. Se rendre indispensable pour ce genre de chose. Nous passons la soirée au restaurant et je ne pense qu'à ma famille. J'en parle avec mes collègues et Assia me regarde admirative. Elle a toujours voulu avoir des enfants, mais n'a jamais pu. La vie est injuste, elle donne des enfants à des hommes comme mon père et moi mais pas à des femmes aussi bonnes qu'elle.

Dans la chambre d'hôtel, je me connecte au téléphone de mon épouse. Elle a tellement pris l'habitude de me mentir, que je me sers directement à la source désormais. Je vois beaucoup de mail, des photos de ce soir. Tout le monde à l'air tellement mieux sans moi, tellement plus heureux. Que feraient-ils si je mourais demain ? Sûrement un feu de joie. Cette pensée obscurcie mon cerveau mais j'arrête d'y penser. Je remarque de nombreux appels du docteur et je ne comprends pas alors je me rends dans son emploi du temps. Elle avait rendez-vous avec lui cette après-midi. Que lui a-t-elle dit ? Pourquoi est-elle allée le voir ? Pourquoi n'arrête-t-il pas de l'appeler ?

Dans ses messages je m'arrête sur un en particulier.

ROMAIN : La Barbie a plu à ta jolie poupée ?
CHRISTAL : « Oui merci monsieur Romain, elle vraiment trop belle » Voilà̀ sa réponse. Merci Pour tout.

Romain connaît ma fille ? C'est une blague ? Et merci pour quoi bordel ?

Dernière foisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant