Chapitre 10 : Moncler

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« Environ huit heures et demi d'avion, les températures qui oscillaient entre dix-huit et vingt-huit degrés... Ton choix de partir avec ta doudoune Moncler n'est finalement peut-être pas une mauvaise idée monsieur le frileux. », déclara Giovanna pendant qu'elle lisait les informations sur son portable.

Lorenzo grogna gentiment à son encontre. Il aimait juste être proche des sources de chaleur, tel le poêle chez Giovanna. Ils se chamaillaient presque à chaque fois pour récupérer la place accaparée par l'autre. Subitement, il décida de ne plus se remémorer ces souvenirs, parce que ces derniers étaient encore trop récents pour ne plus ressentir cette nostalgie. Il détesta les départs une bonne fois pour toutes.

Des sentiments étrangers avaient émergés lorsqu'il effectuait la réservation de son séjour. Il voulait remercier Giovanna pour sa présence inattendue, son aide indulgente et son soutien indéfectible, mais aucune reconnaissance de ces actes ne put être modelée juste par les cordes vocales de Lorenzo. Il se sentait rempli d'une émotion inconnue, et non plus de sa langueur monotone. Giovanna lui avait en plus gentiment proposé de l'accompagner jusqu'à l'aéroport, et il était à présent assis sur l'un des bancs en face des guichets d'enregistrements. Elle buvait son chocolat chaud sans stress ni tristesse.

Le grand-père de Lorenzo l'attendait, et cette situation rassurait le rappeur surprit de cette angoisse inconnue. Il ne contrôlait plus les battements devenus forts de son cœur, la moiteur de ses mains et sa jambe qui rebondissait nerveusement. Il tentait aussi à contrôler les pertes de connaissances éphémères... Les hôtesses de l'air déclenchèrent ce retour à la réalité attendu par Giovanna et Lorenzo. Ses genoux se déplièrent comme s'ils avaient reçu une simulation électrique, et elle le suivit jusqu'au début de la file d'attente : « Je te souhaite un bon voyage Lorenzo, profites-en pour te ressourcer. ».

Il admira le calme et la sagesse de Giovanna d'affronter tranquillement cette épreuve alors que les ressentis de Lorenzo lui refusèrent d'obéir : « WAllah que je t'enverrai un truc. ».

Giovanna sourit et cette réaction provoqua chez Lorenzo une séparation définitive entre ses sensations et sa raison. Elle l'encouragea cependant avec sourire heureux accompagné d'un geste de la tête. Il s'engagea alors dans ce labyrinthe ouvert, et se retourna une dernière fois avant de tendre ses papiers au personnel de bord. Giovanna le salua, et tourna les talons.

Lorenzo ne se reconnaissait plus, notamment parce qu'il suivait machinalement le parcours à travers les boutiques exemptées de taxes. Les gens pressés qui criaient et se déplaçaient vite le fatiguaient. Il s'isola donc sur les sièges réservés à sa porte et était impatient d'embarquer le premier. Il ressentait... Une fatigue qu'il identifia à celle d'une sieste : il voulait juste caler sa tête contre le hublot et dormir jusqu'à l'atterrissage. Par chance, les employés de la compagnie aérienne arrivèrent assez tôt, et vérifièrent bien sûr les priorités des passagers. Il avait réservé ce privilège pour fuir cette réalité. Lorenzo rêvait juste de disparaître.

Il trouva enfin ce silence tant désiré en première classe. Il se laissa tomber sur un fauteuil rembourré et donc confortable. Lorenzo écrivit machinalement un mot aux salariés en leur indiquant de ne pas le déranger tant qu'il ne serait pas réveillé. Il souhaitait juste voir son grand-père le sage.

...

« Je me permets de vous réveiller monsieur, car nous sommes bientôt arrivés à Dakar. ». Lorenzo apprécia cet élégant jeune homme en costume et à la voix douce et prévenante, puisque ses yeux s'ouvrirent dans une ambiance quasi sereine. « Désirez-vous déguster le repas concocté par les apprentis de la brigade du chef cuisinier ? ». Le ventre de Lorenzo n'attendit pas sa réponse pour gargouiller. « Je vous apporte les mets de suite. Que buvez-vous ? ».

Ce qui nous lie - Freeze CorleoneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant