Ce qui nous lie - Freeze Corleone

Chapitre 12 : L'art de la guerre

« Puis-je savoir ce que tu fabriques ? ». La présence de Giovanna provoqua un sursaut violent chez Lorenzo. Il tentait de trouver les bons dosages afin que les mélanges ressemblent physiquement et gustativement à la lean. Il percevait cette solution comme la meilleure pour combler le manque.

« Putain mais comment t'es entrée ? ». Lorenzo se retourna de façon brusque, notamment parce qu'il était chez lui, et ne s'attendait pas à voir Giovanna dans sa cuisine. Le rythme cardiaque du rappeur s'accéléra de suite, malgré la présence quasi rassurante de la femme qu'il connaissait à présent.   

« Tout simplement par ta porte. ». Elle préféra choisir l'humour à la confrontation directe. « J'ai toqué plusieurs fois ! Tu devrais aussi réenclencher ta sonnette même si je comprends que tu n'aimes pas être dérangé dans tes activités. », dit Giovanna pendant qu'elle s'asseyait sur l'une des quatre chaises qui entouraient la petite table remplie de livres. 

Lorenzo la fixa en ressentant à la fois cette étrange sensation de soulagement et un sentiment qu'il...

« Pourquoi je t'ai aps entendu arriver ? ». Il tenta discrètement de cacher les bouteilles dans l'évier.

« Tu devrais jeter ces poisons Lorenzo. ». Giovanna possédait définitivement ce sixième sens qu'il désirait depuis tant d'années. Comment savait-elle qu'il dissimulait son mal-être autant physique que moral ? Elle dirigea ses yeux vers les siens car était consciente de leurs pouvoirs communicatifs. « Ma capacité de me déplacer en silence pourrait certainement provenir de mon parcours militaire. Continue à entraîner ton mental et tu réussiras à éradiquer ces pulsions. ». Elle croqua de manière tout à fait sérieuse dans une pomme rouge, et ressembla au dieu de la mort Ryuk dans Death Note ou à Blanche-Neige grâce à ses cheveux noirs coupés en carré, sa peau blanche et son baume vermillon.

Lorenzo savait qu'il était perturbé par la présence charismatique et ainsi perturbante mais unique de Giovanna. Il n'hésita cependant pas à entamer cette partie de semblant avec elle : « Sérieusement ? ».

« La négociation est aussi un art de la guerre Lorenzo. », expliqua Giovanna sans pour autant rester imperturbable et impassible. Son regard baissa en effet vers le traité de stratégie militaire chinois éponyme et elle ne put se retenir de rire. Cette fois était la première qu'il écoutait son rire et...

« C'est quoi ta solution lorsque tes démons reviennent te hanter ? ». Lorenzo voulait parler une bonne fois pour toutes avec Giovanna de l'antidote. Elle lança le trognon de sa pomme en un seul coup parfait dans la poubelle, se leva pour laver ses mains, et se retourna enfin vers lui les paumes calées sur l'évier, et l'intérieur de ses bras en direction de Lorenzo. Il crut vivre cet instant pendant une éternité.

« Je les accepte, bien que cette décision est loin d'être la plus facile à expérimenter. Je pense également que je ne dois pas compter sur cette sensation où les traumatismes ne sont plus que des lointains souvenirs. J'aimerai toujours mon enfant malgré le fait qu'il soit décédé. Nos situations sont différentes mais je suis persuadée que nous continuerons à ressentir ce manque jusqu'au dernier gramme de nos vies. ». Giovanna attrapa l'une des bouteilles, dévissa son bouchon, sentit son contenu et ne put se retenir de grimacer. « Rien ni personne ne remplacera l'absence, mais la vie te propose simplement deux solutions. Soit tu acceptes ces épreuves, soit elles te noieront. ». Elle versa enfin le liquide dans l'évier.

Lorenzo sentit ses yeux se fixer, parce qu'il savait déjà que ces mots l'avaient impacté. Il resta silencieux un moment, puisqu'il ignorait la façon par laquelle il devait agir. « La raison principale de ma visite était pour te dire que j'ai signé le compromis de vente de mon ancien studio à Lille. J'ai déposé mes dernières affaires dans ma voiture, car je vais les placer dans mon nouvel pied-à-terre que j'ai acheté dans la station balnéaire de Bray-Dunes ! ». La joie et le sourire de Giovanna convainquirent Lorenzo de ne plus se sentir gêné à demander de l'aide.

« J'parie que tu vois la mer de ton salon. ». Lorenzo s'imagina un balcon venté, cet air iodé, ce ciel gris, ces longues plages interminables... Jusqu'à ce qu'il remarque que Giovanna l'observait sérieusement.

« Ce critère correspondait à mes cinq exigences qu'étaient un appartement rénové et équipé en résidence calme, une surface d'une quarantaine de mètres carrés et ce paysage de sable. J'aime sentir la sensation des vagues. Sais-tu que se poser devant ce paysage équivaut environ à une heure de séance thérapeutique ? ». Giovanna commença à partir mais fut interrompue par Lorenzo.

« Attends ! J'aimerais partir avec oit si tu veux ienb de moi. ». Lorenzo subit d'abord une certaine gêne après cette demande, mais Giovanna l'autorisa simplement par un mouvement de tête approbateur.