Le Bel Inconnu (partie 2) ║Kharthur║

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Le duc Ivan Avdeïev (ou devrions-nous dire sir Khan Noonien Singh) serrait les mâchoires tandis qu'il traversait les interminables corridors du palais royal. Le garçon n'était pas aussi naïf qu'il l'avait dans un premier temps imaginé.

Ni même sot.

Il avait prit le soin de demander la destination devant un témoin. Ainsi Singh ne pouvait s'occuper de son cas sans craindre d'être reconnu. Le comte devait se douter de quelque chose, il en était persuadé.

Une nouvelle raison pour l'éliminer au plus vite.

Mais avant tout, il devait attirer sa confiance. Le berner, l'attirer dans ses filets, sans qu'il ne s'en rende compte. La tâche semblait bien moins aisée que supposée...

En parlant du loup, Arthur Dent lui emboîtait le pas, ravi de pouvoir assurer l'identité dudit duc. Fort heureusement, le tueur avait tout préparé en amont, et c'est un peu plus tard qu'ils ressortirent du palais, devant le défilé que formaient les fiacres encore nombreux.

Le duc jeta son regard à droite, puis à gauche, avant de trouver son laquais et claqua des doigts pour attirer son attention. Il lui parla d'un ton fort rude, dans une langue qui était parfaitement étrangère (et fort agressive) aux oreilles du comte. Du russe, présuma ce dernier, qui n'en connaissait pas un mot.

Le valet hocha la tête à son maître, puis se baissa en révérence, avant de hocher encore une fois de la tête, pour ensuite se pencher de nouveau, et accourut de son petit pas rapide vers les lignes de fiacres.

«- Je lui ai demandé de nous amener mon fiacre. expliqua le plus haut en hiérarchie.

- Vous lui parlez russe ?

- C'est que je l'ai ramené de Russie, et le garçon n'a encore jamais appris le moindre mot en anglais, contrairement à moi.»

Bien-sûr, le garçon ne venait pas de Russie, mais d'un pauvre quartier londonien nommé Whitechapel. Et il parlait d'autant moins le russe, mais bien une langue parfaitement inventée et incompréhensible. Son employeur lui avait déjà donné les ordres avant même la soirée, alors les paroles étaient bien inutiles.

Il ne fallut pas plus d'une minute après cela pour que s'avance devant les deux hommes le merveilleux fiacre du duc. Sur le flanc, le blason de la famille. Blason russe. Encore un nouvel élément qui contribuait à le disculper du mensonge.

«Voyez-vous, monsieur le comte, commença Khan en ouvrant la portière. En arrivant ici, j'en ai profité pour rendre visite à quelque famille lointaine habitant Londres. Si bien que j'ai ramener certaines affaires...la voilà ! Tenez.»

Arthur reçut dans les mains une chapka. Il l'étudia dans ses moindre détails. Il n'en avait jamais vu de telles. Il le fit remarquer.

«C'est bien normal, nous n'en trouvons qu'à Saint-Pétersbourg, de telle qualité. expliqua Singh, qui n'avait fait qu'un seul voyage là-bas et avait acheté cela il y a bien longtemps. Et pour vous faire foi de ma bonne volonté, je vous en fait cadeau.»

«Peut-être cela l'amadouera-t-il ?» pensait l'assassin.

«- Comment ?! s'était étonné le comte, les yeux sortis de leurs orbites en dessous du masque. Non, je ne peux accepter un tel présent : c'est la vôtre, après tout.

- Je peux bien m'en racheter une en rentrant au pays ! J'insiste, mon cher.»

Arthur demeura interdit. Le duc l'avait appelé «mon cher», ce qui n'était pas négligeable ! Il en fut flatté.

«- Hé bien, c'est fort aimable de votre part, je vous remercie.

- Me croyez-vous à présent ? Peut-être vous faut-il d'autres preuves ? J'ai aussi mes papiers officiels, que je devais ramener pour passer les frontières. Prenez donc.» lui indiqua-t-il en tendant vers lui un papier plié avec soin en quatre.

Mind and Heart [Recueil OS]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant