Cœur de Pirate : Tome 1 - La malédiction de l'océan

Chapitre Cinq

Debout sur le pont, Earl ne bougeait pas. Son corps était pétrifié par la peur face à ce qui l'attendait. La planche était attachée solidement au pont, l'un des pirates apporta la ceinture au capitaine. Ce dernier sourit, et s'approcha du prisonnier.

Le jeune homme tenta de reculer pour s'enfuir de cette approche, mais il se retrouva bloqué par le bastingage dans son dos. Le pirate en profita pour lui prendre le bras et le ramena proche de lui. Il vint entourer sa taille de la ceinture, qui comportait un sabre de petite taille et un pistolet charger.

Par la suite, le mercenaire passer un collier autour de son cou. Le pendentif était une boussole, assez vieille en vue de son aspect. Il posa ses mains sur les épaules frêles du garçon, et frotta ses pouces sur le tissu fin de la chemise salie qu'il portait. Il se reprit rapidement face à cette action et tourna le détenu de façon à ce qu'il fasse face à la mer.

Il le poussa sans ménagement sur la planche et l'incita à avancer jusqu'au bout. C'est les jambes tremblantes qu'Earl avança silencieusement, ses mains rabattues contre sa poitrine. Au bout de la planche, il baissa son regard vers l'eau calme qui se trouvait sous ses pieds.

Ce n'était pas de l'eau dont il avait peur. Au contraire, il avait toujours été attiré par ce bleu changeant et par cette force étrange qui le poussait à agir dans les situations les plus périlleuses. La peur qui le rongeait concernait l'océan et ses secrets. Tous ces secrets gardés à l'abri des regards et des convoitises, ainsi que ses dangers.

_ Tu as encore le choix.

La voix du capitaine retentissait dans son dos, ce qui le coupa dans ses réflexions personnelles. Il se tourna doucement vers le pont, tremblotant de crainte de tomber à l'eau par mégarde. Ses pupilles se perdirent sur les visages amusé ou intrigué des membres d'équipage, pour finalement se poser sur celui fermé du capitaine. Il se tenait au bout de la planche, et semblait attendre quelque chose en particulier.

_ Tu peux sauver ta vie en me révélant ce que je veux savoir. Ou tu peux emporter tous tes secrets avec toi.

Il posa un pied sur la planche, et exerça une pression que ressentit le jeune homme sous ses pieds nus. Ses genoux étaient sur le point de flancher, il ne pouvait plus contrôler l'angoisse qui grandissait dans son corps. Le pirate se recula sans quitter le prisonnier du regard, son second s'avança à sa place pour prendre la parole.

_ Tu portes un sabre pour te libérer de tes liens, te protéger ou te nourrir. Le pistolet ne compte qu'une balle. Elle te servira à t'achever au bout du troisième jour, lorsque la raison aura quitté ton corps et que la seule envie qui te rongera sera celle de mettre fin à ta souffrance.

Earl l'écoutait avec attention, et le détailla. Il ressemblait au garçon qui lui avait amené à manger, mais il était bien plus grand et plus robuste que lui. Ses cheveux albâtre retombaient sur son visage mat, ses yeux bruns ne le quittaient pas du regard.

Un bruit du froissement d'un tissu attiré sa curiosité. Les iris du garçon se dirigèrent vers le haut du mât, et regardèrent le drapeau volant au vent. Grâce à cela, il savait à qui il avait à faire. Ce n'était pas un équipage de pacotille, ou de simple matelot qui se prenaient pour des dures.

Il s'agissait du Phoenix de Manhal.

Un drapeau au fond noir, muni d'une tête squelettique et d'un grand oiseau de feu prenant son envol en arrière, comme bruler par le soleil. C'était un équipage à la réputation de tueur, mais aussi d'hommes d'honneur chez les pirates. Un navire conduit par un capitaine droit et honnête, autoritaire, mais rusé.

Il ne pouvait plus faire marche arrière, même si cet homme lui avait donné deux échappatoires. Il ne pouvait pas leur révéler la nature de son voyage, ni même de sa destination. Mais s'il tombait à l'eau, alors il serait perdu.