Chapitre 7

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La rumeur, selon laquelle Zoulaykha avait voulu se donner à un esclave, se répandit vite bien qu'elle tentât de la cacher.

Elle ne vit alors qu'un seul moyen de la faire taire : elle convia à un dîner les grandes femmes du royaume.

Les invités étaient au nombre de cinq : il y avait la femme du chambellan (officier chargé du service de la chambre d'un souverain), celle du capitaine des gardes, la femme de l'inspecteur de la table du roi, celle du grand écuyer (officier qui était au service d'un chevalier, d'un prince) et celle de l'échanson (officier dont la fonction était de servir à boire à la table du souverain).

Avant que ces dernières n'arrivent, Zoulaykha avait pris soin de le faire laver et embaumer.

Paré de cette manière, Youcef, Paix sur lui, avait dix fois la beauté de tous les hommes du royaume.

Ses cheveux étaient si soyeux et son regard si profond qu'il était, sans conteste, le plus bel homme d'Égypte.

Zoulaykha plaça Youcef, Paix sur lui, dans une chambre non loin de celle où elle recevrait et lui intima d'attendre ses ordres. Youcef, Paix sur lui, s'exécuta.

Les cinq femmes arrivèrent enfin. Une servante de Zoulaykha se chargea de les placer autour d'une grande table et leur donna à chacune un couteau et un cédrat (un agrume ressemblant au citron), afin de leur ouvrir l'appétit.

C'est le moment où les cinq femmes coupèrent chacune leur cédrat que Zoulaykha choisit pour appeler Youcef, Paix sur lui.

Lorsqu'il entra, les cinq commères se coupèrent, par mégarde, la main de stupéfaction.

Le sang coulait, mais elles ne s'en rendirent même pas compte, tant la beauté de Youcef, Paix sur lui, les subjuguaient.

L'éclat de son visage éblouissait le salon tout entier.

《Oh ! Cet Être ne peut être un Homme, c'est sûrement un Ange !》 s'écria l'une d'elles.

Les cinq femmes restèrent sans voix. Zoulaykha prit alors la parole :

《Eh bien, Mesdames... Il semblerait que vous ayez perdu votre langue. La beauté de cet homme vous subjugue ! C'est pourtant pour lui que vous avez blâmé ma conduite. Et croyez-moi, s'il ne se soumet pas à mes désirs, il finira sa vie en prison.》

Mais Youcef, Paix sur lui, fit mine de l'ignorer. Quelques jours après cet incident, la situation s'apaisa quelque peu. Zoulaykha cessa de l'importuner. Mais dès qu'ils étaient tous deux seuls dans une pièce, elle ne pouvait s'empècher de lui faire mille compliments:

《Ô Youcef, comme ton visage est beau !》

Mais Youcef, Paix sur lui, ne se laissait pas séduire par ses belles paroles.

《Ce visage n'est pas le mien, il appartient à la terre, car elle le recouvrira dans le tombeau où il redeviendra poussière.

- Et tes yeux, Youcef, et tes yeux ! Comme tu as de beaux yeux !

- Ces yeux ne sont pas les miens, ils appartiennent aux vers qui les mangeront dans le tombeau.》

Zoulaykha comprit alors qu'aucune ruse ne pouvait servir à l'encontre de Youcef, Paix sur lui, et qu'il ne se donnerait jamais à elle.

Elle en fut verte de rage et alla immédiatement trouver son mari :

《Al-Aziz, je veux que tu jette en prison cet homme qui me sert d'Esclaves.

- De qui parles-tu, Zoulaykha ?

- Je parle bien évidemment de Youcef ! Les gens l'interrogent et il ose prétendre que c'est moi qui ai commis une faute. Jette-le en prison ! Qu'il purge sa peine comme l'esclave qu'il est ! Les gens cesseront ainsi de parler et nous ne serons plus, ni toi, ni moi, déshonorés !》

Al-aziz observa longuement sa femme, il savait qu'elle mentait. Depuis le premier jour où il lui avait présenté Youcef, Paix sur lui, elle en était tombée follement amoureuse.

Al-aziz ne pouvait décemment pas jeter un inocent en prison et pourtant... Il alla trouver son cousin et lui demanda :

《Je ne sais que faire ! Tu sais comme moi que Youcef est innocent.

- Tu n'as pourtant pas le choix, Al-aziz. Tu es le grand Al-aziz et tu ne peux tolérer que ta famille soit déshonorée par un esclave. Tu dois le jeter en prison, sinon les langues et les esprits ne s'apaiseront jamais.

- Tu as sûrement raison...》

Al-Aziz décida donc d'accéder à sa demande. Aussitôt, deux hommes de la garde égyptienne s'emparèrent de Youcef, Paix sur lui, et le jetèrent en prison.

Youcef, que la paix soit sur luiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant