Chapitre 6

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La caravane parcourut une longue distance.

Elle laissa loin derrière Youcef, Paix sur lui, le pays de Canaan, son père bien aimé Ya'qoub, Paix sur lui, son cher petit frère Benyamine ainsi que la trahison de ses dix frères.

Bientôt, l'expédition arriva en Égypte, puis sur la place du 'Marché aux esclaves'.

Youcef, Paix sur lui, fut aussitôt projeté hors de la caravane et mis en vente par l'un des deux hommes qui s'entretint avec un personnage à l'air influent et puissant :

《Qui est ce jeune homme ?

- Ô Al-aziz, comme je suis heureux de te trouver là... Tu parles sûrement du jeune Cananéen, c'est un véritable bijou. Il te sera certainement très utile à toi, grand trésorier de sa majesté Rayan d'Égypte.

- Quel est ton prix.》

Et c'est ainsi que celui que l'on nommait : le grand d'Égypte, Al-aziz, qui n'était autre que le trésorier du roi Rayan d'Égypte devint le maître de Youcef, Paix sur lui.

Al-aziz était un homme très illustré et très riche.

Cependant, Allah avait fait de lui un homme impuissant, il ne pouvait pas avoir d'enfant. Pourtant, il était marié à la plus belle femme de toute l'Égypte, Zoulaykha.

Arrivés à la demeure d'Al-aziz, ce dernier présenta Youcef, Paix sur lui, à son épouse :

《Zoulaykha, c'est un nouveau serviteur pour nous, traite-le bien, il nous sera utile, j'en suis sûr.》

Dès le premier regard qu'elle posa sur Youcef, Paix sur lui, Zoulaykha en tomba follement amoureuse.

Elle n'avait jamais vu un homme aussi beau de toute sa vie. Elle tenta de croiser le regard de son nouvel aimé, mais Youcef, Paix sur lui, l'esquivait et baissait les yeux.

Al-aziz fut un bon maître pour Youcef, Paix sur lui, et le traita bien six années durant.

Youcef, Paix sur lui, avait même sa propre chambre ; Al-aziz lui avait confié des responsabilités et avait toute confiance en lui.

Youcef, Paix sur lui, avait alors vingt-trois ans. Quant à Zoulaykha, elle se mourait d'amour pour lui et ne pouvait plus se passer de sa présence.

Mais un jour, alors que Youcef, Paix sur lui, dormait paisiblement dans sa chambre, Zoulaykha entra et referma la porte derrière elle. Puis elle s'approcha de lui :

《Youcef, Youcef, réveille-toi, je... Je suis venue me donner à toi, je t'aime tant, je ne veux être avec personne d'autre et souffrirais de te voir entre les bras d'une autre femme.

- Ne me touchez pas, avez-vous perdu la tête ? Al-aziz est mon maître, il m'a toujours bien traité, je ne peux lui être infidèle. Allah n'aime pas les traîtres.

- Al-aziz ne le saura pas, nous ne lui dirons rien...

- Zoulaykha, vous perdez la tête, laissez-moi.》

Youcef, Paix sur lui, en proie aux avances de sa maîtresse, reçut un Signe d'Allah qui l'empêcha de commettre l'adultère et se leva précipitamment pour quitter la chambre.

Zoulaykha courut aussitôt après lui et lui arracha un pan de sa chemise.

Youcef, Paix sur lui, arriva à la porte avant elle mais, lorsqu'il l'ouvrit, il trouva Al-aziz en conversation avec un cousin.

Youcef, Paix sur lui, couvert de honte, ne sût que dire. Il resta ainsi debout, tétanisé, confus. Il ne voulait pas causer de tort à Zoulaykha.

Or, s'il disait la vérité, c'est ce qui se produirait. Elle le devança et prit la parole :

《Al-aziz ! Ton protégé a tenté de déshonorer ta famille. Mais je ne me suis pas donnée à lui, bien qu'il ait tout essayé. Tu dois nous venger, jette-le en prison !》

Le regard d'Al-aziz se durcit alors terriblement. Il ne quittait pas des yeux Youcef, Paix sur lui, comme s'il tentait de trouver dans son regard la vérité.

《Youcef, qu'as-tu à dire pour ta défense ?

- Al-aziz, je ne voudrais déshonorer ta famille pour rien au monde. Je te suis reconnaissant du bien que tu as fait pour moi. Ta femme m'a enfermé dans la chambre et a voulu se donner à moi. Mais j'ai refusé et me suis enfui. De rage, elle m'a arraché un pan de ma chemise... Je suis innocent, Al-aziz.》

Le cousin intervint alors :

《Ne laissons pas les esprits s'échauffer. La vérité est évidente et c'est la chemise qui nous servira à distinguer le vrai du faux. Si la chemise est déchirée par-derrière, alors cet homme dit vrai. Mais si la chemise est déchirée par-devant, alors c'est Zoulaykha qui dit vrai.》

Lorsqu'Al-aziz et son cousin constatèrent que la chemise était déchirée par l'arrière, ils comprirent que les paroles de Youcef, Paix sur lui, étaient sincères et que celles de Zoulaykha étaient mensongères.

Al-aziz jeta alors un regard empreint du plus grand mépris envers sa femme et déclara :

《Vos ruses sont grandes, bien plus grandes que les nôtres !》

Cependant, Al-aziz ne voulut pas que sa femme fût déshonorée aux yeux de la ville. C'est la raison pour laquelle il intima le silence à Youcef, Paix sur lui, sur cette affaire tandis qu'il demanda à Zoulaykha de se repentir auprès d'Allah, afin qu'Il lui pardonne.

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Média :

'Zouleïkha agrippe le manteau de Yusuf', détail d'une miniature de Behzad, 1488.

Youcef, que la paix soit sur luiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant