Un cœur pour t'aimer toi | Larry

Quatorze

        Le pouls de Louis battait à tout rompre. Les lumières semblaient vaciller et l'atmosphère était soudain devenue plus électrique. Pourtant, autour de lui, tout semblait avoir retrouvé un rythme normal. Les spectateurs qui s'étaient approchés de l'estrade étaient désormais éloignés, s'attardant sur certains tableaux tandis que d'autres buvaient leur coupe de champagne tout en dégustant les mets mis à disposition sur la longue table, près de l'entrée. 

          Cependant, Louis était resté à la même place, près de la caisse en bois. Ses jambes avaient retrouvé leur vivacité et il tenait désormais fermement sur le sol. Il fixait toujours Harry des yeux ; devant lui. Ce dernier ne s'était pas encore approché. Il restait en retrait, comme s'il s'attendait à se faire hurler dessus ou se prendre un poing sur le nez. Il avait les mains cachées derrière le dos pour que Louis ne le voit pas trembler. 

           Ils étaient là, l'un en face de l'autre et pourtant Louis ne s'était jamais senti aussi éloigné de lui. Il s'était passé tellement de choses depuis la dernière fois où il lui avait lancé un regard. Ce fut la gorge nouée qu'il décida de s'avancer vers lui, se forçant à sourire. Le corps de Harry se raidit soudain, alors que Louis était tout près. Il s'était grandit, comme si cela pouvait le protéger du regard noir que lui lançait Louis, car une chose était sûre : son sourire était faux. Sa haine, en revanche, se lisait à travers ses iris. 

 - Félicitations, entama Harry. 

            Il ne le regardait pas dans les yeux. Ses pupilles passaient de toiles en toiles tandis que Louis, lui, le fixait sans gêne. Il le regardait de haut en bas : ses cheveux étaient plus courts, mais ils arrivaient tout de même à sa nuque. Le béret qu'il portait sur la tête était noir, comme ses chaussures. Il avait un costume trois pièces, lui aussi. Rouge bordeaux alors que sa chemise était blanche. Il était élégant. Il était beau. Louis se racla la gorge. 

 - Merci, lâcha-t-il en tâchant de ne pas faire paraître son émotion. 

Soudain, Margaux arriva derrière Louis. Elle posa la paume de sa main entre les deux omoplates de Louis, le sourire aux lèvres. 

- Il y a des personnes là-bas qui seraient intéressés par un de tes tableaux, lui confia-t-elle en désignant un couple d'une quarantaine d'année du regard. 

- Merci, souffla Louis avant de partir. 

Ce remerciement avait évidemment deux connotations différentes : l'une était pour la remercier de cette information et le seconde pour lui avoir permis de s'extirper de cette situation gênante. 

Louis se dirigea alors vers le probable couple qui se tenait devant un tableau : la vie qu'il avait de Paris depuis son appartement : les couleurs étaient mélangées pour symboliser la ville cosmopolite. Des formes étranges avaient été ajoutées et les protagonistes n'étaient représentés que par des silhouettes sur des toits. Le soleil se couchait et donnait une teinte rosée au ciel. 

 
- Bonsoir, entama Louis en leur tendant la main. 

Le couple était un peu plus grand que Louis. La femme avait les cheveux tirés en chignons, portait une robe noire et des chaussures à talons blanches. L'homme quant à lui avec une calvitie, portait une paire de lunettes aux bords fins et son costume était classique. Ils avaient tous deux une coupe de champagne. Louis tenait la sienne dans la main droite et avait la gauche dans la poche. 

- C'est un tableau remarquable, constata la femme en rehaussant ses lunettes. Quel est son prix ? 

- Ne désirez-vous pas que je vous parle un peu plus de la toile avant de l'acheter ? demanda Louis.