Chapitre 40 : Si tu restes...

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Love on the brain, Rihanna

Mon esprit était vide. Oui, je ne pensais à rien. J'aurais pu dire qu'il s'agissait de mes instincts animaux qui avaient pris le dessus, mais non, je ne ressentait rien. La solution n'en était pas une, c'était une condamnation. Alors voila où cela nous menait ? Toutes les possibilités se rapportaient à cette conséquence ? Chabannes, les autres, ils avaient tous raison en fin de compte ?

La morsure était la seule clé de nos destins entrelacés, ou plutôt un scalpel, les tranchant nets, séparés à jamais. Arriverais-je un jour à le regarder en face après ce que j'ai fais ? Une petite voix me dit que oui, car l'imprégnation fonctionnerai en sens inverse, comme implacablement prédit. Tout paraissait réglé de façon miraculeuse, et ça me faisait vomir.

Cette vie, manipulée par le destin et la magie était maudite. Ce n'en était pas une, seulement une vaste blague, minutieusement exécutée comme sur du papier musique. Mais une question se posait toujours : Allais-je le retrouver très bientôt, pour subir sa perte véritable ? Ou allait-il tout simplement mourir dans le processus ? Ce qui signifierait ma propre perte dans les ténèbres

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Bib, bib, bib... Je n'ai jamais aimé les sons des engins électroniques que l'on trouve dans les hôpitaux. Mais maintenant, je les détestais.

Au rythme des gouttes dévalant mes joues, la minuterie sonore indiquait les battements redevenus réguliers du cœur de Nathan. Allongé sur un lit blanc, relié à de multiples tubes difformes lui procurant de quoi survivre, mon imprégné... était encore vivant.

Il était dans un piteux état, semblable à celui dans lequel j'étais hier, après ma confrontation. Son épaule gauche était marquée de larges cicatrices, faites par le monstre qui l'avait mutilé. Plusieurs côtes cassées, de multiples entailles profondes, l'artère sous-clavière atteinte, il s'accrochait à la vie comme une feuille à un arbre d'automne. J'avais hérité de quelques plaies semblables, et tout aussitôt refermées en moins de quelques heures. Mais comparer mon état physique à mon état mental était bien incongru.

Sur son épaule droite, longeant la base de son cou, la marque de ma morsures reluisait au néon de la chambre que nous avions aménagé en urgence au chalet. Elle était discrète, et semblait se fondre dans sa chair bien plus vite que les autres. Le processus de régénération était lancé, c'était désormais certains.

Jannis avait fait son possible pour arranger la situation du mieux qu'il pouvait, mais le coma était inévitable. Son corps avait lâché, puis fut ramené à la vie dans la même minute. Il devait non seulement survivre à ses blessures, mais aussi à sa métamorphose progressive qui allait bientôt lui faire reprendre connaissance. Une telle épreuve était inhumaine, et désormais, il n'était plus humain non plus. En d'autre terme, je lui avais retiré son humanité au profit d'une vie de souffrances.

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Un jour s'était écoulé, l'organisme commençait à réagir, comme le montrait l'avancé de sa guérison. Il reprendra connaissance avant la fin de l'après-midi. Et il était légitime que je sois là, pour que cela se termine, ou que cela continu. Je devais être présent, c'était mon devoir, et peut-être le dernier.

Le temps semblait filer à une vitesse considérable. Le sang colorait de plus en plus ses joues, les signaux sonores avaient repris de l'intensité. Mon estomac se tordait dans mon ventre, mon cœur voulait s'échapper de ma poitrine. Il revenait à lui, il allait ouvrir les yeux dans quelques minutes, je le savais. Qu'allais-je faire ?

Réfléchir à mes paroles me paraissait vain, alors je pris la décision de rester naturel, de ne pas sauver les apparences. C'est probablement ce qu'il souhaiterait le plus, une honnêteté sans pareilles, une pure et dure vérité bien froide, à son image. Quoi qu'il ne sera plus froid très longtemps...

ALPES - Tome 1 - L'éternité et l'au-delà.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant