ALPES - Tome 1 - L'éternité et l'au-delà.

Chapitre 22 : Désireux de pardonner

Wonderwall, Oasis

     On m'a toujours dis que j'étais orgueilleux, égoïste, paranoïaque même. Depuis très jeune, mon aversion pour le monde s'était manifesté à travers diverses occasions. Le coup du pédophile attirant les enfants avec ses bonbons n'aurait jamais marché sur moi. C'était bien simple : Je ne connaissais pas, je ne faisais pas confiance. 

Beaucoup m'ont souvent reproché cette méfiance excessive comme étant à l'origine de mon manque d'amis. Je ne niais jamais, je le savais même. Mais lorsque je lis le dicton « mieux vaut être seul que mal accompagné », les regrets s'envolent. Bien vite, la seule personne en qui je faisais confiance était moi-même. Seulement moi, mes capacités et mes actions ne me procuraient aucune crainte d'être déçu. 

Les plus jaloux de mon succès interprétaient cela comme de l'égocentrisme, le genre de mec toujours tourné vers sa personne et que seul le travail intéresse. Pourtant, je n'ai jamais croulé sous les efforts, le succès venait à moi naturellement. Ces facilités avaient finies de me désigner comme la tête de la classe, et par la même occasion la cible prioritaire à battre.

Aujourd'hui, je n'évolue guère, ou du moins j'aime le penser. J'aime me persuader que je reste fidèle à moi même, le même Nathan Salinger intransigeant mais immaculé, froid mais solide, méfiant mais sûr de lui. Accorder ma confiance à quelqu'un revient à m'exposer aux dangers de la déception, aux risques de la trahisons, aux problèmes qu'engendre une relation quelconques. Que ce soit en amitié ou en amour, rien de durait longtemps. Là encore, ma réputation en pâtissait, au grand bonheur de mes rivaux non-réciproques.

C'est pour cela qu'en réalité, j'accordais secrètement beaucoup d'espoir à ce changement. Partir, nouveaux entourages, tout quitter, vivre enfin. Ma fierté m'empêchait d'admettre que c'était nécessaire, mais les trois semaines passés dans la vallée furent plus que salvatrices. J'ai découvert Angela, qui est, je peux me le dire sans mal, une amie importante à mes yeux. Le milieu de la faculté est plus mature, on me félicite pour mon succès au lieu de me jalouser, on désir mon talent dans un sens plus noble, plus adulte.

Mais il restera toujours une exception quelque part, un rouage desserré, une tâche sur le tableau, une rayure sur le miroir. Christopher était la rayure de mon miroir, le bémol, mon imprudence, mon regret. Accorder ma confiance à un loup géant, lui raconter tout ces choses, me reposer à ses côtés... Tout cela me semble désormais erroné, comme une démarche stupide dont je me suis empressé d'entreprendre. 

Sans-doute étais-je soulagé d'avoir un animal, ou en l'occurrence quelqu'un pour me confier réellement. Quelqu'un qui ne pourrais jamais répéter ce que je lui dirais. Mais il à fallut que ce soit un humain, un humain déguisé en loup pour me faire tomber dans l'erreur. Aucune chance de deviner, aucune chance de faire autrement. Le destin s'en est mêlé, me privant de toute confidence de manière définitive. Et pourtant...

Et pourtant, je refuse de croire que cela doit se terminer ainsi. Je me refuse de penser que je serais déçu une fois de plus, que j'ai fais encore une fois une erreur, un mauvais choix. J'ai plaisir à emmerder le destin, et je tirerais cette situation au clair une bonne fois pour toute. Ma prochaine leçon sera la suivante : Le hasard est un fils de pute, alors contente toi de ce que tu as.

Chris méritait-il une seconde chance ? M'étais-je emporté ? Pour les autres, assurément. Pour moi, ma colère était légitime. Mais moi, c'est moi. Prendre sur sa personne n'est pas le dernier de mes principes. Et même si je n'ai pas l'habitude de renouer avec quelqu'un, quelque chose me dit que je ne serais pas déçu, que ce garçon mérite au moins d'être écouté. Alors la question que je me pose depuis que je suis sur le chemin pour notre rendez-vous, c'est la suivante : Si je lui accorde de nouveau ma confiance, qu'en fera-t-il ?