Assez imperméable aux signes extérieurs de richesse, je dois bien avouer que je laissais mes yeux trainer partout où ils pouvaient. Devant chaque stand, que ce soit pour du vin, des parfums, des sacs ou même des locations de jet privé, il y avait un panneau expliquant qu'il était interdit de prendre des photos.
J'allais ranger mon téléphone, contrariée, lorsque je vis que beaucoup de femmes respectaient à la lettre les consignes. C'était les stands qu'il était interdit de shooter, pas soi-même.
Je me rapprochai d'une porte, à l'arrière du bâtiment, portant la mention Interdiction de pénétrer, et me pris en photo, en prenant soin de viser la porte et le système d'ouverture par badge. Chaque photo que je prenais se rajoutait illico sur le cloud, consultable par les garçons depuis leur tablette dans leur voiture, postée à un kilomètre du salon.
En sautillant, je me filmais encore et j'enchainais les poses ridicules, piquées aux autres femmes autour de moi. J était de son côté, on avait convenu de se retrouver au bar Moët et Chandon pour faire un point. Je continuais de faire le tour de l'aile gauche, en snipant toutes les portes donnant sur l'arrière des stands.
J s'occupait des vigiles ; le nombre, les rondes et leurs armes potentielles. J'en repérai quelques-uns durant mon tour de repérage. Il faisait terriblement chaud, la clim fonctionnait pas ou mal. Ou était-ce l'excitation qui me donnait si chaud ?
Des filles portaient des parures remplies de diamants, d'autres se pavanaient dans des robes de luxe, faites de plumes ou avec beaucoup de soie, de tulle ou de strass. Elles faisaient toutes du 36, mais j'assumai mes formes. J'avais pris sur le fait plusieurs hommes, pendus aux bras de leur femme filiforme, le regard perdu sur mon corps plus pulpeux que la moyenne.
Tous les mêmes...
***
J'avais déjà fait une bonne trentaine de photos et de vidéos, j'avais arpenté tout le salon. Je m'étais arrêtée à un stand de macarons, je m'étais autorisé à en goûter un à la violette. Je promis au responsable de chez Ladurée que je reviendrais avec mes amies actrices, à Paris pour dévaliser sa boutique. Il y crut dur comme fer, j'étais pas mauvaise comme actrice.
J'avais plus bavé devant le stand Don Papa qui proposait des rhums à tomber que devant la montagne de sacs chez Mickael Kors. J'avais fait exprès de me perdre cinq minutes de rien du tout chez un chocolatier belge, dont le praliné avoisinait les vingt dollars pièce.
Je m'étais pointée avec un chouille de retard au bar où J m'attendait déjà. Il m'adressa un regard noir furax, je le rassurai :
- Ça va, j'ai trois minutes de retard mais j'ai fait une photo de chaque porte, sortie ou sas. Et tu devrais goûter ces machins-là, je lui montrai du doigt le stand de chocolat que j'avais quitté à contre cœur.
Un serveur endimanché nous proposa une coupe de champagne millésimé, il était seize heures, ce n'était pas dans mon habitude. Mais J accepta, alors je l'imitai. Une hôtesse vint nous voir :
- On a un boudoir à l'abri du regard des autres clients, si vous souhaitez tenter l'expérience.
Je faillis lui répondre qu'on avait pas besoin d'être à l'abri des regards, mais J prit les devants et suivit la fille. Elle nous installa sur des canapés en cuir matelassés, type Chesterfield. Il n'y avait que des couples dans ce boudoir, et l'ambiance était très feutrée avec la musique jazzy en léger fond.
- On vous apporte du caviar à déguster ? Avec notre dernière édition limitée de champagne grand cru.
Je rêvais d'un coca bien frais, ou d'une de ces vodka cranberry dont raffolait la vieille. J approuva la proposition d'un signe de tête affirmatif. J'essayais de rentrer dans mon personnage de femme aux poches bourrées à craquer de pognon, fallait pas qu'on voit que j'étais qu'une vulgaire serveuse qui se trimballait h24 en baskets déchirées. J, lui, maitrisait bien le personnage.
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Poison Ivy
FanfictionJe ne faisais absolument pas partie de leur monde. J'étais même à mille lieues d'imaginer mon père en braqueur. Mais c'était avant de rencontrer la famille Cody, dangereuse et intouchable. J'ai alors plongé dans l'inconnu, en mettant un point d'hon...