Chapitre 6

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Aujourd'hui (5 ans plus tard)

— Maya, viens, j'ai besoin de te parler.

Je descends rapidement après avoir entendu mon père crier depuis son bureau. Sa voix grave et pressante n'annonce jamais rien de bon.

— Fais-toi belle pour ce soir, nous allons dîner chez un ami de la famille, dit-il calmement une fois que je m'assieds face à lui.

— D'accord... répondis-je, méfiante, avant de filer sans poser de questions.

Alors que je passe la porte, il ajoute :

— Sois prête à 18 heures.

Son ton est plus sérieux qu'à l'accoutumée, et cela ne me rassure pas.

À 16 heures, je décide de commencer à me préparer. Mon père a insisté sur le fait que je sois "belle", ce qui n'est jamais une demande anodine chez lui.

Après une douche rapide, j'opte pour une robe noire près du corps à manches courtes, élégante sans en faire trop. Je complète avec mes talons rose gold de 10 centimètres, fidèles compagnons des grandes occasions. Mes cheveux, coupés au carré il y a quelques mois, restent lâchés, encadrant mon visage maquillé d'un eyeliner discret, d'un mascara qui allonge mes cils, et d'un fard marron et doré subtilement mélangé.

Une dernière vérification dans le miroir : la bombe est prête.

Je prends ma pochette et ma veste et descends dans la cuisine pour grignoter quelque chose en attendant. Le calme de la maison contraste avec l'agitation qui bouillonne en moi.

Gérard, le majordome, m'interrompt alors que je termine mon verre d'eau :

— Mademoiselle Maya, votre père vous attend déjà dans la voiture.

Je le remercie d'un signe de tête et sors. En ouvrant la portière, mon père m'adresse un sourire hésitant, presque nerveux, ce qui est rare chez lui.

— En fait, papa, on va voir ton ami pour quoi ? demandé-je une fois installée.

Il reste silencieux un instant, ses mains serrant légèrement le volant. Puis il lâche :

— Tu... tu vas te marier avec son fils.

Mon cœur manque un battement.

— Pardon ? Et tu m'en informes maintenant ? Genre tu pensais me faire la surprise si je ne posais pas de questions ? Mais pour qui tu te prends, papa ? Tu crois que tu peux contrôler ma vie de cette façon ?

Ma voix tremble, et mes yeux se remplissent de larmes malgré moi.

— Maya, écoute-moi... commence-t-il, mais je ne lui laisse pas le temps de continuer.

— Non, papa, je ne peux même plus dire que tu es un père !

Les mots sortent avant que je ne puisse les retenir, chargés de colère et de tristesse. Je me tourne vers la fenêtre pour masquer mes larmes. Mon monde s'effondre. Toute l'armure que j'ai construite pendant ces cinq années se fissure en un instant.

Le trajet se poursuit dans un silence lourd, uniquement rompu par le bruit de la route.

Après ce qui semble être une éternité, la voiture s'arrête devant un grand portail noir.

— Maya, s'il te plaît, comporte-toi bien ce soir. Je t'expliquerai tout une fois à la maison. On doit beaucoup à cette famille, dit-il d'une voix empreinte de tristesse.

Je le regarde sans répondre. Même si je suis furieuse, je sais qu'il y a toujours une raison derrière ses décisions. Mon père s'est toujours battu pour moi, prenant à la fois le rôle d'un père et d'une mère après le décès de maman. Je lui dois tout.

Il me prend doucement par le bras, et nous entrons ensemble dans la villa.

Le jardin est magnifique, presque irréel. Des fleurs parfaitement entretenues, une fontaine élégante, et des lumières LED qui illuminent le tout d'un éclat subtil. C'est digne d'un conte de fées.

À la porte, une dame d'une cinquantaine d'années nous accueille chaleureusement et nous guide jusqu'au salon.

La pièce est somptueuse, un mélange parfait de vintage et de luxe moderne : un grand lustre suspendu, des tableaux de maîtres, et des fauteuils en velours qui invitent à s'asseoir.

Un couple, probablement les maîtres des lieux, nous accueille.

— Paco, comment vas-tu ? lance l'homme en serrant la main de mon père.

Puis il se tourne vers moi.

— Et toi, tu dois être Maya.

— Enchantée, monsieur, dis-je en lui tendant la main.

— Pas de "monsieur" entre nous. Appelle-moi Patrick, dit-il avec un sourire chaleureux avant de me prendre dans ses bras.

Euh... ok. Affectueux, au moins.

— Et voici ma femme, Delia, ajoute-t-il.

Elle m'étreint à son tour, son parfum léger laissant une impression agréable.

Nous nous installons dans le salon. Mon père et Patrick discutent affaires, tandis que Delia me pose des questions sur ma vie, me parlant aussi de sa famille.

Soudain, la porte s'ouvre. Un jeune homme entre dans la pièce, vêtu d'un jean troué et d'un t-shirt blanc. Ses cheveux blonds décoiffés, son air nonchalant... Il est beau, mais clairement pas du genre sérieux.

— Désolé pour le retard, lance-t-il avant de s'affaler sur un canapé, pieds sur le coussin.

— Aaron, montre un peu de respect, nous avons des invités, gronde Patrick.

Delia se penche vers moi.

— Désolée pour mon fils. Il n'est pas encore très mature, chuchote-t-elle.

Je ris discrètement, bien que légèrement mal à l'aise.

— Tu ne croyais pas que c'était lui, ton fiancé ? plaisante Delia.

— Euh... non, bien sûr que non, mentis-je maladroitement.

Aaron se lève, un sourire espiègle aux lèvres.

— Et si c'était moi ? Tu me choisirais au lieu de mon frère ?

— Non merci, répliqué-je en le repoussant.

Tout le monde éclate de rire.

Puis, la porte s'ouvre à nouveau. Cette fois, c'est différent.

Un homme entre, vêtu d'un costume trois pièces taillé à la perfection. Sa démarche est assurée, son regard captivant. Sa mâchoire carrée est soulignée par une barbe de trois jours.

Je le fixe, bouche bée. Il est incroyablement beau. Mais quelque chose en lui me semble étrangement familier.

— Bonjour, je suis Liam O'Brien. Désolé pour mon retard, dit-il en s'approchant.

Et là, tout bascule.

C'est lui.

Liés par le destinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant