Chapitre 11 : Révélation

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Bruce avait rapproché un fauteuil du lit de John et le veillait depuis plusieurs heures à présent.

Après sa crise, une fois le jeune homme endormi, Bruce était d'abord resté quelques instants à ses côtés puis avait finalement rejoint Alfred sur le pas de la porte. Ils avaient tous deux conclu qu'il serait pertinent d'appeler la psychiatre Eileen Williams, tâche dont s'était occupé Alfred tandis que Bruce avait continué à veiller sur John.

Alfred avait joint le service de psychiatrie, ayant au bout du fil un infirmier de garde expliquant, qu'étant dimanche, la docteure Williams n'était pas sur place mais était toutefois d'astreinte téléphonique pour les urgences liées aux familles d'accueil. Le professionnel avait donc pris les coordonnées d'Alfred afin de les transmettre à la psychiatre pour qu'elle le rappelle au plus vite.

Le majordome n'avait eu à attendre que quelques minutes à peine avant que la professionnelle ne rappelle. Alfred avait alors pris le temps d'expliquer toute la situation (évitant néanmoins de mentionner la découverte de la bat-cave, préférant évoquer un « désaccord » comme probable source de la crise de John), et la docteure Williams l'avait écouté avec attention. Une fois le récit terminé elle avait assuré à Alfred que lui et Bruce avaient bien agi, et que d'après ses dires il semblerait que la crise soit passée et qu'il n'y avait donc plus d'urgence. Elle conseilla au majordome d'évaluer si John pourrait bénéficier d'un « médicament si-besoin », sachant que deux sortes lui étaient prescrites en plus de son traitement habituel : un anxiolytique s'il venait à présenter des angoisses, et un neuroleptique s'il présentait des idées délirantes ou des hallucinations à son réveil. Elle conclut en rappelant qu'elle le verrait, comme à leur habitude, en rendez-vous le lendemain et effectuerait une nouvelle évaluation au besoin.

Après ce coup de téléphone Alfred était remonté à l'étage, portant un plateau composé d'un verre d'eau, d'un jus de fruits, quelques gâteaux, un sandwich ainsi que les médicaments mentionnés. Après avoir résumé l'appel à Bruce il lui avait confié le plateau et s'était éclipsé, laissant son jeune maître continuer à veiller sur leur invité ; en effet, Alfred se serait senti de trop. C'était comme si... Comme s'il y avait quelque chose qui avait changé en Bruce. Sa douceur et sa bienveillance l'avaient particulièrement étonné – en bien, bien sûr. A présent il souhaitait le laisser seul, dans cette sorte d'intimité tant avec lui-même qu'avec John.

Le jour commençait à tomber à présent et Bruce fixait d'un air pensif les rideaux desquels filtrait de moins en moins de luminosité. Toujours installé dans le fauteuil près du lit, il était perdu dans ses pensées. Il se rejouait la scène de l'après-midi en boucle dans sa tête, essayant d'en comprendre les tenants et les aboutissants. John avait découvert la bat-cave. John n'avait pas été surpris. Bruce était arrivé et l'avait entendu dire à Alfred qu'il savait, qu'il savait depuis longtemps... Bien sûr que Bruce s'était senti en colère ; comment en aurait-il pu en être autrement ? Cela lui avait alors semblé plus sage de partir, sans commentaire, plutôt que d'exploser face aux deux autres hommes. Mais quand John avait tenté de le rattraper... Sous le coup des émotions, Bruce n'avait pu que le repousser : il n'était pas en l'état de discuter, encore moins de regarder le jeune homme dans les yeux. Les yeux de son ancien ennemi... qui savait. Qui connaissait depuis longtemps son secret le plus précieux.

Et puis John avait fait cette crise. Bruce ressentit une pointe de culpabilité tandis qu'il se demandait si cela avait été provoqué par son geste... Son geste de rejet. Le Joker avait été un fou anarchique et inatteignable. Mais John... John était un jeune homme fragile, ayant réussi à contenir ses pulsions destructrices. Il n'en fallait apparemment pas beaucoup pour le déstabiliser... Bruce avait d'ailleurs eu peur, en l'entendant rire, que le Joker ne se soit réveillé. Mais non. John s'était recroquevillé sur lui-même, en lui-même, luttant probablement contre ses démons intérieurs, tenant des propos incohérents... Bruce avait eu peur. Pas pour lui-même, pas pour Alfred... Mais pour John, qui avait alors semblé si vulnérable. Peut-être était-ce cela qui avait réveillé cette douceur et cette bienveillance que Bruce ne se connaissait pas. Peut-être était-ce cela qui l'avait poussé à prendre soin de lui, et à le veiller avec attention comme il le faisait à présent...

Le Manoir Wayne : lieu d'accueil thérapeutiqueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant