Chapitre 1 : Le projet d'accueil

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En y réfléchissant bien, tout cela avait commencé au trente-et-unième anniversaire de Bruce.

L'année précédente, pour ses trente ans, Alfred avait organisé avec l'accord du concerné une fabuleuse soirée d'anniversaire au Manoir, où avait été invité tout le gratin de Gotham. A cette époque cela faisait déjà plusieurs mois que Bruce avait raccroché la cape du Batman ; pour autant il avait accepté de jouer son rôle de playboy encore quelque temps, afin que l'on n'assimile pas directement la disparition du Batman et le repli de Bruce Wayne.

Alfred avait été ravi d'organiser cette somptueuse soirée. Décorations, invitations sur papier en filigrane, cocktails uniques en leur genre et toasts de caviar... tout y était passé. Et les convives avaient été on ne peut plus ravis ! Même Bruce Wayne avait eu le sourire tout au long de la soirée, prenant plaisir à cette grande festivité... Du moins, c'est ce qu'il avait laissé paraître. Cependant dès la fin de la soirée officiellement annoncée, Alfred avait vu le visage de son jeune maître reprendre immédiatement cette teinte sans joie, et l'avait observé se replier sur lui-même à nouveau, comme il le faisait déjà depuis plusieurs mois.
Et suite à cela... Plus rien.

Plus aucune festivité au Manoir. Plus aucune acceptation de se rendre à un quelconque gala, de participer à quelque sortie que ce soit... Plus aucune femme ni aucun homme n'avait été invité pour partager l'intimité de Bruce ne serait-ce que le temps d'une soirée. L'homme s'était renfermé et plus rien ne semblait l'atteindre.

Alfred avait passé une année entière à faire comme il ne s'agissait là que d'une mauvaise passe, persistant à croire dur comme fer qu'un de ces jours le jeune Bruce retrouverait de l'intérêt dans son quotidien et du plaisir à vivre. Mais les mois étaient passés et Bruce était resté reclus dans ses quartiers. Son seul contact avec un autre être humain se produisait lors des quelques discussions qu'il entretenait avec son majordome lors des repas – lorsque le jeune propriétaire du manoir acceptait de manger, bien sûr... Ce qui arrivait de moins en moins souvent, celui-ci prétextant souvent ne pas avoir faim ou ne pas avoir envie d'un véritable repas.
Ceci inquiétait d'autant plus ce cher Alfred Pennyworth.

Pour les trente-et-un ans de Bruce, Alfred avait proposé d'organiser une nouvelle soirée, du même style que l'année précédente ; toutefois Bruce avait refusé. Malgré ce refus, la détermination d'Alfred ne s'était pas tarie ; c'est pour cela qu'il s'était tout de même affairé à préparer un beau festin pour cet anniversaire-ci, même s'ils ne seraient que deux à le célébrer. Alfred tenait à apporter un peu de joie et de vie dans le quotidien de son jeune maître.

Lorsqu'il était descendu pour le repas d'anniversaire, Bruce avait quasi immédiatement demandé à son majordome d'éteindre la musique que celui-ci avait mis en fond sonore. Puis ils s'étaient tous deux attablés dans le silence, Bruce ne répondant que par monosyllabes aux tentatives de discussions lancées par Alfred. Le repas n'avait pas duré plus de vingt minutes et, juste après, Bruce s'était directement réfugié dans ses appartements en prétextant qu'il avait à faire. Alfred s'était donc retrouvé seul face à la table ornée de confettis et de serpentins.

Oui, en y réfléchissant, c'est sûrement là que tout avait commencé. Alfred avait senti ce poids dans sa poitrine, face au silence et à la solitude qui régnaient dans le Manoir en pareille occasion.

Cela ne pouvait plus continuer ainsi, s'était-il dit. Et il avait eu une idée. Si Bruce Wayne ne souhaitait pas sortir de sa torpeur, et bien soit, Alfred ne pouvait pas l'y forcer. Dans ce cas peut-être fallait-il prendre le problème en sens inverse : si Bruce ne sortait pas à la rencontre de la vie, alors il faudrait faire venir la vie jusqu'à lui.

Pendant les semaines suivantes, Alfred avait essayé d'imaginer diverses façons de concrétiser cette idée. Il avait tout d'abord pensé à restaurer une partie du Manoir inutilisée afin d'en faire un espace ouvert au public pouvant accueillir diverses expositions ; Alfred avait toujours eu une sensibilité pour l'Art et il savait que cela ne laissait pas son jeune maître indifférent.

Le Manoir Wayne : lieu d'accueil thérapeutiqueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant