PARA TI

Chapitre 3

Bonne lecture 🤍.

IVY

Le moteur de la voiture ronronne doucement sous mes doigts crispés sur le volant. L'autoroute défile sous les roues, bordée de collines arides et d'un ciel bleu éclatant. À côté de moi, Isalia fredonne distraitement, ses doigts tapotant la portière au rythme de la musique qui sort des haut-parleurs. Elle a l'air beaucoup plus détendue que la veille, même si elle n'est pas totalement comme à son habitude, ça me fait quand même plaisir de constater une amélioration du côté de son morale, c'est exactement pour ça que je voulais qu'on s'occupe à faire quelque chose ailleurs. Juste pour elle.

-On y est presque, tu le sens ?

Je hoche la tête, incapable de décrocher mes yeux de la route. Mon estomac se tord un peu plus à chaque kilomètre qui nous rapproche de Málaga. Je n'avais pas remis les pieds dans cette ville depuis des années, et maintenant que nous étions à moins d'une heure d'y arriver, une sorte de vertige me prenait. Des souvenirs que j'avais soigneusement enterrés remontaient à la surface.

-C'est ta mère qui te stresse comme ça, ou c'est... tout le reste ?

-Un peu des deux, je suppose. Ça fait tellement longtemps. J'ai l'impression que revenir là-bas... ça va réveiller des trucs que j'aurais préféré oublier, du genre pour toujours tu vois ?

Je ne sais pas comment lui expliquer ce que je ressens vraiment. Málaga, pour moi, ce n'est pas juste une ville. C'est un endroit chargé de souvenirs, de blessures jamais vraiment guéries. Retrouver ma mère... C'est une chose. Mais retrouver la version de moi que j'avais laissée là-bas ? Ça, c'est terrifiant.

Isalia tourna la tête vers moi, ses yeux brillants d'un mélange de tendresse et d'amusement :

-Franchement, qu'est-ce qui pourrait mal se passer ? Ta mère est... ok, une tornade ambulante, mais c'est juste pour organiser un mariage ! Ça va juste être quelques jours à courir dans tous les sens et à gérer des fleurs.

Je lâcha un petit rire nerveux.

-Des fleurs et des drames de tous les côtés !

Elle secoua la tête en roulant des yeux, toujours aussi sûre d'elle.

-Ta mère est spéciale, je te l'accorde. Mais elle t'aime, à sa façon. Et surtout, n'oublie pas que tu n'es plus cette gamine perdue qui vivait dans son ombre.

Elle a raison. Je ne suis plus cette fille effrayée par l'ombre de sa mère, par cette ville, par tout ce qu'elle a vécu là-bas. Mais malgré tout, une part de moi se sent toujours prisonnière du passé, comme si je suis incapable de tourner définitivement la page.

Le paysage commence rapidement à changer. Les collines se font moins abruptes, et au loin, je distingue déjà les contours familiers de Málaga. Mon cœur s'emballa. Ce n'était plus qu'une question de minutes avant que je ne franchisse à nouveau les limites de la ville que j'avais autrefois appelée « chez moi ».

Ces rues, ces quartiers... tout allait me rappeler ce que j'étais, ce que j'avais fui. Et il y a aussi ma mère. Cette femme qui semble avoir le don de me faire sentir minuscule, peu importe à quel point je pense avoir grandi.

Nous roulions maintenant dans les premières avenues de Málaga. Les bâtiments blanchis par le soleil, les trottoirs bordés de palmiers. Tout était là, inchangé, comme figé dans le temps. Pourtant, moi, j'avais changé. Enfin, je l'espérais.

J'essaie vraiment de me rappeler que ce n'est que temporaire. Que je suis ici pour aider ma mère à organiser un mariage, pas pour affronter tous mes fantômes. Mais c'est plus fort que moi. Tout en moi me dis que revenir ici va au final, tout compliquer de mon côté.