Chapitre 5

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Finalement, après le choc des révélations que m'a fait François, j'ai commencé à me demander si c'était vrai, si c'était faux. Mais pourquoi a-t-il attendu autant de temps avant de me dire ça si c'est faux ? Et pourquoi je n'ai rien trouvé dans les archives si c'est vrai ? Tout ça a réussi à me perdre dans ma propre tête, dans ma propre maison, à tel point que c'est papa qui s'occupe de Dave depuis. Je ne vois plus le temps passer tant je réfléchis à tout ça. Un jour, je veux m'aérer l'esprit, et lorsque mon père me voit sortir de ma chambre, j'ai l'impression qu'il a vu un fantôme, comique, n'est-ce pas ? Il me demande si je vais mieux, si j'ai besoin de quoi que ce soit. C'est vrai que la plupart du temps quand il m'amenait mes repas je ne touchais quasiment à rien. J'ai simplement répondu que oui, je vais mieux, ce qui est un mensonge, que je sors et que j'en profiterai pour passer du temps avec Dave. Il a l'air soulagé mais ne me croit pas totalement, je le vois dans ses yeux. Après avoir attaché le harnais à Dave, je ferme la porte et pars en direction du parc. Je déambule sans vraiment avoir d'itinéraire précis. Je regarde les ruelles que je vois depuis des années, des grandes maisons de briques, un chemin de pelouse, des arbres alignés et symétriques par rapport à la route. Puis en sortant de ce quartier, pour aller jusqu'au parc, d'autres maisons mais en bois sombre cette fois-ci, faisant penser à des chalets. Le parc est au milieu de ce quartier aux maisons boisées. Et à un moment, je vois, assis sur un banc, à l'extrémité du parc, François, le vieux bibliothécaire, ça faisait au moins deux bons mois que mes visites à la bibliothèque n'étaient plus ma priorité. Je commence à faire demi-tour, lorsqu'il finit par m'apercevoir, alors, malgré toutes mes espérances, il m'appelle. 

-Johan !

Je commence à accélérer le pas mais une deuxième fois j'entends le vieux m'interpeller.

- Johan ! S'il te plaît... J'ai à te parler.

Alors je m'arrête sans vraiment savoir ce que j'espère et, au final, je le vois arriver, essoufflé, à ma hauteur.

- Je suis tellement navré... Je ne voulais pas te faire peur, je m'en veux terriblement.

Je ne dis rien.

- Il ne faut pas abandonner, je peux t'aider si tu le souhaites.

La dernière fois qu'il avait voulu m'aider, ma conscience était partie en roue libre pendant deux mois. Mais il a raison, avec le recul, je me rends compte qu'avoir mes croyances brisées, comme c'est arrivé, est certes, choquant, mais nécessaire.

- Vous avez raison, je dois me reprendre.

- Je suis ravi de te l'entendre dire. Venez demain matin à la bibliothèque et nous reprendrons tes recherches.

- Venez ? Oh !

J'avais totalement oublié l'existence de Dave, j'avais tellement honte.

- Oui bien sûr, demain matin à la bibliothèque, c'est noté.

- Bien, alors nous nous verrons demain.

- Oui, à demain.

Nous repartons alors à la maison, et le poids que j'avais sur les épaules s'est enfin envolé. Le lendemain, nous nous retrouvons alors à la bibliothèque comme avant cette césure. Et nous reprenons nos recherches sur l'ancienne planète, la vôtre, et sur la fameuse puce. Plusieurs jours s'écoulent et je fini par avoir une envie des plus extrêmes, mais je me dois de la réprimer. Après une semaine et demie de recherches, des voix s'élèvent dans le couloir. Alors nos têtes se lèvent automatiquement vers la source du bruit.

D'un coup, la porte s'ouvre et une dizaine d'hommes en blouses blanches entrent dans la pièce. Je les reconnais directement.

- Les bienfaiteurs ? m'exclamé-je.

- Alors c'était ici que tu étais parti te fourrer avec eux, François ? dis le plus avancé, avec un sourire narquois.

C'est vrai qu'ils sont ses anciens collègues mais que font-ils ici ?

- Nous sommes venu t'arrêter pour diffusion d'informations confidentielles et pour enlèvement d'animaux appartenant aux bienfaiteurs.

- Je savais que ça allait finir par arriver... dit François en baissant la tête.

- Bien. Toi ! dit celui qui ressemblait au chef du groupe de bienfaiteurs en me pointant du doigt, je vais te raccompagner chez toi et te faire surveiller pour être sûr que tu n'iras pas propager du contenu diffamatoire à notre propos. Allons-y. Vous ! s'exclame-t-il en se retournant vers le reste des hommes en blouses blanches, emmenez-le.

Je ne peux rien faire pour François, Dave aussi veux l'aider mais je le retiens dans mes bras du mieux que je le peux. Je préfère ne pas me mettre les bienfaiteurs encore plus à dos. Je ne pensais pas qu'ils auraient le temps de chercher François, s'ils sont venus jusqu'ici, c'est presque évident que ça montre que tout ce que le vieux bibliothécaire m'a dit est vrai. Ce n'était pas encore clair dans mon esprit, mais voilà que leur venue me l'a confirmé. Papa, me voyant arriver avec un bienfaiteur, écoute tout ce qu'il lui dit. J'ai tellement honte du regard déçu qu'il me lance, que je ne fais pas attention à tous les bobards que l'homme lui raconte. C'est comme si mon corps était là mais pas le reste, papa me dit que je dois rester dans ma chambre jusqu'à nouvel ordre. Deux jours après, il m'apprend que la bibliothèque est fermée et que François a été incarcéré pour six mois. Je me dis que ce n'est pas beaucoup pour ce qu'il a fait, mais que les bienfaiteurs ont sûrement encore falsifié la vérité pour que les gens ne sachent pas ce qu'ils font sur notre dos. Dave et moi ne pouvons ni sortir, ni regarder la visionneuse, une télévision comme la vôtre, avec l'odeur, les sensations et l'image holographique. Papa a récupéré l'appareil ainsi que tous ceux que je gardais dans ma chambre. Alors je regarde par la fenêtre, apercevant celui qui a pour devoir de vérifier que je ne "propage pas de contenu diffamatoire", en pensant à ce que l'on pourrait faire lorsque François serait sorti de prison, je me demande si je pourrais peut-être, un jour, rejoindre votre "Terre''. 

Et si c'était possible ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant