Chapitre 2- Le premier cours

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- Bonjour à tous. Je serai succin.

L'empereur marqua un temps de silence et balaya de son regard perçant l'assemblée muette devant lui. Il reprit.

- Vous n'êtes pas sans savoir, que le contexte actuel est tendu. Notre enseignement, bien que se revendiquant d'une approche holistique, sanctionnera très sévèrement, proportionnellement et sommairement tout acte de rébellion, aussi infime soit-il.

Aucun élève ne cilla d'un cil. Moi non plus, bien que ses propos m'avaient tétanisée, je déshabillais de mon regard l'empereur. Son aura était hypnotique. Comment pouvait-on afficher autant d'assurance, de logique et de dédain avec des propos aussi cyniques?

- Concernant la classe qui aura l'illustre récompense de suivre mon instruction, ce sera la A4. Je laisse au bon soin de notre recteur de vous expliquer les détails de cette année.

Il descendit de l'estrade, puis sortit par la grande porte ornée de bois massif en parcourant l'allée centrale de la salle. Le tout, dans un silence presque religieux.

Le recteur arriva avec ses feuilles, tremblant et bégayant.

- Bon... Bonjour à tous, en premier lieu je vais vous annoncer les cours.. euh classes.

Un vrai homme de paille, pensais-je.

Et il ne fut pas dégourdi, bien que nous ne soyons seulement 100 élèves, l'attribution des classes me sembla durer des heures.

- Lily Devallière, A2... oh non je me suis trompé de ligne.. euh. A4.

Un frisson parcouru ma colonne vertébrale lorsque j'entendis mon nom. J'étais dans la classe de l'empereur. Je voulais éviter cela, c'était pire qu'une malédiction. Je me sentis tel un agneau parmi les loups. Seuls les fils et filles proches de l'empereur pouvaient prétendre à recevoir son enseignement. Ma présence dans cette classe sera inévitablement remarquée et je ne serai pas en sécurité. Mes espoirs d'avenir étaient en train de devenir un cauchemar éveillé. Mes camarades seront sûrement aussi sanguinaires et endoctrinés que leurs parents.

Après diverses annonces interminables, le recteur nous envoya en cours.

J'atteignis ma salle de cours. Notre premier cours s'intitulait "stratégie de la guerre". Pour un empereur annonçant la paix, c'était paradoxal. La classe m'ignorait toujours, et c'était tant mieux, car je ne souhaitais pas revivre le même enfer que par le passé. L'empereur arriva et la classe se tut.

Sa démarche était lente, gracieuse. C'était à mes yeux un monstre sanguinaire, coupable de la précarité de mon pays et pourtant là, devant moi, je ne voyais qu'un homme irrésistiblement attirant. Et d'ailleurs toutes les filles de la classe paraissaient du même avis. Elles se mirent à remettre leurs cheveux derrière leurs oreilles et à minauder un sourire au coin de la bouche.

Je choisis l'option de baisser le regard.

Il se mit à faire l'appel.

- Grégoire..., Arthur...., Lisa...., Lily.

Il s'arrêta. Je levai la tête, et rencontrai son regard. Se fut intense, déstabilisant, cela dura bien 10 secondes. Mais je ne laissai rien paraître.

Il dit.

- Lily... intéressant, jamais personne de votre classe sociale n'avait eu les capacités d'intégrer mon Université.

Je baissa le regard. La classe se mit à me regarder. Les filles se mirent à me lancer des regards noirs.

Enfin, on me voyait. Mais ça n'était certainement pas ce que je souhaitais.

Le cours reprit son cours sur des sujets que j'avais déjà étudiés, notamment des rébellions récentes et sur les différents moyens stratégiques de pallier une insurrection. Tous étaient empreints d'une violence inouïe, même si ils suivaient une logique cartésienne. Convaincre par tous les moyens les parties prenantes, sévir drastiquement et en place publique, soumettre la population à un soutien inconditionnel et mettre en avant des débats sur des sujets futiles, ou de récréation.

La cloche sonna. Nous partîmes. En tant que seule fille du peuple, je découvris ma petite chambre de bonne, à part, située dans l'aile droite de l'université. Je m'endormis en pensant étrangement à l'empereur et son regard noir, perçant, qui avait fait frissonner l'entièreté de mon corps.

L'empereurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant