Indirect guilty

Titre du Chapitre

Mon réveil sonne, il est 9h et je sais déjà que ma journée va être longue et pénible.
Mais je n'ai pas le choix, je me lève.
Pourtant, à peine mon pied posé à terre, je sens une fatigue morale et physique intense me submerger.
Je me dirige droit sur la machine à café, au moins la chaleur dans ma gorge, va pendant l'espace d'un instant me faire du bien.
Puis je vais prendre une douche, la première d'une longue lignée hebdomadaire. J'ai froid, j'ai du mal à me réchauffer.
Quand je vois mon reflet dans le miroir, je ne me reconnais pas, je suis d'une pâleur inquiétante avec de larges cernes sous les yeux, il faut que j'arrête d'accepter tous ces verres que l'on m'offre, j'ai trop d'absences ces derniers temps.

Je n'en reviens pas, demain j'ai 25 ans et mise à part, Julie et Clara mes copines d'enfance, personne ne le sait.
Mes parents ne m'appelleront pas je le sais, je ne les ai pas vu depuis plus de 3 ans, ils n'ont jamais cherché à me contacter, moi non plus d'ailleurs...
J'ai tout de même hâte d'être à demain, Julie a dit me prévoir une petite surprise pour mon anniversaire, mais pour la seule soirée tranquille que j'ai de la semaine, ça serait mieux que je me repose !

Il faut que je me dépêche, je suis en retard et il n'aime pas ça du tout.
En plus il faut que je débriefe avec les autres filles, j'espère que Samantha est revenue parce que je suis fatiguée de toujours la remplacer, mais à chaque fois il me dit « c'est toi la meilleure, tu y vas! ».

Je sors de ma salle de bain avec juste un linge autour de moi, je me sèche vite, j'enfile un jean slim, un petit top blanc, on est au mois de mai, je n'aurai pas froid, je prends le peu d'habits que j'ai besoin pour mon travail et les fourrent dans un petit sac.
Je repense à la soirée, j'essaie en vain de me rappeler mais je ne sais pas comment je suis rentrée cette nuit, aucun souvenir, ce n'est pas bon...
J'attrape mon sac et me dirige vers la porte.
Mais, j'allais oublier, je me retourne en regardant Sacha, il a remarqué mon regard et vient se frotter contre mon jean.
-  Attends, je vais chercher tes croquettes...
Il ronronne à pleine puissance, au moins avec lui, je ne suis pas obligée de me forcer, j'aime le caresser et il me le rend bien.
Cette fois, il est temps, je sors en claquant la porte, il est 11h et le club m'attend...

Arrivée en bas de mon immeuble, mon portable sonne. Je sais déjà qui m'appelle, je dois répondre, Yvan ne supporte pas attendre alors je décroche :
-  Allo?
-  Qu'est-ce que tu fous? On t'attend !
-  J'arrive je suis en voiture...
Je lui mens avec ma voix la plus douce pour éviter qu'il ne s'énerve.
Il raccroche immédiatement. Je me dépêche, j'ouvre ma portière.
J'aime ma vieille voiture, c'est une petite citadine rouge, elle pourrait presque être de collection et elle ne m'a jamais fait faux bond.
Je sais pas pourquoi, mais ce matin, je repense à ma vie d'avant...
Tout était calme, fluide et sans angoisse.
Je voulais passer ma licence en sciences de l'éducation, j'aurais aimé être professeur des écoles, depuis toute petite d'ailleurs.
Mes parents m'encourageait énormément. Pour eux aussi tout était calme enfin presque...
Ils habitaient à Grigny, dans la banlieue sud de Paris, dans un appartement social, on n'avait pas suffisamment d'espace pour jouer et s'épanouir, mais on était heureuse avec ma petite sœur, Sara.
Oh, Sara... j'ai un frisson qui me parcoure et j'ai du mal de déglutir.
Mais il faut que je me reprenne, dans une demi-heure je suis sur scène.

Pour une fois, je suis contente, je trouve assez facilement une place pour me garer à 5 minutes du club.
Je prends tout ce dont j'ai besoin et me dépêche.
J'arrive devant l'enseigne « Strip Paradise » et mes yeux se posent immédiatement sur les néons qui clignotent rouge. Je ne me rappelle même plus depuis combien de temps, je travaille dans ce club de striptease, où « le client est plus que roi » selon Yvan.
On ne doit absolument rien lui refuser...

Je passe par la porte de derrière. Lorena la rousse vient d'arriver aussi, je la vois discuter avec Yvan, elle est tendue, ses épaules sont affaissées.
Yvan est un homme assez grand avec une musculature imposante, des cheveux noirs et un regard perçant. Il n'y a pas beaucoup de monde qui ose le contredire, surtout pas nous les filles, ou plutôt « ses filles » comme il dit.
Soudain, il tourne la tête et me voit (à chaque fois que je croise son regard il me dégoûte), mais je suis contente il a l'air de bonne humeur, il me fait un grand sourire.
Par contre je vois tout de suite à ses yeux, qu'il est défoncé. Ça n'augure rien de bon.
-  Milla, juste à temps, dit-il,
-  Ouais, je t'avais dit que j'arrivais,
-  Tiens, je fais la distribution ce matin...
Et dans ma main, il dépose une boîte de capote, c'est le petit rituel de la semaine. Je le toise mais ne dis rien.
-  Et ben, on dit pas merci « Lolita » ? Ironise-t-il en me mettant une main au cul.
Je déteste quand il fait ça, j'ai envie de le gifler mais le remercie tout de même et file dans les vestiaires me transformer en Lolita.
Toutes les filles se préparent, je ne vois pas Samantha, je vais devoir finir la nuit pour la remplacer, ça me tue !
Je me maquille plus qu'il n'en faut.
J'enfile soigneusement mon ensemble de lingerie en dentelle noire avec jarretière, puis pour que mon striptease soit complet, je rajoute une nuisette à ourlet de la même couleur, tout aussi sexy et pour finir une paire de botte blanche à haut talons fins.
Je me fais une coiffure sensuelle avec un chignon coiffé-décoiffé.
Quand Yvan se met à hurler :
-  LOLITA !!! Putain quand tu veux !!!
-  Je suis prête, j'arrive...