Chapitre 18 : Judith

4 2 0
                                    

Je suis heureuse de voir qu'Elena est dans le salon convivial, ses écouteurs dans les oreilles, avec un grand sourire sur ses lèvres.

Je m'approche d'elle mais je ne veux surtout pas la déranger, elle a l'ai si paisible, alors, je décide de m'assoir sur le fauteuil d'à côté en attendant qu'elle remarque ma présence.

« Oh Judith ! Tu es là depuis longtemps ? Désolée, je ne t'avais pas vue ! me surprend-t-elle.

- Non ne t'en fais pas ! J'ai vu que tu étais tranquillement en train d'écouter de la musique et je ne voulais pas te déranger, alors j'ai attendu que ce soit toi qui viennes à moi.

- Oh mais tu ne m'aurais pas dérangée tu sais ! Je suis ravie de te parler, tu m'as beaucoup manqué ! »

Notre discussion continue encore quelques minutes durant lesquelles on échange sur des banalités. Je suis plus qu'heureuse de retrouver mon amie qui, malgré tout, a l'air très joyeuse.

« Dis voir Elena...

- Oui ?

- Je me demandais... Pourquoi... Enfin... Comment...

- Pourquoi je suis partie de l'hôpital psychiatrique ? me coupe-t-elle.

- Oui c'est ça. Désolée ça ne me regarde pas, mais, je me suis tellement inquiétée pour toi ! Je t'ai vu sortir en larmes du cabinet de Patricia et... j'ai remarqué le regard que tu m'as lancé. Il était rempli de haine. Peu importe ce que je t'ai fait, je m'en excuse, je ne recommencerai plus ! Et je m'excuse d'autant plus que je ne sais pas ce que j'ai fait... J'ai demandé à Patricia de m'en dire plus mais elle a refusé de me le dire par soucis de secret professionnel. Elle m'a expliqué que si je voulais en savoir plus, je devais te le demander à toi.

- Oh Judith... »

Après ces mots, son regard s'est embué de larmes.

« Oh. Je suis tellement désolée Elena ! Je ne pensais pas t'avoir rendu si triste ! Je...

- Non Judith. Tu te trompes sur toute la ligne.

- Comment ça ?

- Je vais t'expliquer. Déjà, tu dois savoir que si je suis internée ici, c'est parce que... » Sa voix baisse un peu. « Je suis bipolaire. Oui, voilà. Je souffre de bipolarité et quand je suis arrivée ici, je ne croyais pas les médecins quant à mon diagnostic. Je les prenais pour des fous, des incompétents. Alors quand j'ai eu mon premier rendez-vous avec Patricia et qu'elle m'a parlé de ça... J'ai eu beaucoup de mal à l'accepter. Mais, avec le recul, je me suis rendue compte que c'était sûrement vrai. Cela expliquerait tellement de choses. »

Je suis autant étonnée que bouleversée. La pauvre... Et dire qu'elle a dû traverser ça toute seule.

« Et donc... » Elle reprend. « Quand je suis sortie du cabinet et que je t'ai vu toute joyeuse à l'idée de voir Patricia je- je n'ai pas compris. J'ai ressenti de la colère envers toi mais celle-ci n'était pas légitime et tu n'as pas du tout à t'en vouloir de quoi que ce soit ! Tu es une amie en or et c'est plutôt moi qui devrais m'excuser de t'avoir rendue si malheureuse et inquiète !

- Oh Elena ! Tu es toute pardonnée ! Je te comprends ! Ça n'a pas dû être facile ! Mais du coup, comment tu as fait pour te cacher tout ce temps ? »

Elle m'a alors expliqué avoir erré dans les rues plusieurs heures et, quand la nuit est tombée, elle a été repérée par une femme qui gère un centre pour les mineurs sans abri. Cette femme lui a proposé de venir passer quelques nuits dans son établissement. Elle a accepté en pensant que c'était sûrement la meilleure façon de se cacher. Personne ne penserait à venir la chercher ici !

Seulement, au bout d'un moment, Jennie, la femme qui gère le foyer, s'est mise à en voir de toutes les couleurs par Elena qui, ne suivant plus de traitement pour sa bipolarité, était devenue invivable. C'est quand elle a commencé à devenir menaçante envers tout le monde qu'elle a décidé d'appeler la police. En se rendant sur place, quelle ne fut pas la surprise pour les policiers de constater qu'il s'agissait de la jeune fille qui s'était échappée de l'hôpital psychiatrique d'Oston et qu'ils recherchaient depuis plusieurs jours ! Dès lors, ils l'ont reconduit au centre !

Depuis, elle reprend son traitement et commence à accepter sa maladie bien que cela lui fasse beaucoup de mal et soit difficile à admettre.

« Elena, tu es une personne tellement forte ! Sache que désormais tu ne seras plus jamais seule ! Tu pourras te confier à moi et je vais tout faire pour t'aider et pour que tu te sentes mieux ! »

À la suite de ces mots qui sont des plus sincères, je vois le regard d'Elena s'illuminer et briller par des larmes qui pointent au coin de ses yeux. Mais, cette fois-ci, ce ne sont pas des larmes de tristesse ou de honte, bien au contraire. Ce sont des larmes de joie et je suis heureuse d'en être la responsable.

Nous sommes restées enlacées pendant de nombreuses minutes, sans rien dire. Nous avons simplement profité de ce moment réconfortant pour elle comme pour moi car, ça fait toujours beaucoup de bien d'avoir une épaule sur laquelle se reposer quand on a l'impression d'être en train de tomber dans un gouffre sans fin dont on ne sait pas si on pourra un jour s'en sortir.

Quand vient l'heure du dîner, j'explique à Elena que je ne viendrais pas avec elle. Que je n'en voie pas la peine car dans tous les cas, une sonde nasogastrique me sera posée très rapidement. On se dit alors à demain et je me dirige vers les douches.

Quand je sors de la douche, je suis surprise de voir Georges à l'entrée de la pièce. Ces salles de bain sont réservées aux filles de l'établissement et même si un surveillant est obligatoire à partir du moment où une interne est dans les douches, ce doit être une fille.

Gênée, je resserre la serviette autour de mon corps et baisse le regard en me dirigeant vers les vestiaires prévus pour que l'on puisse se rhabiller en toute intimité.

Je remarque que Georges m'a suivi que lorsque sa main vient bloquer la porte de la cabine dans laquelle je suis rentrée pour me changer.

Je sursaute puis frissonne de peur quand il me dit : « Moi qui adore les filles fines, je ne pouvais pas rêver mieux avec un coton tige comme toi. »

Seconde chance (1er jet / EN PAUSE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant