Quand ma mère vient me réveiller ce matin à six heures, cela me fait vraiment bizarre et pourtant, je sens que ça lui fait plaisir et le plus grand bien, et je dois avouer qu'il en est de même pour moi. Ça faisait tellement longtemps qu'il n'y avait pas eu de moment mère et fils entre elle et moi.
C'est quand je me lève de mon lit que je remarque que l'angoisse a pris possession de mon corps. Je tremble tellement que je suis obligé de me rassoir pour éviter de tomber.
Deuxième tentative, ma tête tourne et je sens des nausées qui arrivent. Je me presse d'aller aux toilettes et je m'agenouille devant celle-ci. L'odeur du café vient accentuer mon envie de vomir et, je reconnais le pas lourd de mon père s'approcher. Il toque à la porte.
« Edward ? Tu vas bien ? »
Je suis incapable de répondre. Je sens que le moindre mot qui sortira de ma bouche aura raison de ce que j'ai mangé la veille et que je n'ai pas encore totalement digéré.
Voyant qu'il n'y a pas de réponse, mon père me prévient : « Je vais rentrer Edward, d'accord ? »
Sa question est plutôt une affirmation. Je sens dans sa voix qu'il s'inquiète. Le pauvre.
Quand il entre et me voit, il s'empresse de poser sa tasse de café pour me relever doucement et m'aider à m'assoir sur les toilettes.
« Oh Edward, ça ne va pas ? Tu ne te sens pas bien ? Tu sais si tu es malade tu peux rester à la maison, c'est autorisé dans les conditions données par le directeur de l'hôpital. Ta mère et moi auront juste à fournir un justificatif et...
- Ça va papa. » Je le coupe. « Je t'assure que ça va. » Je me lève et lui dit d'un ton rassurant : « Tu vois, tout va bien. Je ne suis pas malade, c'est juste, le stresse qui me rend nauséeux.
- Tu as peur de retourner au lycée ? Tu sais tu n'as pas à t'inquiéter, tu n'as pas loupé tant de cours, je suis sûr que tu vas vite rattraper ton retard ! Tu es un garçon si intelligent. Ta mère et moi sommes si fier de toi tu sais !
- Merci papa mais non, ce n'est pas ça. C'est...
- Oh je vois ! Tu appréhende le trajet en bus. Je comprends. Si tu veux je peux t'emmener en voiture ! Ou bien on peut même y aller à pied si tu préfères ! Tant pis si tu arrives en retard ! Je suis sûr que tes professeurs et Monsieur Garden comprendront !
- Non papa. Ce qui me fait peur c'est le regard des autres. Tu sais, ils sont probablement tous au courant de ce qui nous est... de ce qui m'est arrivé et les professeurs ont sûrement déjà prévenu les élèves de mon arrivée aujourd'hui. Ils font toujours ça pour rendre à l'aise les nouveaux mais moi, je ne pense pas que ça m'aide à me sentir mieux, bien au contraire.
- Oh je vois... Malheureusement je ne peux pas faire grand-chose je suis désolé mon fils. Mais, en revanche ce dont je suis certain c'est que tout va bien se passer ! Tu retrouves ton lycée d'avant qui n'a pas changé d'un pouce ! Il est toujours aussi dépravé qu'à l'époque où j'y étais tu sais ! Et puis tu vas retrouver tous tes amis à qui je suis sûr que tu as beaucoup manqué et qui ont hâte de te retrouver j'en suis certain !
- Tu as sûrement raison papa. Merci beaucoup. » Je réponds en souriant.
Il me rend mon sourire, se redresse et me tourne le dos pour se rendre en direction de la cuisine. Alors qu'il s'apprête à en passer la porte, ses paroles quant au trajet en bus me reviennent en tête.
« Euh papa ! » Je l'interpelle.
« Oui ?
- Tu penses que... Enfin... Ça ne te dérangerait pas de... Je veux dire, tu étais sincère quand tu me proposais de m'accompagner au lycée à pied ? »
Il me répond qu'il est d'accord et qu'on pourrait faire ça tous les jours de la semaine s'il le fallait. Je suis heureux car c'est la route qu'on empruntait Thaïs et moi quand l'accident est arrivé et je ne me sens pas capable de la reparcourir en voiture et encore moins en bus avec un inconnu au volant.
***
J'arrive au lycée essoufflé et les joues cramoisies. On a beaucoup rigolé sur le chemin avec mon père, notamment à cause du verglas qui nous a fait glisser et qui a manqué de nous faire chuter à plusieurs reprises. On aurait dit des enfants de cinq ans qui découvre l'hiver. Ça fait beaucoup de bien.
« Bon et bien je te laisse ici ! N'oublie pas, tout va bien se passer ! Je viens te rechercher à dix-sept heures. Tu as ton téléphone, si tu as le moindre souci, contacte-moi. Je t'aime Edward, je suis si fier de toi.
- Merci papa. Je t'aime aussi. À tout à l'heure. Fais attention à pas te casser un bras en repartant ! »
Il rigole en me tournant le dos et s'en va. Il fait à peine quelques pas et manque déjà de tomber à la renverse. Il se retourne pour vérifier si je l'ai vu et mon regard se fait malicieux et signifie « Oui papa j'ai tout vu. » On rit tous les deux et il s'écrit « Ils ne savent pas mettre de sel sur les trottoirs dans cette ville c'est pas possible ! » Je ne peux plus m'arrêter de rire, surtout en le voyant descendre la côte avec difficulté et appréhension et, c'est en rentrant dans l'enceinte du lycée que je me rends compte que le stresse m'avait enfin quitté mais qu'il est malheureusement de retour suite aux nombreux regards qui se posent sur moi et aux chuchotements.
Je souffle, baisse la tête et me dirige vers mon casier pour y déposer les affaires dont je n'ai pas besoin pour le moment. Je sens que les regards continuent de se poser sur moi mais, je décide de prendre mon courage à deux mains et je lève la tête à la recherche de mes amis.
Je finis par les remarquer. Ils sont au coin fumeur, sous le préau. Je me décide à les rejoindre le sourire aux lèvres.
Je vois que Jade m'a déjà remarqué, pourtant, elle ne semble pas se réjouir de mon approche. Ça me fait bizarre de voir ce qui me semble être du rejet dans son regard car avant tout ça, avant l'accident, avant mon placement en hôpital psychiatrique, elle faisait tout pour sortir avec moi et me faisait comprendre qu'elle ferait tout pour moi. Bien qu'elle ne m'intéressait pas, je dois avouer que c'était une très bonne amie et l'une des personnes les plus importantes à mes yeux. Alors, ce que je lis dans ses yeux me rebute et je décide de faire demi-tour.
Cependant, Lucas, mon meilleur ami, du moins, il l'était avant, me remarque et m'appelle.
« Eh Edward ! Viens par ici mon pote ! »
Je souris et à ce moment-là je me dis que je me suis trompé, que j'ai mal interpréter le regard de Jade. Pourtant, quand je m'approche d'eux et que je m'apprête à répondre, je remarque que Jade leur chuchote quelque chose et je suis persuadé de lire de la colère sur son visage.
Alors que je rentre dans leur cercle, Jade s'en va en criant : « Bien ! Puisque ça ne vous dérange pas de trainer avec un fou, moi je m'en vais ! Je ne veux pas être avec lui ! Je ne veux pas être folle à mon tour ! C'est contagieux ces choses-là ! »
À ces moments, mon cœur rate un battement. C'est un cauchemar. C'est pire que je ne l'imaginais avant de venir ici. Je suis à deux doigts de partir, mais je sais que je ne devrais pas. Je dois me battre et prouver à tout le monde que je ne suis pas un fou, que je suis comme eux. Un lycéen comme les autres qui a simplement besoin d'aide.
Je quitte mes pensées quand j'entends la sonnerie. Je vois mon ami Thomas écraser sa clope et il me dit : « Tiens, c'est notre emploi du temps. Avec Lucas et Brenda on a tout fait pour que tu sois dans notre classe. On s'est dit que tu serais moins déstabilisé comme ça. C'est pas qu'on te prend pour un enfant et encore moins pour un insociable hein ! C'est juste que... »
Je le coupe. « C'est parfait, merci, ça m'aide beaucoup.
- Super alors ! Viens, on a cours de français avec Madame Alec. »
Je les suis en salle A042 le sourire aux lèvres. Rien n'est perdu quand on a des amis comme ça, prêts à tout pour nous soutenir. Certes je suis toujours aussi déstabilisé par les regards qui me sont adressés et les chuchotements à mon sujet, et je suis d'autant plus déboussolé par le rejet de Jade mais, je ne suis pas tout seul. Je dois me rentrer ça en tête. Je ne suis plus tout seul dans cette épreuve.
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Seconde chance (1er jet / EN PAUSE)
RomanceEdward, jeune adulte de dix-huit ans, se fait percuter par un camion alors qu'il était en voiture avec sa soeur Thaïs. Cette dernière n'y survit pas. Lorsqu'il apprend la nouvelle, Edward tombe en dépression ce qui l'amène à être interné dans un hôp...