Chapitre cinquième, l'ombre d'une flamme

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Ainsi, donc, Aragorn remonta sur le trône du Gondor et fut forcé d'accepter le contrat que les autres peuples libres avaient eux aussi signé. Les gens de Minas Tirith étaient sceptiques, plus encore sceptiques que Sauron ne l'avait imaginé. Des rumeurs parcouraient les rues, les uns chuchotaient avec d'autres, montraient du doigt, se cachait. Les portes se fermaient, la lumière n'entraient plus dans les maisons fortifiées, clouées de planches ou tout simplement abandonnées. Le peuple avait besoin de confiance et accepter un pacte avec leur ennemi n'était pas exactement ce qu'ils entendaient par confiance - mais ils ne se rendaient pas compte que cela était nécessaire pour leur sécurité. C'est là qu'un nouveau pion entra dans la partie. Ce pion était une elfe et s'appelait Arwen et elle fut couronnée Reine. Et Sauron rit en apprenant la nouvelle, et il s'exclama :

- Bon sang, ce ne sont que des imbéciles ! L'Ââââââmour c'est ça ? L'amour est une souffrance, et un moyen si facile à utiliser pour corrompre.  L'Amour unit, c'est ce qu'ils disent, hum ? L'amour brise !

Et il y avait tant de larmes, dans sa voix, tant d'amertume et au fond, tout au fond, tant de douleur. C'était faux, il le savait. Ces mots ne lui appartenaient pas. Lui, plus que tout autre aurait défendu cette cause. Ces mots étaient ceux de ses derniers souvenirs, ces mots étaient ceux qui accompagnaient la déchirure, ces mots n'étaient pas dirigés contre l'amour, cette haine, cette douleur, il la réservait à quelqu'un d'autre. Quelqu'un qu'il haïssait plus que tout, plus que quiconque, quelqu'un qui l'avait brisé.
Angmar eut la certitude pendant un instant, un seul instant, un si bref instant, que son maitre savait. Alors il chassa cette pensée qui était impossible, inconcevable, mais qui avait semé un doute dans son esprit, malgré tout. Les Seigneurs Sombres ne pouvaient pas aimer. Il songea à Elrond qui avait été piégé avec Celebrian, il songea à ce que son Seigneur lui avait dit "Comme autrefois avec Gorlim". Alors il se rendit compte avec une certaine stupéfaction qu'il y avait deux Ages qu'il ne connaissait pas et même avant, avant qu'on compte le temps, Sauron était déjà là. Maiar qu'il était, il possédait une apparence jeune et gracieuse mais parfois, certains états se succédaient en lui comme des tempêtes venues d'ailleurs dont Angmar ne comprenait pas la source. Parfois le Seigneur Sombre se mettait à parler. Il parlait de personnes, de choses, dont son serviteur n'avait aucune connaissance et il se rendit compte, là comme ça, de la quantité d'évènements qui avaient pu marquer son maitre, lui forger cette connaissance, ce caractère, il se rendit compte que malgré son apparence jeune et cet air juvénile qui passait brièvement dans ses yeux, quelques rares fois, il était aussi vieux que le monde et son esprit devait être lasse et fatigué.

Sauron avait appris à maitriser ses souvenirs. A peu près. En fait, ce n'était pas exactement vrai, il était très fréquent que les réminiscences le frappent de plein fouet, à n'importe quel moment, mais il avait appris à les camoufler. Son visage était devenu impénétrable.

Ainsi les peuples Libres avaient accepté le pacte de PAEIC. Restait à la mettre en place... Sauron détestait la paperasse, rester assis des heures à penser aux moindres détails d'un texte de loi que personne ne lirai jamais, les formalités, tout ça. Pourtant il fallu sept mois avant que tous les textes officiels concernant chaque point du pacte ne soient écrits et approuvés par tous les Peuples Libres. Enfin, les lois passèrent, changeant les codes, bousculant les écrits ancestraux. Beaucoup des habitants n'acceptèrent pas d'abord, protestèrent, mais ils se turent, rentrèrent lentement dans le moule. Et en gage de paix, on demanda que les membres de la Communauté de l'Anneau encore captifs soient relâchés. Effectivement, après près d'un an d'emprisonnement ils retrouvèrent leurs armes, les possessions et revirent la lumière du soleil. Il restait un "hic". Ce "hic" s'appelait Gollum. Malgré des recherches approfondies, aucun elfe, orc, Nazgul, humain, Istari ou qui que ce soit d'autre ne parvint à mettre la main sur le chapardeur. Beaucoup l'avaient oublié. Et pourtant d'autres songeaient qu'il avait encore un rôle à jouer et qui que ce fût, ils avaient peur de ce rôle. Mais Gollum restait en liberté et ils n'avaient aucun moyen de le localiser. Alors ils attendaient que l'heure fatidique arrive.

Le MordoréOù les histoires vivent. Découvrez maintenant