Chapitre 8 - Fraises

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Loëse se penchait au dessus du lavabo et se lavait minutieusement le visage avec de l'eau froide comme pour se réveiller une seconde fois malgré la douche matinale. Il n'avait pas rêvé. La démone était gentille, souriante, aimable, parlait comme un ange. Elle était étrange envers lui. Son comportement était étrange. Mais c'était loin de déplaire à Loëse qui préférait avoir une adversaire assez "gentille " qu'une brute vulgaire à tout bout de champs.

Il humidifiait ses mains avec l'eau s'écoulant du robinet pour mouiller son cuir chevelu déjà sec et s'attachait les cheveux en un chignon haut laissant quelques mèches ondulées s'en échapper naturellement. Un dernier coup d'œil dans le miroir, puis il sortait de sa chambre en direction de la salle à manger du grand bâtiment des anges.

Il s'installait seul dans un coin face à une fenêtre mangeant le contenu de son plateau avec lenteur, puis se décidait à sortir plus tôt qu'il n'était prévu pour les anges qui commençaient leur journée. Il voulait revoir Meyri et surtout Firilia pour voir si son comportement à son égard avait changé ou non.

En sortant de la salle, il avait vu posé sur une petite table des pots en plastiques remplis de fraises. Un petit panneau indiquait que chaque ange pouvait en prendre un pot. Loëse ne réfléchissait pas longtemps et prenait un pot sans toutefois ne pas oublier de remercier la petite dame rondelette proche de la table qui semblait travailler dans les cuisines. Il raffolait des fraises. C'était son petit péché mignon. Il aurait pu dévorer des champs entiers si il en avait l'occasion.

Il marchait vite dans les couloirs ne préférant pas voler ne sachant pas si c'était interdit ou non. Loëse finissait par sortir par la grande porte en bois du bâtiment et respirait l'air frais de ce début de mâtinée. Il souriait plus qu'avant en voyant passer sous ses yeux un oisillon voler avec difficultés accompagné de sa mère et de ses frères et sœurs.

Loëse relevait la tête sentant quelqu'un l'observer. Il entrait en contact avec de grands yeux verts de chat. Firilia. Elle était montée dans un arbre et était accrochée à une branche. Agilement, elle rejoignait le sol pour se retrouver face à l'ange.

— Re bonjour. Tu es prêts ?

— Oui.

— Prêts pour le défi du jour pour savoir qui commence ?

— Oui.

— Tu sais seulement dire oui Loëse ?

À l'entente de son prénom sortant de la bouche de la démone d'une façon sensuelle, Loëse frissonnait. Il rougissait pour détourner le regard de celui de la démone ne l'ayant pas vu changer de comportement. Un forme de tension était palpable entre eux.

— Il faut croire que oui.

Un blanc s'installait entre eux qui semblait durer une éternité. Ils se regardaient dans les yeux sans toutefois les cligner.

— Tu veux une fraise ?

Loëse tendait le pot en direction de Firilia dont les yeux grossissaient d'envie.

— Oui.

— Tu dis aussi oui.

— Comment dire non à une fraise. J'en raffole.

— De même.

Ils s'installaient sur un petit banc marron avoisinant et se partageaient le pot de fraise. Le comportement de Firilia avait encore changé. Elle n'était plus la démone hautaine. Non, elle ressemblait à une petite fille mangeant des fruits dont elle raffolait. Et c'était le cas.
Loëse apprenait qu'elle en rêvait presque et qu'il était impossible d'en avoir dans le bâtiment des démons.

— Le temps que j'arrive à table, il n'y a plus de pot par personne. Certains démons en prennent trois à quatre si ce n'est plus. C'est souvent à cause de ça que les disputes matinales sont très fréquentes et très agressives. Merci Loëse.

Loëse souriait. Un démon l'avait remercié. Il ne les pensaient pas capable de remercier. Ou de connaître les bases de la politesse. Donc tel fut son étonnement à l'entente du remerciement semblant sincère de Firilia.

— Merci encore, mais il est temps de faire notre duel journalier.

— Notre quoi ?

Elle soufflait et attrapait l'ange par le bras. Elle le tirait à sa suite vers un parc proche brisant toute la magie de l'instant passé désormais.

— Notre défi journalier qui consiste à savoir qui commence avec Meyri aujourd'hui. Et comme je suis une fille et un démon tu n'as pas le choix que de me laisser choisir le défi du jour. Donc tu ne vois pas d'objection ? Tu choisiras celui de demain.

Elle lui tenait presque un couteau sous la gorge changeant radicalement son comportement envers l'ange qui en était encore tout déstabilisé. Il faisait un hochement de tête pour dire "oui" sans ouvrir la bouche sachant que la démone le blâmerait.

— Je n'ai pas entendu. Alors ?

— Ou...i.

— Je n'entends toujours pas ?

Loëse ressemblait à un enfant que l'ont punissait. Les mains serrées devant lui, les yeux baissés regardant ses baskets neuves.

— Oui.

— Oui qui ?

Il relevait brusquement la tête et devenait rouge.

— Oui Firilia.

Un sourire de vainqueur prenait possession du visage de Firilia, elle semblait avoir atteint le but qu'elle voulait atteindre.

— Tu t'énerves l'ange ?

— Non.

— Tu vois que tu peux changer d'humeur très vite mon petit poulet.

— Pourquoi as-tu changé, tu étais beaucoup mieux hier soir et ce matin.

Elle ne montrait rien, mais au fond d'elle, elle ressentait un petit picotement dans ce lieu qui s'appelait le cœur. Toutefois, elle forçait un sourire à son interlocuteur.

— C'est l'heure du boulot. C'est pour ça et tu devrais en faire autant. Surtout changer de comportement face à moi pendant le travail.

Elle soufflait sans attendre de réponse de la part de l'ange.

— Donc le défi du jour est simple. Pas de magie, pas d'ailes. Juste le cerveau. Nous allons faire une partie d'échec.

— Où donc ?

— Il y a un endroit dédié au échecs dans ce parc. Tu as juste à t'asseoir à une table avec ton adversaire et commencer ta partie.

— C'est tout ?

— Oui le poulet. Aller c'est parti.

Assis devant un petit lac à une table de pierre, Loëse avait les mains décoiffant sa chevelure.

— Ce n'est vraiment pas fait pour toi les échecs. Tu aurais pu me dire que tu n'y avait jamais joué.

— Je n'ai pas osé Firilia.

— D'accord ! De toute façon, j'ai gagné. Donc je commence avec Meyri aujourd'hui. Observe comment en peu de temps j'arriverai à la faire tomber du côté obscur.

Elle souriait tout en commençant à voler en direction de l'immeuble de Meyri avec Loëse sur ses talons qui ne devait rester que simple spectateur pendant plus de trois heures.

Loëse l'Ange gardien Où les histoires vivent. Découvrez maintenant